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NORD (RELIGIONS DE L’EUROPE DU)

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de plaijues de lailon, avec une arêle pour tigurer le visage d’un être humain, ligurine avec un morceau de cuivre rccourljé en forme de nez, poupée avec une léle de lailon, morceaux de fer forgé plus ou moins grossièrement travaillés, etc.), véritable idole portative, exactement de la même catégorie que les grandes et vieilles, mêlées à de toutes peliles, groupées dans les lieux de sacrilice. De fait, les Samoyèdes, non contents de posséder et de vénérer de telles idoles ou boWany sous leur tente, les emportent toujours dans leurs migrations et ne veulent pas s’en séparer ; ils ne font aucune différence entre elleset les images sacrées des Orthodoxes.

Des chamans jouent le rùle de ministres du culte. A la fois prêtres et sorciers, en même temps que médecins, ces chamans portent un costume particulier : une tuniiquc de peau à laquelle sont suspendus de nombreux ornements en fer (couteaux, clés, vieilles serrures, clous, plaquettes, poissons, etc.). Ils exercent une très grande inihiencc sur les autres Sanioyêdes, auxquels ils imposent par leur habile prestidigitation.

2. Les Ijapona. — Rien donc que de très grossier chez les (pulque 5.ooo Samoyèdes disperses entre l’Oural et la mer Blanche ; Nordenskjôld les tient pour inférieurs aux ïchouktchis et surtout aux Lapons qui vivent à l’Ouest du Bielo Ozéro des Kusses, dans la partie la plus septentrionale de l’Europe. Ceux-ci ne semblent cependant pas avoir eu naguère des croyances beaucoup plus rallinées ; mais qu’ils vivent sur les côtes, dans les bois ou dans les montagnes, qu’ils soient Russes, Finlandais, Suédois ou Norvégiens, ils ne pratiquent j>lus, et depuis longtemps, leur ancienne religion. Tous sont convertis, ceux de la péninsule de Kola au christianisme grec orthodoxe depuisle xvi" siècle, grâce au moineTrifan, ceux de la Finlande et de la Scandinavie au luthéranisme depuis le milieu du xviii « siècle. Mais ils n’ont fait simplement, pendant longtemps, qu' « échanger des superstitions anciennes pour d’autres plus nouvelles », tant ils comprenaient mal les enseignements qu’ils avaient reçus. Lkopold de Buch raconte que, de son temps (il y a maintenant plus d’un siècle), les Lapons luthériens se présentaient aussi fréquemment que possible à la Sainte-Cène, car ils la regardaient « comme une espèce de sortilège cpii les préseryait de l’influence des malins esprits ». Il ajoute que, peu avant son voyage en Laponie (1806), les indigènes de ce pays s’arrangeaient de manière à partager le pain de la Cène avec les rennes de leurs troupeaux, pour en détourner toute espèce de danger… Rien d'étonnant à ce que de telles pratiques aient été fort longues à disparaître, si l’on sait que les pasteurs des Lapons ne parlaient pas la langue de leurs ouailles ; ils leur prêchaient des sermons que traduisaient ensuite des sacristains interprètes ! … Graduellement, grâce aux progrès réalisés en Laponie, ce laïuentable état de choses s’est amélioré, particulièrement en Finlande, où les Lapons savent aujourd’hui lire et écrire. De ce chef, leurs pratiques religieuses se sont heureusement inolilices.

En voyant ce qu’elles furent après leur conversion nominale à une religion chrétienne, on peut deviner ce qu’elles étaient auparavant. De fait, la religion primitive ou iincienne des Lapons était très grossière. Un auteur qui a soigneusement étudié ces Hypcrboréens et qui a recherché les faibles traces de leurs antiques croyances dans les actes de leur ie journalière ou dans leurs superstitions, GirsTAF db DiiBKN, veut qu’ils aient d’abord vénéré les forces de la Nature, |iuis qu’ils leur aient donné une àme à l’image de celle de l’homme. De là, chez eux, l’exis tence de nombreuses divinités naturelles, toutes indépendantes, toutes bonnes, mais capables de se fâcher, de se venger, de nuire et de devenir des divinités malfaisantes. Le soleil, la Uuona-neila ou « vierge verte » (la déesse du i)rinlemps), les forêts, les eaux, la tempête, le tonnerre constituaient autant de divinités pour les Lapons pour qui, d’autre part, certains arbres — l’aulne et le sorbier — et des serpentsfétiches étaient les objets d’un véritable culte.

