Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 3.djvu/760

Cette page n’a pas encore été corrigée

1507

PAPAUTE

1508

coiicilialion des doux principes établis au début, ils disent qu’assurément, si un jugement de l’Eglise veujiit il contredire la révélation ancienne contenue dans l’Ecrilure et l’antifiue tradition, il serait abusif, et non inl’aillible ; mais que le fidèle n’a pas à craindre de l’Eglise universelle un abus semblable, car

« t>tle même assistance dJTJne, qui assure à l’Eglise le

droit de ne pas errer quand elle inter|iose son jugenïonl sur la doctrine (spi’culative) et sur la morale, lui « ssure aussi et pour la même raison le privilège de n’en pas abuser ; et si cette garantie de sécurité manqu.ut, iious Si-rions également incertains dans notre croyance, et 1 on pourrait se demander toujours, si l’Eglise n’a pas abusé de son autorité, si elle ne s’est pas écartée des véritables sources (de la révélation), qui rendent ses décisions InfaillibU-s. Une telle méthode aboutirait à subordonner les décisions de l’Eglise universelle onx cap ? ices lU au jugement privé de chacun des chrétiens. » Ibid., u. 10, col. 1015.

Oui, « une telle méthode » rendrait illusoire et inutile la nécessaire infaillibilité de l’Eglise universelle. Mais n’était-ce pas précisément la méthode des jansénistes, quand ils subordonnaient depuis si longtemps à leur caprice et à lenr jugement privé la bullo [’ni^enitus, bien qu’acceptée par l’unanimité morale du corps épiscopal, et partant, infaillible décision de l’Eglise universelle ? Le document de Pistoie entrevoit cette grave objection, et s’ed’orce d’y échapper :

« … Tout fidèle, dit il, a l’obligation rigoureuse li’écouter

les décisions de l Eglise universelle, cl de réforuier sa pro[>re croyance quand elle leur est opposée. Mais comment pourra-t-il écouter cette voix et réfornïeT- cette croyance, si les décisions mêmes étaient vagues, eiubrouillées et obscures.’Ce qui doit être proposé à la foi des jieuples, ce qui doit servir comme de base à la sanctification de chacun, doit être clairet déterminé. Une décision incertaine et ténébreuse ne ferait que multiplier les division-^ et les doutes ; et ce serait pécher non seulcmerit conirela religion mais encore contre la logique, d’exiger la croyance à des doctrines dont on ne sa-t ce qu elles sont, ou de con<lamner des erreurs que l’on ne connaît pas encore, ou d’exiger une croyance limitée, respective, indétornîinée, etc. Si un tel cas se présente, les fidèles sonte : i flroit de demande ! - l’explication ; et tant qu’elle ne leurest pas donnée d’une manière précise, ils n’ont aucunement le devoîï’de se déterminer |)ar des décisions aussi iri’éguUères ; qu’ils remontent plutôt, autant qu’on le peut, à la sure doctrine des Ecritures et delà tradition. » Ibtd.^ u. 1-2.

; Mais tous les hérétiques dont nos jansénistes de

Pistoie admettent la juste condamnation par l’Eglise (Mlholique, les Arius, les Nestorius, les Pelage, etc., disaient la même chose qu’eux, pour se débarrasser de leur propre condamnation. « On ne connaissait pas encore assez leur doctrine » quand on l’avait condamnée ; les décrets qui les condamnaient

