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ORIGENISME


suprême, la médiation du Christ ne trouve plus à s’exercer. Qu’alors le règne du Christ prenne (in, le Christ rentrant tout le premier au sein de Dieu et tous y rentrant avec lui, ce peut être dans la logique du système, à supposer certaines déformations initiales. Mais nous ne trouvons pas cette conséquence expressément déduite dans ses écrits et nous ne voyons pas qu’elle lui ait été reprochée par les ennemis acharnés qu’il comptait à la tin du iv’siècle. Pourtant cette génération connaissait l’hypothèse d’après laquelle le règne du Glirist prend fin à la consommation : saint Cyrille de Jbrusalkm le signale comme ayant fait récemment son apparition en Galatie, Catech., xv, i-), P. G., XXXIX, 909."V : allusion manifeste à l’hérésie de Marcel d’Ancyre. Il ne songe pas à y associer Origène. Si elle fut dénoncée au vi’siècle, c’est moins par le fait d’Origène que des origénisles palestiniens. — Huet, Origeniana, II, 11, q. 3, 30 et q. 11, 24, 26.

l’j" Le Citrist confondu dans la foule des êtres raisonnables. — Si l’on pose en fait que le terme de l’évoluLion cosmique est l’é^’anouissenient de toute personnalité au sein de la monade div.ne, si le Christ tout le premier va s’y perdre et les créatures après lui, la conséquence est fatale. Mais cet aboutissement panthéiste est-il imputable à Origène ? Nous avons vu (sous 10") des raisons de reculer devant une conséquence aussi extrême. Le panthéisme origéniste est éclos au vie siècle.

Si maintenant on se réfère à notre tableau synoptique, on se rendra compte qu’il y eut, au milieu du VI’siècle, plus d’un origénisræ et l’on discernera mieux les divers courants.

L’appellation de WpuTo^.ricicr.t ou de TtToc.ôrTKi, qui, comme on l’a vii, désignait certains origénistes, parait trouver son explication plausible dans le 6’anathématisrae de553. Voici l’étrange christologie visée par cet anathématisme :

Une seule intelligence, de toute l’unité primitive des êtres raisonnables, persévéra immuablement dans l’amour et la contemplation de Dieu, devint Christ et Roi de tous les êtres raisonnables, s’éleva au-dessus de toute nature corporelle, du ciel, de la terre, et de tous les intermédiaires. Ainsi le monde, renfermant les éléments primordiaux de sa substance, sec, humide, chaud, froid, et l’idée d’après laquelle il fut formé, prit naissance ; ce n’est point la très sainte et consubstanlielle Trinité qui forma le monde et en est l’auteur ; mais l’esprit ouvrier, disent-ils, préexistant au monde et lui donnant d’être, est l’auteur du monde.

D’après cette conception — que confirment les anathéraatismes 7 et 8 —, le Christ n’est pas Dieu au sens strict, mais le premier des esprits créés. La fonction créatrice à l’égard du monde est exercée, non par la Trinité divine, mais par le Christ, qui prend ainsi rang — lui quatrième — au-dessus de la création. Cette double condition, de Première créature elve Quatrième personne quasi-diiine, rend bien compte de ces deux appellations que les auteurs anciens n’ont pas pris la peine de nous expliquer.

Quant à l’appellation d’'110’j ; / ; itt-^i, désignant des origénisles plus radicaux, elle traduit la coneeptionrépandue dans les analhématismes 13, 13, 14, 15, d’après laquelle, tout devant faire retour à la monade primitive, toute distinction s’effacerait entre le Christ et les autres êtres raisonnables ; l’égalité la plus parfaite dans l’anéantissement de toute personnalité serait le terme de l’évolution cosmique. Conception nettement panthéiste, sinon nihiliste, qui dépasse en impiété la précédente ; le sixième siècle avait le sentiment très net de cette différence.

Outre ces deux recueils d’anathématismes qui

ont, au regard de l’Eglise, une valeur officielle, nous possédons encore une formule de rétractation imposée à un origéniste impénitent. Cet origéniste était Théodoue db Scythopolis, lévêque de cette même ville palestinienne d’où est sorti le biographe de saint Sabas ; la rétractation qui lui fut imposée dut coïncider, à quelques semaines près, avec les délibérations de V concile sur l’origénisme ; car elle parait dater du commencement de l’année 553. Le 1’libelle de Théodore » comprend douze anathématisnies : sur ce nombre, 9 reproduisent presque mot pour mot les 9 premiers anathématismes de 543 ; les 3 autres sont nouveaux, ce sont les 4, * e’lï’» ils ont d’ailleurs leurs pendants parmi les 15 anathématismes de 553 : ce sont les J2’, 13’etii ». Donc, de toute manière, le libelle de Théodore est une formule de transition ; dans la table de concordance en 17 articles que nous avons dressée ci-dessus, il pourrait être distribué sous les numéros 1° — g° ; 15°

— 17". La doctrine abjurée par Théodore était, en somme, celle des isochrisis.’On trouvera son libelle, P. G., LXXXVI, i, 232-236. Cf. Diekamp, Origenistische Streitigl ; eiten, p. 125-128.

A côté de la lettre de Justinien à Menas, renfermant 24 citations textuelles d’Origène, ! ’£/ ;., cxxiv de saint Jérôme, Ad Avitum, par ses 25 extraits traduits du Periarclion, offre une base solide pour la critique du système origéniste.

La double liste d’anathématismes dressée par ordre de Justinien reflète les préoccupations du sixième siècle. D’autres siècles ont formulé contre Origène d’autres accusations. Au début du quatrième siècle, Pamphile le martyr ramène à neuf chefs le réquisitoire qu’il se propose de réfuter ; P. G., XVlI, 578sqq.

1. Origène aurait enseigné que le Fils de Dieu est inengendré.

2. Il aurait enseigné, selon les rêveries valentiniennes, que le Fils de Dieu a été produit par voie de projection.

3. Par une erreur toute contraire, il aurait enseigné, avec Artémas ou Paul de Samosate, que le Christ Fils de Dieu est pur homme et non Dieu.

4 Par une nouvelle contradiction (la méchanceté est aveugle), il aurait enseigné que les faits attribués au Sauveur n’ont qu’une vérité d’apparence et d’allégorie, non d’histoire.

5. Il aurait admis deux Christs.

6. Il aurait absolument nié la vérité des récits de faits sensibles rapportés dans les diverses parties de l’Ecriture touchant de saints personnages.

7. Sur la résurrection des morts elle châtiment des impies, il aurait-— chose particulièrement grave

— nié les supplices infligés aux pécheurs.

8. Quelques-uns incriminent ses écrits ou ses opinions touchant la condition de l’àme et l’économie du salut.

9. Enlin on le livre à tous les mépris pour avoir enseigné la métensomatose, c’est-à-dire le passage d’âmes humaines, après la mort, dans des animaux muets, serpents, bêtes de somme ou autres, et pour avoir attribué à des animaux muets une âme raisonnable.

Un autre réquisitoire, en quinze articles, est dressé par l’apologiste anonyme d’Origène que Pho-Tiis analyse, Bibt., col. cxvii, I. G., CIIl, 896.

III.

Conclusions

I. Genèse des idées origénistes. — Comment expliquer la genèse de ces idées ? Origène va nous } aider en exposant, dans le prologue du Periarchon, que la révélation venue de Dieu ne dispense pasl’houuiie