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PAPAUTÉ

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sert de base, la [lieri-e fonilamentale, devra pareillcmeiil durer jusqu’à la consommation des siècles.

Et, puisque la pierre fondamentale est l’autoiité gouvernante du prince des apôtres, il en résulte, d’une manière obvie, que cette autorité gouvernante durera aussi longtemps que l’Eglise elle-même, c’est-à-dire jusqu’à la lin des temps. Le principal de Pierre sera donc transniissihle par voie de succession perpétuelle.

Ainsi le veut la nature même des choses. Tout pouvoir permanent exige que, par la succession continue et légitime de ses titulaires, subsiste la même personne morale et juri(liique. Si donc l’autorité gouvernante de Pierre doit durer jusqu’à l’époque mystérieuse de la lin du monde, et si l’apùtre Pierre doit mourir avant le triomphal retour de Jésus, l’autorité gouvernante de Pierre se perpétuera, conformément à la loi générale des sociétés humaines, chez les successeurs de Pierre.

Les protestants orlbodo-^ces, avec M. Zahn, contestent particulièrement cette conclusion, {/his Evangeliuin lies Mutihæus, p. 5^7) La primauté de Pierre, déclarent-ils, est analogue à la prérogative du reste des apùlrcs ; prérogative purement personnelle, prérogative ne comportant pas de successeurs : puisqu’elle a pour objet la prédication initiale et le premier établissement du christianisme,

C’est là simplilier outre mesure la prérogative apostolii]ue. Cette prérogative, d’après les textes, conférait un double rôle : celui de jondateurs et celui àe pasteurs, dans l’Eglise du Christ. Au rôle de fondateurs, se rattachait tout un ensemble de privilèges extraordinaires, qui devaient disparaître avec la personne même des apôtres. Mais au rôle de pusteuis, correspondaient une autorité enseignante, une fonction gouvernante, qui devaient durer, comme l’Eglise elle-même, jusqu’à la consommation des siècles, et donc se transmettre par voie de succession perpétuelle. (Maitk., xxviii, 18-20. Cf. xviii, |8) C’est en ce sens que les évêques monarchiques devinrent légitimement les successeurs des apôtres. L’histoire de la première antiquité chrétienne expliqiie et détermine ici la portée des textes cvangéliques.

Or, la prérogative spéciale de l’apôtre Pierre, décrite par le Tu es Petrus, est loin de se rapporter uniquement à la première fondation de l’Eglise, à la prédication initiale du christianisme. Par conséquent, on ne peut l’assimiler aux privilèges personnels des apôtres, à la fonction extraordinaire et transitoire de l’apostolat. Mais la prérogative de Pierre est une autorité gouvernante, le rôle de chef suprême : c’est-à-dire une fonction qui, par sa nature même et par l’indication positive du texte, comporte une durée permanente et une succession perpétuelle : exactement comme l’autorité pastorale du collège aposloli(iue.

Si, oubliant le cadre restreint de notre élude, nous interrogions les textes et les faits de la période qui suit immédiatement l’âge apostolique : Clément de Rome, Ignace d’Anlioche, Polycarpe, Hégésippe, Denys de Gorinthe, Aberkios, Irénée, Victor, nous constaterions comment la prérogative de Pierre a été reconnue, dès l’origine, pour une fonction permanente, pour une fonction légitimement Iransmissible. Bref, l’histoire de la première antiquité chrétienne, expliquerait et déterminerait, ici encore, la portée du texte évangélique.

A cet égard, plusieurs critiques libéraux nous apportent une conliruialion inattendue. Le lecteur n’a pas oublié que divers savants d’outre-Rliin expliquent l’origne rédactionnelle ou l’interjiolation tardive du Tu es Pei/’us par l’influence romaine. D’après

M. Julius GniLL, notamment, ce texte avait pour but d’appuyer les prélenlions dominatrices des évêques de Rome, vers la (in du second siècle. (Der Primat des Petriis, p. ^S-^y) C’est reconnaître, au moins, que le Tu ts Petrus ne siguitie pas un prérogative exclusivement personnelle à l’apôtre Pierre, mais une prérogative durable et perpétuelle. C’est reconnaître que le Tu es Petrus donne bien à entendre

j c|u’il y aura des successeurs de Pierre, légitimes héritiers de sa prérogative.

