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ORIGENISMR

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trois hérésies d’Arius, de Nestorius etd’Origène. De retour en Palestine, il mourait nonagénaire (5 décembre 532).

Après la mort de saint Sabas, l’origénisme fit de rapides progrès. Il eut pour promoteurs principaux Doiuitien.higumènedu moiiasLère Marlyrios, etTliéodore Askidas, diacre de la Nouvelle Laure. Ces deux moines vinrent à Constantinople et, en allichant un grand zèle pour le Concile de Glialcédoine, appuyés par le patriarclie Eusèl)e, réussirent à gagner la faveur impériale. Domitien fut élu évêque d’Ancyre en Galalie, Théodore de Gésarée en Cappadoce (vers Ô37). D’ailleurs ils ne quittèrent guère la cour, s’occupant d’y protéger les intérêts de l’origénisme. Dans les laures de Palestine, la lutte était plus vive que jamais. L’abbé Gélase, deuxième successeur de saint Sabas (587), déployait une grande énergie : quarante moines origénistes furent chassés du cloilre de saint Sabas. Ils se réunirent à la Nouvelle Laure, citadelle de l’origénisme. Pierre, patriarche de Jérusalem, cherchaità concilier les partis. Mais Ephrem, patriarche d’Antioche, se prononça nettement contre les origénistes et les anatliémalisa dans un synode d’Antioche (été ô^a). Bientôt une députation palestinienne allait à Constantinople porterplainte contre les enseignements de la secte. Inviter l’empereur Justinien à se constituer juge de la foi, c’était le prendre par son faible ; d’autre part, le patriarche Menas ne demandait qu’à battre en brèche l’influence gênante de Théodore Askidas. L’empereur et le patriarche se mirent donc d’accord pour porter un coup décisif à l’origénisme. Vers janvier 5^3, parut un édit impérial où la question doctrinale est abordée de front (Voir Mansi, Sacroriim Coiiciliorum nova et amplissima Collectio, t. IX, p. 488 D-533D). Les opinions origénistes y sont exposées, et condamnées par l’Ecriture et les Pères. Ordre est donné au patriarche de réunir tous les évêques et higuniènes de passage à Constantinople (Ivâiî/xsJKTy. ;), et de les inviter à condamner par écrit Origène et sa doctrine. La même lettre a été adressée à Vigile patriarche de Rome, et à tous les autres évêques et patriarches, nommément à ceux d’Alexandrie et d’Antioche. Suit ane liste de vingt-quatre cilationsplus ou moins textuelles dn Hep’t KpyCjj, à titre de pièces justificatives ; puis dix propositions (zcpa/aia) à souscrire. Nous traduirons ici ces dix anathématismes : — Mansi, t. IX, 533 ; Denzingbh-Bann-wart", 203-211.

1, Si quelqu’un dit ou tient que les ftmes humaines préexistèrent à l’état d intelligences et de saintes puissances ; que, s’étant dégoûtées de la contemplation divine, a’étant gâtées et par là refroidies dans l’amour de Dieu, elles furent pour cette raison appelées ûmes et, pour leur châtiment, plongées dans des corps ; qu’il soit anathàme.

2. Si quelqu’un dit ou tient que l’âme du Seigneur préexiste et fut unie au Dieu Verbe avant l’incarnation et lo naiisance virginale ; qu’il soit anathéme.

^ !. Si quelqu’un dit ou lient que le corps de Notre-Seigneur Jësus-CLrist fut d’abord formé dans les entrailles de la sainte Vierge, et (lu’ultérieurement le Dieu Verbe, avec l’àme préexistante, s’y unit ; qu’il soit anathéme.

4. Si quelqu’un dit ou tient que le Verbe de Dieu s’est fait semblahle à tous les ordres célestes, chérubin avec les chérubins, séraphin avec les séraphins, en un mot, qu’il s’est fait semblable à toutes les puissances supérieure » ; qu’il soit analhème.

ï. Si quelqu’un dit ou tient qu’a la résurrection les corps des hommes se relèveront sous la forme sphérique, »  ! nie que nous nous relèverons dans l’attitude droite, qu’il soit anathéme.