« étaient vagues, embrouillés et obscjirs » ; ils

n’étaient tenus à rien, tant qu’on ne leur fournissait pas d’(I explication précise » ; en attendant, ils o s’en tenaient aux Ecritures, ou à l’antique tradition >'. Si l’échappatoire avait queli]ue valeur, tous les hérélicpies écliai)[ieraient à leur condamnation, et l’infaillibilité de l’Eglise deviendrait donc illusoire et inutile : ce que ne veut pas le document de Pistoie, qui se contredit ainsi à deux paragraphes d’intervalle. C’est sans raison, d’ailleurs, qu’il exige dans les décisions de lEglise, sur ces questions ardues des mjstères révélés, une clarté, une détermination, une précision d explication qui n’appartient pas à l’inlirmité de notre connaissance ici-bas. L’infaillibilité de l’Eglise n’est pas la parfaite science, ni la clarté absolue ; on ne trovive nullement cette clarté ni cette précision d|ins <( ; » sles décrets des anciens conciles, que les jansénistes vénéraient et tenaient pour règles obliga toires de notre foi (n. g). D’autant plus que la décision de l’Eglise sur une question de ce genre, pour laisser un libre développement au travail futur des exégèles et des théologiens, qui lui est nécessaire ou utile, se borne d’ordinaire à exiger l’adhésion irrévocable à un certain minimum de vérité, respectant la liberté de la science et laissant aux discussions privées les précisions ultérieures, qui ne sont pas encore définies ; d’oii il résulte que la définition reste i( vague et indéterminée ».en tant qu’on la compare aux précisions plus nettes apportées par les explications tbéologiques diverses et parfois opposées, qui restent permises en attendant une décision nouvelle.

Au fond, ces superbes exigences de précision et de clarté parfaite dans les décisions de l’Eglise, quand il s’agit par exemple des mystères de la grâce défendus par les Papes contre Jansénius et Quesnel, portent la marque du rationalisme de l’heure, auquel les jansénistes cédaient de plus en plus, tout en prétendant le combattre.

Bien caractéristique aussi de l’heure que l’on vivait, cette onctueuse déclamation qui vient ensuite sur les

« jours heureux » où l’Eglise ne connaissait encore ni (( les

plaies vives que lui ont faites ces décisions indéterminées », ni le « malheur des temps, permis ensuite parla divine Providence pour réjirenve de ses teriteurs >). Eu cet âge d’or, à l’abri « <lcs perturbations, du despotisme, des incertitudes, des graves innovations », l’Eglise <( cherchait ù enseigner et à persuader, non pas à imposer et à exiger i l’aveugle)>.Etpuis il ne faut pas « abuser du nom d’Eglise. Des décrets sortis d’une église particulière » — 0-1 évite de nommer Uome — - a mis en avant avec des intenlior)s moins pures, tendant à renverser l’antitiue doctrine, imposés par des moyens irréguliers et violents, ce n’est point la voix de l’Eglise. Sabtis ne serait pas moindre, si l’autorité ecclésiastique outrepassait le » limites qui la renferment dans la doctrine et la morale, et touchait aux choses extérieures », oublieuse du cai-actère

« purement spirituel que lui a donné le divin Rédempteur, 

si les [lasti^urs sortaient de ces limites, ils n’auraient plus aucun droit à la divine assistance promi-e, et lents déterminations ne seraient que des usurpations, propres à semer le scandale et la division dans la société. »

A ce mot A’ahus souvent répété, on croit entendre résonner la voix de nos procureurs du roi, lançant un appel comme (Va}>us contre tout mandement épiscopal qui « semait la division » en réfutant un pamphlet janséniste contre les é^êques, ou qui se permettait de rappeler les règles ecclésiastiques du refus des sacrements, chose extérieure.

Conclusion dudécret : « Le saint synode, donc, en reconnaissant la véritable autorité de l’Eglise, rejette solennellement toutes les additions que la passion y a faites dans les siècles postérieurs, persuadé qu’il n’appartient pas à l’Eglise de s’ingérer dans les droits temporels de la souveraineté, établie immédiatement par Dieu lui-même, d El c’est pour « fixer ces frontières » de l’Eglise et de la souveraineté en recourant à une parole « des plus valables et des plus sacrées », que le sj’node adopte « 1rs quatre celi’hres articles du Clergé de France, qui firent tant d’honneur aux lumières et au zèle de la respectable assemblée de 1682 ». Suivent les quatre articles en italien. Encore un écho du parlement de Louis XV, si empressé à ressusciter l’enseignement de 1682 et à l’imposer. — Le décret se termine jiar un exemple vivant des rapports vrais entre l’Eglise et la « souveraineté » et en même temps un hommage rendu à la n piété éclairée du très religieux souverain ». le grand-duc. Jugeant dans sa sagesse qu’une décision de Paul II, insérée dans le droit canonique (Amhitinsac ). « tendait à confondre les deux puissances que J.-C. a voulues absolument distinctes j>, Léopold