A cette mythologie animiste est venue, en dernier lieu, s’en ajouter une autre, une véritable mythologie d’importation, grâce à laquelle le panthéon des Lapons présentait, à l'époque de leur conversion, autant et peut-étre plus de ressemblances que de divergences avec ceux des populations avoisinantes. Radien, le maître céleste, Jubræl, dieu, qui rappelle le Jumala des Finnois, Perkel, le diable, et aussi Thor, qui est tenu pour un dieu doux et bienfaisant, le promoteur des récoltes, le dieu qui lance des (lèches à l’aide de l’arc en ciel, voilà les principales divinités anthropomorphiques introduites en dernier lieu dans le panthéon des Lapons.

Ces primitifs croyaient à une autre vie. Pour eux, les morts la passaient dans le 5ai’ro, une demeure infra-terrestre, voisine de la surface où se meuvent les vivants ; et les premiers neeessaientdes’intéresser aux derniers ; parfois même ils leur rendaient visite. Ainsi s’explique le soin qu’avaient les Lapons de marquer la demeure des morts par des pierres auprès desquelles des sacrilices étaient oITerts en leur honneur ; ainsi s’explique encore l’attention des vivants de placer sur la tombe d’un défunt les objets dont celui-ci se servait journellement Si on n’enterre plus son chien avec lui, du moins jetle-t-on encore dans sa tombe des espèces de coquillages appelés « âmes de chien ». Tout cela témoigne des croyances desanciens Lapons au sujet des morts, qu’ils tenaient encore pour repassant au bout d’un certain temps chez les vivants et s’incarnant dans le corps de leurs descendants. Mais, comme ils ne savaient jamais quand s'étaitopérée cette métempsychose, ils vcnéraientdes Seitar, des dieux des ancêtres, auxquels ils faisaient des sacrilices, etc.

Entre les Lapons et les divinités, quelles qu’elles fussent, des sorciers ou chamans, des Noid, constituaient les intermédiaires. Ces sorciers, non contents déjouer le rôle de prêtres, étaient encore devins et magiciens. Gonmie tels, ils ont été réputés de très bonne heure ; le Kalevala (innoisen témoigne. Il parle souvent avec effroi du redoutable [)ouvoir des sorciers lapons, « des magiciens puissants, des savants devins, des habiles ensoroeleurs qui chantent les runots de Laponie ». Essayant de détourner son fils de s'éloigner de sa demeure, une mère lui dit : « Ne pars point pour les régions de Pojola, pour les lieux où vivent les (ils des Lapons, avant d’avoir acquis la science (magique), avant d’avoirenrichi ton espritde connaissances. Le Lapon peut l’ensorceler ; il peut le précipiter, la bouche dans le charbon de forge, la tête dans l’argile, les coudes dans les tisons ardents, les poings dans la cendre brûlante, au milieu des pierres ennamiuées. » Et elle ajoute : « Tu ne saurais lutter en puissance magique avec les fils de Pojola, car… tu ignores les chants de Laponie. » Le même poème montre les sorciers lapons se dépouillant de tous leurs vêtements pendant les nuits d'été, afin de se soustraireaux influences magiques qu’ils pensaient y être attachées, et se dressant debout sur des pierres, a(in de donner plus de force à leurs opérations. Mais il ne parie pas des moyens dont ils se servaient parfois pour pratic|uer leur art, à moins que le Sampu convoité par eux ne soit, selon une hypothèse de G. de Duben, le tambour magique de