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tion de l’Assemblée de 1682 n’éprouva et ne pouvait éprouver aucune opposition en France. Elle ne faisait que conOrmer une doctrine qui dans tous les temps avait été chère à l’Université et à la Faculté de théologie de Paris. » Hut. de Uossnet^ 1. VI. ch. vi. Avec l’opposition de la Sorbonne, mentionnons en passantcelle de l’opinion publiqjie. « La Déclaration du Clergé, dit Legbndue, témoin non suspect, ne fut point d’abord applaudie. Loin de là… Ce snulètement qui était quasi général, produisit des récils piquants où M. de Harlay étaitle plus maltraité. » Mémoires, p. 46. Des chansons circulèrent contre les auteurs de la Déclaration, et en faveur de la Sorbonne ;

« La Sorbonne défend la foi », etc. Louis XIV

se préoccupa de ces couplets. Gbrin, ttecherclies, p. 401, 40î ; cf. p. 597.

Quant à l’assemblée du clergé, si pompeusement commencée, elle fut brusquement congédiée par le roi. Cralgnait-i ! que l’exemple de la résistance donné alors par la Faculté de théologie n’ébranlât et ne divisât une assemblée dont Harlay disait à Golbert : La plupart changeraient demain et de l)on cœur, si on le leur permettait » ? Ou plutôt, les convictions religieuses et le bon sens de Louis XIV reprirent-ils le dessus, à la vue du schisme auquel ses conseillers, ministres et parlementaires, le poussaient ( « Si je les avais crus, j’aurais coiffé le turban »), et vers lequel plusieurs prélats de l’assemblée se laissaient emporter ? Ils avaient reçu le bref du Il avril, ofi Innocent XI déclarait » nuls « les premiers actes de l’assemblée relatifs à la régale, ainsi que « ceux qui pourraient suivre », et reprochait aux prélats d’avoir sacrifié à la crainte leur devoir pastoral, et de n’avoir pas, à l’exemple de leurs prédécesseurs, plaidé la cause sainte devant le roi. Exaspérée, l’assemblée signa, le 6 mai. une protestation au Pape où l’on peut entrevoir la menace du schisme ; elle voulait, avec une lettre d’envoi, faire parvenir cette protestation à tous les évêques de France. Louis XIV l’en empêcha ; le g mai, il suspendit les séances de l’assemblée, et le 29 juin signa l’ordre de dissolution immédiate. VoirGÉRiN, / ?ec, //erc/i(>s, etc., pp. 327-331, 387 ; Lwisse, /iist. de France, loc. cit., p. 36.

2. Opposition faite à la Déclaration par d’autres universil<-s et en d’autres pays, surtout sur l’article de l’infaillihiliié. — Nous devons nous borner à deux exemples : l’un en paj’s annexé, l’autre à l’étranger. L’université de Douai, aussitôt après la Déclaration, envoya une réclamation au roi, et la renouvela à la fin de 168a en ces ternies : n Il y a environ huit mois que le zèle que nous avons poiir le service de Votre Majesté nous a obligéde lui représenter avec tout le respect possible la grande aversion de tous ses fidèles sujets, qui sont dans ces pays réunis à la couronne, de (pour) la doctrine contenue dans la Déclaration du Clergé de France, qui regarde la puissance ecclésiastique. Ils disent que cette doctrine est inouïe dans ces paj-s ; qu’on y a toujours tenu pour des opinions erronées celles qui choquent la primauté absolue et Vin/aillibilité du Souverain Pontife. ..Onnoiis avait assuré que l’intention de V. M. n’était pas d’obliger ses fidèles sujets à soutenir les propositions du Clergé contre leur conscience. Nous n’avons encore pu trouver aucune raison solide pour nous former une conscience qu’il nous est permis d’enseigner lesdites propositions. Nous nous prosternons â vos pieds, Sire, et nous supplions V. M. de nous excuser (dispenser) de soutenir et enseigner une doctrine contraire à celle qui a toujours été reçue dans ces pays et enseignée dans cette université, qui est au péril d’être ruinée si on l’oblige d’entrer dans les sentiments de la dernière Assemblée I du Clergé de France, d’autant que la plupart sem blent mieu^ aimer d’abandonner nos écoles, voire même renoncer à toute promotion et dignité, que de se soumettre à des opinions répugnantes à leur conscience. » GÉRiN, il)., p. 428. — Ce document, traduit en latin et publié dans l’ouvrage intitulé J/aHn.vsa Doctorum, Liège, 1683, a été cité par les écrivains du temps, comme Thvrse Gonzalès. qui nous apprend le rejet par le roi d’une supplique si bien fondée, le courage des professeurs de Douai à suivre leur conscience, la fermeture des cours et l’exil de quelques docteurs (De inf’atlihilitate…, pp. 11-118).

