Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 3.djvu/607

Cette page n’a pas encore été corrigée

1201

ORDINATIONS ANGLICANES

1202

ils comprennent entre autres le texte complet de l’Ordinal anglican, pris dans une édition du temps de Charles 11. Ces » documents d’une autorité incontestable », comuie les appelle Léon XIll dans sa bulle, nous montrent clairement quels principes présidèrent à l’enquête. On n’accorda aucune attention à la question des consécrateurs de Parker : il n’y est fait allusion qu’une seule fois, dans une lettre de Dom Heskelh G. S. B., prieur des Bénédictins de Douai, à qui Mgr Tanari, internonce à Bruxelles, avait demandé des informations siu- ce fait. Mais Dora Hesketh n’en parle que comme d’un on-dit, sans ajouter s’il le croit digne de foi. Mgr Tanari s’en lait dans son rapport au Cardinal Casanata, rapporteur du Saint-Ofliee pour cette affaire ; Casanata s’en tait dans son Votum. Et ce silence s'étend non seulement à la légende de l’auberge de la Tête de cheval, mais à toute la cérémonie de Lambetb, à la substance même de l'événement comme à ses circonstances, et cela chez Tanari aussi bien que chez Casanata. On peut en dire autant de toutes les nouvelles informations recueillies en i yoi, comme aussi des rapports et du décret auxquels aboutirent en Un de compte tous ces divers documents. Le théologien consulteur qui, en cette deuxième occasion, rédigea un Votum à proposer au Saint-OlUce, commence par observer que, pour prouver l’invalidité des ordres anglicans, on ne saurait arguer du prétendu caractère burlesque qu’aurait revêtu l’ordination célébrée à la Tète de cheval : « Etiamsi pro vera adniittatur his « toria quæ circumfertur de ordinatione memorata

« Parkerii in Londinensi taberna, cujus erat insigne
« equi seu manuli caput, peracta, constat quatuor
« prædictos episcopos iUi ordination ! adfuisse, ubi « cumque factum fuerit, et cum precibus serio celea bfatum fuisse, non ludicre et joevilariter. » (Brandi, 

op. cit., p. 180)

De même Mgr Genetti, dans un rapport daté du 16 avril 170^ et adressé à Mgr Casoni, assesseur du SaJnt-OUice, établit par des raisons concluantes qu’on ne devra introduire dans les considérants du décret projeté pour le cas Gordon aucun argument emprunté aux circonstances de la consécration de Parker. Dans ce mémoire, textuellement reproduit par le P. Brandi (ibid., p. 260), Mgr Genetti raconte qu’en 1685 on consulta sur cette question, par ordre de Sa Sainteté (Innocent XI), plusieurs théologfiens, entre autres M. Joseph Charlas, l’archiprêtre Dorat et Mgr Genetti lui-même. Ils commencèrent par étudier l’affaire séparément et chacun exprima son jugement par écrit ; puis ils se réunirent pour décider de leur rapport. L’un d’eux alors a- outre plu€ sieurs autres raisons, fit valoir que la décision adé « quate devait se tirer, non du fait, qui dépendait

« de l’histoire fort embrouillée des divers changeI menls survenus en Angleterre en matière religieuse, mais du défaut de l’intention et de l’ina sutlisance des paroles employées parles hérétiques

a anglicans dans l’ordination sacerdotale ».

Cette consultation s était tenue à Paris. Mgr Genetti relate ensuite une visite qu’il fit postérieurement en Angleterre. Là il trouva que la question faisait l’objet de nombreuses diseussions, et Mgr Leyburn. vicaire apostolique du district de Londres, lui demanda son avis. Il s’ensuivit une autreconférence, convoquée sur le désir du nouveau Nonce, le Cardinal d’Adda. et qui réunit sous la présidence de Mgr Leyburn sept ou huit des membres les plus savants du clergé anglais, notamment André Gilfard et le docteur de Sorbonne Jean Betham. A tous Genetti fit accepter l’opinion qui avait déjà emporté tous les suflrages à l’assemblée de Paris : et il ajoute que, durant les quelques jours qu’on se ré serva avant de prononcer un jugement final, il eut l’occasion d’examiner du point de vue historique, avec l’aide d’un controversiste réputé, M.Jean Belson, le défaut de la succession anglicane. <i Comme (' on vit que ce fait demeurait toujours douteux, on