Telle est également l’opinion de M. Loisv, le<iuel place à la lin du premier siècle l’origine rédaction I nelle du Tu es Petrus ;

I Si r^vungéliste n’a pus seulenieitt en vue la personne I do Simon-Fieire, ce n^est pas pour lui dénier le pouvoir 1 qu’il a exercé dans 1 Église ; c’est poree qu’il est préoci cujié du pouvoir niême autant que de la personne, il n’a pus songé à une inlluence, à une autorité, jt une uction qui devaient dîspuraitre arec l’epôtie lui-n : ènie, et qui n’aui’uient plus été, en son temps, qu’un souvenir déjà lointain. Siino ! i-Pierre n’est pas que le fondement liistol’ique de l’Eglise, il est le fondement actuel et permanent ; il vit encore, uux yeux de Matthieu, duns une puissance qui lie et délie, qui délient les clefs du lîoyaume, et qui e^t l’autorité io V t^&& elle-même, non jias sans doute son autorité dilTuse, le régime particulier des communuulés, mids une autorité générale et distincte, qui est uux autorités pai ticulieres ce que Simon-I’ierre a été par rapport aux disciples et à Paul lui-même. I/intérèt que l’évan^élisle prend ou chef des apôtres n’est pus seulement rétrospectif mais actuel ; il n’a pour objet le passé que dans la mesure où le passé importe au présent ; il atleale que Pierre vit encore que’cpie part. Une ti’ndilion (le Pierre, qui importe à toute l’Église, subsiste dans lEglise. Les critiques qui voient dans ce passage de Matthieu le plus ancien témoignage des prétentions de l’Eglise romaine rencontrent rinter']>rétution catholique du texte.

,., Ce n’est pas sans cause que la tradition cat/iolii/ue a fondé sur ce texte le dof^me de la primauté romaine. La conscience de cette primauté inspire tout le développement de Matthieu, qui n’a pas eu seulement en vue la personne historique de Simon, uiuis aussi la succession truditionnelle de Simon-Pierre. ! Synoptiques t. II, p. 0, 10, 13. C’est nous-mêmes qui avons souligné quelques mots)

Nous ne nous méprendrons assurément pas sur le point de vue de M. Loisy. Du moins constaterons-nous que son interprétation corrobore, avec un singulier relief, la a valeur démonstrative « du Tu es Petrus.

Texte authentique en saint Matthieu, parole historique de Jésus-Christ, le Tu es Petrus garantit donc à Pierre le rôle de chef suprême dans l’Eglise : un principal nécessaire ; un principal Iransmissible par voie de succession perpétuelle.

C’est le témoignage capital en faveur de la primauté de saint Pierre dans le jXouveau Testann nt.

III. — Les auti’ea textes évangéliques

r Le texte Confirma fratres tuos (Luc, xxii, 3 r, 82)

Ft le Seigneur dit : Simon, Simon, voici que Satan vous a réclamés pour vous cribler comme le froment. Mais j’ai prié pour toi afin que ta foi ne défaille pas ; et toi-même, à ton tour _ou : quand tu seras converti], affermis tes frères.

Aucune controverse particulière sur l’authenticité ou l’historicité de ce texte dans le récit du troisième évangéliste, saint Luc.

Aucune incertitude véritable sur la signification littérale du passage. A propos de la locution y.y.’t m 7IÎT5 lTt17Tyj£f « ; , les uus croieut devoir traduire par à ton tour, sens que suggérerait une analogie hébra’ique ou araméenne, iandis que les autres voient dans