En 1682, comme les quatre articles se col|)ortaient déjà jusqvi’en Hongrie, le primat de ce royaume, l’arehevêque de Gran ouStrigonie, promulgua le 24 octobre un décret dont voici la partie principale : « A l’exemple de nos prédécesseurs, qui en des cas semblables ont proscrit les doctrines nuisibles à la foi, nous condamnons et proscrivons ces quatre propositions ; nous interdisons à tous les tidèles de ce royaume de les lire, de les garder, et plus encore de les enseigner, juscju’à ce que là-dessus se soit prononcé l’oracle infaillible du Siège apostolique, à qui seul appartient, par un privilège immuable et divin, de juger les controverses de foi ; aussi est-ce à lui que très humblement nous soumettons celle lettre, déclaration et décret. » Suivent les signatures du primat, des archevêques et évêques et autres dignitaires ecclésiastiques de toute la Hongrie (Petbhi fy, SacraCnncilia in re^no JJunguriæ celebrata, Vienne et Presbourg, 1742, part. II, p. 43g ; cf. Veith, De primatu et infalliliilitate, Malines, 1824, p. Saô, sq.).

Cette condamnation donna lieu en France à des incidents très significatifs, en irritant les évêques qui avaient été les chefs de l’assemblée du Clergé. Le second président de cette assemblée, l’archevêque de Reims, Le Tellier, fils du chancelier ministre, avoue bien, dans un document secret, « qu’un évêque a l’autorité d’empêcher dans son diocèse qu’on y débite une doctrine qui n’est pas de son goût, quand l’Eglise n’a pas prononcé ». Cependant, si l’on n’a pas le droit de censurer cette censure, il ne faudrait pas la laisser impunie. On pourrait tirer parti d’un mot qui prête « à tourner (cette censure ) en ridicule et à la décrier 1. C’est le mot so/a/n dans la phrase : Ad quam solam divino et immutabili prii’ilegio spectat de coniroversiis fidei judicare. Le parlement pourrait ordonner à la Sorbonne de donner sur celle phrase un avis doctrinal. « Je voudrais de plus, dit Le Tellier, qu’on composât un écrit qui, en expliquant les ignorances et les contradictions de cette censure de Hongrie, établit invinciblement la doctrine des Quatre articles par l’Ecriture et la Tradition… Par les brocards qu’on donnerait au Hongrois, on détournerait d’antres prélats de suivre son exemple. » Gérin, liecherches, p. 4 17. On est peiné de voir le grand Bossuet lui-même entrer dans la voie marquée par cet intrigant : « Nulle censure ecclésiastique, dit-il, n’est venue proscrire notre doctrine. Le premier de tous qui l’ait fait, et qui restera le seul, l’archevêque de Strigonie, se contredit lui-même. Il prononce sur noire doctrine une sentence, un jugement, et il dit en même temps : C’est au 5e » / Siège apostolique qu’il appartient, par un privilège divin et immuable, de juger les controverses de foi. » Gallia oilhodoxa, ri. xi, Œuvres, t. XXI, p. 7. Mais la contradiction que l’on cherche n’existe pas. Quand nos théologiens usent de la formule classique : De controversiis fidei judicare, employée par le primat de Hongrie dans la phrase incriminée, ils entendent un jugement définitif, sans appel etinfail-. lible, qui mette lin à la controverse dans la catholicité ; c’est en ce sens usuel qu’ils prouvent contre les protestants que Dieu doit avoir établi « un juge des