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PAIX ET GUERRE

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dans la ïlirace et la Macédoine ; entre les Polonais et les Tcliéeo-Slovaques en Haule-Silésie ; entre les Polonais et les Ruthènes en Galicie et en Uk"aine ; entre les Allemands, Polonais, Lettons, Finlandais, Lithuaniens, Grands-Russiens et Petits-Russiens aux conlins du monde slave, du monde germanique et du monde Scandinave. Et ne disons rien de la liquidation de l’Empire ottoman d’Asie.

La cojiférenee delà Paix(oùIescaleuls de grandes puissances ne sont, d’ailleurs, pas très différents de ce qu’ils furent en 1815) s’évertue à trouver des solutions pacillcatrices. Elle s’aperçoit que le travail est un peu ardu. Et une chose, tout au moins, est unaniuieuient reconnue comme induhitatjle : c’est que le nouveau statut international fera beaucoup de mécontents ; peut-ctie même aboutira-t-il à mécontenter tout le monde à la fois. Nul ne le conteste : après comme avant la signature des traités de paix avec l’Autriche, la Hongrie, la Bulgarie, la Turquie et les anciens vassaux de l’Empire russe, il y aura des doléances anières, des réclamations tenaces, des agitations plus ou moins impétueuses, fondées sur des interprétations ou applications contradictoires du principe des nationalités.

Trêve aux formules fallacieuses ! Le principe des nationalités pose encore plus de problèmes qu’il n’en résout. Il tend à passionner les conflits plutôt qu’à les apaiser, il répand à travers le monde les semences de guerres futures. Il apporte un obstacle redoutable au succès de l’œuvre de paix et d’organisation juridique internationale que voudrait légitimement garantir la Société des Nations.

L. Participation du Saint-Siège. — Four procurer à l’ordre juridique international, que menacent tant de périls, une garantie de dural>le stabilité, il faut lui donner une haute et souveraine consécration d’ordre moral et religieux dans la conscience des peuples.

On peut et on doit faire pénétrer de plus en plus profondément dans les idées, dans les mœurs, dans les préoccupations générales du monde contemporain le principe du règlement pacilique et arbitral des conflits entre les puissances, la notion, l’estime, le respect des règles du droit des gens, avec leurs lois et sanctions internationales. On doit faire régner, dans les rapports mutuels des peuples, les préceptes de la morale divine, avec l’esprit de justice et de charité. On n’opposera évidemment pas, de la sorte, une barrière infranchissable aux entreprises audacieuses et injustes, dont la possibilité (même après la réduction générale et proportionnelle des armements ) réclamera toujours que les nations restent en mesure de repousser la force par la force et de mettre la force au service du droit. Mais on pourra, faute de mieux, créer un état d’esprit, une ambiance, une atmosphère, fjui favorise l’œuvre de la Société des Nations, et qui rende pratiquement plus dilliciles, plus rares, j plus dommageables à leurs propres ailleurs les violations graves de la loi des nations.

Or, i)our parvenir à un tel résultat, le concours du Pontife de Rome est le plus enviable et le plus indispensable de tous.

Plus que personne au monde, le Pape est désigné pour être le messager, l’arbitre, le législateur de la paix et du droit parmi les nations. Il a pour mission religieuse d’être le Pasteur universel des ànics. Il garde le dépôt de la doctrine évangélique de paix, de justice et de charité. Les écoles théologiques dont il est le suprême docteur, donnent, depuis de longs siècles, un enseignement lumineux, cohérent, sur le droit de paix et de guerre. Les institutions du catholicisme lui permettent d’agir piofondément sur la formation morale et intellectuelle, sociale et spiri- î

tuelle, de plus de doux cents millions de consciences humaines. A travers les siècles, le nom de la Papauté romaine demeure associé, dans l’ordre du règlement arbitral des conflits entre les peuples, dans l’ordre même de l’organisation juridiijue internationale, à l’elTort le plus magniflque et le moins inefficace qu’ait enregistré l’histoire.

En même temps que sa juridiction spirituelle, le Pontife de Rome possède une souveraineté temporelle, non plus territoriale, mais personnelle, qui, aujourd’hui même, est diplomatiquement et aulhentiquement reconnue en droit international. A ce titre, il est normal que les représentants diplomatiques du Pape viennent siéger dans les assemblées internationales oii délibèrent les rei)résentants diplomatiques de toutes les puissances contemporaines : surtout lorsque, comme dans la Société des Nations et la Cour suprême de justice et d’arbitrage international, l’objet de ces institutions est de garantir la paix dans la justice entre les nations. Objet tout particulièrement en rapport avec la mission distinctive, le rôle historique et les préoccupations constantes du Souverain Pontillcal romain.

Non seulement le Pape commande à plusieurs millions de sujets spirituels dans chacun des Etats du monde entier, mais il n’est inféodé à aucun système d’alliances, à aucune combinaison politique, diplomatique ou économique. Il n’est étranger nulle part. En tous pays, les catholiques le reconnaissent pour leur Pasteur, leur Docteur et leur Père, tandis que les non-catholiques d’intelligence droite saluent dans sa personne une puissance morale dont l’autorité, sans égale ici-bas, est digne d’égards, de respect, voire de vénération.

Peut-on contester de bonne foi que le Pape soit, plus que personne, à sa juste place dans les assises diplomatiques et judiciaires delà Société des Nations ?

Imaginons que Léon.I1I ait été représenté à la première conférence de La Haye en 1899 et Pie X à la deuxième en lyo^. Les règles tulélaires du droit international, telles qii’elles furent alors promulguées, auraient bénélicié du prestige moral et sacré que leur eût garanti la collaboration, l’adhésion personnelle du Pontife de Rome. Les articles essentiels des conventions de iSijg et de IQ07, concordant parfaitement avec les règles théologiques du droit de paix et de guerre, auraient été vraisemblablement pronmlgués, synthétisés, commentés, à titre de normes obligatoires de la morale des nations, dans quelque document [lontilical adressé à l’Eglise universelle. Les mêmes principes de la morale et du droit auraient été, en chaque pays du monde, inculqués à des millions de consciences croyantes par la prédication ecclésiastique, par l’enseignement théologique et catéchétique. C’est ainsi que l’ont été, depuis trente ans, les applications les plus importantes des doctrines traditionnelles sur la justice et la charité aux problèmes actuels du capital et du travail. Personne ne contestera que cette intervention de la Papauté dans le domaine social ait introduit, au milieu îles redoutables péripéties de la guerre des classes, un puissant élément de pacilication en vue du règlement équitable des questions ouvrières. Entre les nations rivales, de même qu’entre les classes sociales en conflit, le Pape doit apparaître comme le docteur des droits et devoirs de tous, le médiateur auguste de la paix de Dieu.

En matière de morale internationale, l’altitude adojjtée par la Papauté romaine n’aurait probablement pas été sans provoquer, comme dans d’autres domaines, l’émulation des Eglises dissidentes et des groupements non chrétiens. De la sorte, il y aurait eu de hautes influences religieuses, intellectuelles