6. Si quelqu’un dit que le ciel, le soleil, la Inné, les astres et les eaux au-dessus du ciel sont des puiseancea animées et matérielles ; qu’il soit anathéme.

7. Si iiuelqu’un dit ou tient que le Seigneur Christ, dans

le siècle à venir, sera crucilié pour les démons, comme il le fut pour les hommes ; qu’il aoit anathéme.

8. Si quelqu’un dit ou tient que la puissance de Dieu est bornée ou qu’elle a créé seulement ce qu’elle pouvait embrasser ; qu’il soit anathéme.

y. Si quelqu’un dît ou tient que le cliàtimcut des démons et des hommes impies est temporaire et prendra fin quelque jour, ou bien qu’il y aura une restauration des démons ou des hommes impies ; qu’il soit anathéme.

10. Anathéme à Origène, surnommé Adamantios, qui a émis ces propositions, et à ses dogmes abominables, maudits et criminels, ainsi qu’à toute personne qui lesapprouverait, les défendrait ou oserait jamais en quelque mesure les faire siens.

Tout l’épiscopat oriental souscrivit ces anathématismes, le pape Vigile les souscrivit aussi, au témoignage de Cassiodore qui, vers 544, écrivait dans son De institutione diinurum litlerarum, i, P. L., LXX, un D : Hune (Origenem) licet loi Patrum impugnet auclorilas, præsfnti laineii U-mjiore et a Vigilio papa viro heatissimo denuo constat esse damnatum.

Au lendemain de la humôo ; ’e-j^-riwjiy. de 543, l’origénisme pouvait sembler frappé à mort. Mais la souplesse de Théodore Askidas atténua le coup. Avec tous les évêques présents à Constantinople, il signa les dix anathématismes ; Domitien d’Ancyre signa également ; et leur position à la cour fut plus forte que jamais.

Théodore ne tarda pas à prendre une revanche en détournant la théologie agressive de l’empereur vers la condamnation de Théodore de Mopsueste, assez généralement réputé ennemi de l’origénisme. Avec l’appui de l’impératrice Théodora, on réussit à persuader à Justinien que le sur moyen de réconcilier tous les monophysites avec le concile de Ghalcédoine était d’abattre les restes de l’hérésie nestorienne, par la condamnation de Théodore et de ses écrits, de la lettre <lu Persan Ibas à Maris, enfin des écrits de Théodoret contre les douze anathématismes de saint Cyrille. C’est la fameuse affaire des Trois chapitres

— trois groupes d’écrits répréhensibles, mais non formellement hérétiques.

Peu après l’acte de 543 contre l’origénisme, parut un nouvel acte impérial contre les Trois chapitres. Le texte ne nous a pas été conservé. Mais nous savons qu’il déplut fort aux patriarches Menas de Constantinople, Zo’ile d’Alexandrie, Ephrem d’Anlioclie, Pierre de Jérusalem. En somme, Théodore Askidas avait atteint son but, qui était de mettre ses adversaires en fâcheuse posture. Pourtant tous se décidèrent à signer le texte impérial, Pierre de Jérusalem sous la menace de déposition. Le pape Vigile résista plus longtemps. Mandé à Constantinople, où il arriva le 25 janvier 54^, il lutta pendant six ans et demi, avant de donner an décret conciliaire de 553 contre les Trois chapitres une approbation soigneusement limitée.

Sur la question origéniste, le pape Ut moins de difficultés. Il avait souscrit les dix anathématismes de 543 ; il souscrivit également les quinze anathématismes de 553, dont il nous reste à parler.

L’eil’ervescence origéniste en Palestine alla crorssanl au cours des années 543-553. Les origénistes de la Nouvelle Laure, forts de l’appui de Théodore Aski das, ne cessaient de molester les moines de la Grande Laure ; un jour ils donnèrent l’assaut à l’hospice des pèlerins, et il y eut mort d’homme. Dans sa détresse, l’abbé de la Grande Laure, Gélase, se tourna vers l’empereur. Il partit pour Constantinople ; mais, découragé par l’accueil qu’il y trouva, rebroussa chemin. Vers le même temps, février 54 ;  ; , nu origéniste nommé Georges pénétrait dans la Grande Laure à main armée, et prenait possession de l’higuraénat. Une persécution s’ensuivit ; les orthodoxes diu-ent