« Unit par conclure à l’unanimité et pour les raisons

< susdites [c’est-à-dire pour le défaut de l’intention

« et l’insulfisance des paroles employées] qu’il fal » lait traiter et recevoir les évêques et les prêtres
« anglicans et écossais qui reviendraient à la foi cat tholique comme de simples laïques. Et c’est la pra

< tique qui a été suivie depuis, sans autre difficulté. » Ni le P, Brandi, ni personne à notre connaissance,

n’a publié le nom du rapporteur du Saint-Office dans l’affaire de i^oij, ni le texte de son mémoire. Mais le mémoire présenté à ce tribunal par le Cardinal Casanata en 1685, et qui resservit en 170^, nous indique suffisamment quels motifs décidèrent à cette dernière date la Sacrée Congrégation — ou plutôt le Pape, car il s’agit d’un décret de Feria ijuinta — à prononcer que la forme et l’intention du rite anglican devaient être considérées nulles et vaines.

Qæ ces formules [anglicanes], dit Casanata, soient insuSsantes pour l’ordination des prêtres el des évêques, cela résulte, senible-t-il, de cette raison fondamentale, que les saciements n’opèrent que ce qu’ils signitient ex-< pressémentou du moins implicitement ; or, les paroles des dites formules ne signiBant en aucune manière le pouvoir le plus essentiel du prêtre et de l'évêque, c’est-àdire le pouvoir d’offrir le sacrifice et de consacrer le corps de Jésus-Christ, elles ne peuvent ni opérer ni conférer ce pouvoir, ni faire un vrai prèlre ; d’autant plus qu’elles ne sont pas accompagnées de la tradition des instruments du sacrifice, laquelle est en usage dans l’Eglise latine. Et bien que l’Eglise grecque et certaine » E : rlifles orientales ne connaissent pas la tradition des instruments, néanmoins, dans la prière qu’on appelle sacramentelle, elles confi-rent toujours clairement le pouvoir de consacrer le corps de Jésus-Christ, ainsi qu’il résulte des informations que j’ai prises, faisant traduire les formule » des ordinations des Arméniens, Maronites, Syriens, Jacobites et Nestorieus, tant catholiques qu’hérétiques, formules qui sont rapportées ci-après. Or les . glais n’ajont pas la tradition des vases sarrés, et ne conférant pas dans la prière sacramentelle le pouvoir de consacrer, il ne semble pas que l’imposition des mains puisse suffire à elle seule, car elle n’est pas déterminée à la collation d’un sacrement en particulier, et peut au contraire signifier non seulement le sacrement de l’ordre, mais celui de la pénitence, et celui de la confirmation, suivant ce qu’ont fait observer ies théologiens dans leurs commentaires sur l’Ecritare Sainte.

Tel est le passage essentiel du votum de Casanata. Quant à la pensée qu’il développe ensuite, il nous suffira de la résumer : le défaut signalé dans la formule, dit-il en substance, ne se trouve pas réparé par les paroles qui la suivent immédiatement, et par lesquelles on donne à l’ordinand le pouvoir de prêcher, de remettre les péchés et d’administrer les sacrements : car ces pouvoirs purement secondaires ne sauraient être réellement conférés, dès là qu’on a délibérément supprimé le pouvoir essentiel el dont les autres ne sont que le complément, le pouvoir de sacrifier. Et cela d’autant plus que les Articles anglicans proposent de ces fonctions accessoires elles-mêmes une notion très dilTérente de la notion catholique.

La décision de 1704 n’est pas fondée sur l’absence de la tradition des instruments dans le rite anglican. — Mais, dans le décret de 170^, deux points encore méritent d'être spécialement notés en raison des objections anglicanes. Le premier, c’est que, pour établir ses conclusions, le Cardinal ne partit pas d’une description plus ou moins fidèle de l’ordinal