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MOÏSE ET JOSUÉ

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première bases d’une législation avant tout destinée à isoler le peuple de Dieu du contact avec l'étranger impur.

S' La conquête de Canaan

g04. — A. Les données du livre de Josué. — L’histoire delà conquête est surtout racontée dans le livre de Josuè. — a) Apres la mort de Moïse el sans que la date soîL autrement précisée, Yahweli invite Josué à passer le Jourdain : tout le pays que foulera la plante de ses pieds sera à lui ; sa fidélité à la Loi sera récompensée par une force irrésistible. Josué donne ses ordres au peuple ; il rappelle aux Transjordaniens qu’ils doivent, en vertu de leurs [)romesses elles-mêmes, prendre part à la conquête de Canaan {Jos., i). — b] Le jour venu, le peuple quitte Settim, passe

!e Jourdain, arrive à Galgula ; il va en faire son campement prolongé et le point de départ de ses entreprises

ultérieures. Le temps des migrations est désormais passé, on est en Canaan, Les Israélites se mettent en règle pour le rite de la circoncisioi., qui paraît avoir été négligé au désert. Us célèbrent la Pàque, mangent des fruits dupays et la manne cesse (/oj., iii-v). — c) Une terreur salutaire s’empare des rois de Canaan. La première conquête à réaliser est celle de Jéricho ; son occupation assurera la possession de l’oasis et de la plaine ; Israël ne sera pas exposé à être pris par derrière à mesure qu’il avancera dans la montagne. Aus : >i, même avant le passage du Jourdain, Josué s’est-il fait renseigner sur l'état de la place {/os., Il) ; il s’en empare maintenant et la voue à l’analhème le plus complet (Jos., vi). — d] La conquête de la Terre Promise s’opère ensuite en quatre actes : prise de Haï, qui assure l’entrée dans la montagne d’Ephraïm et qui semble aboutir à l’occupation de Sichem. où se fuit un renouvellement de l’alliance (Jos, vii-vm) ; l’alliance avec les Gabaonites, qui crée un point d’appui important î » peu de dislance au Nord de Jérusalem (Jos., ix) ; la défaite de la coalition des rois du Midi, qui permet ù Josué, tout en laissant Jérusalem aux mains des Jébuséens. de pousser vers le Sud jusqu'à Macéda. Libna, Lachis, Eglon, Hébron, Debir [Jos., x, 1-39' :  ; la défaite de la coalition des rois du Nord, ouvrant dans cette nouvelle direction la voie à la conquête (Jos., i, 1-15). — c) Des résumés donnent limpression d’une occupation complète, soit de la région du Sud depuis Cadès-Barné jusqu'à Gabaon (Jos., x, 4043), soit de la région du Nord et de tonte la terre promise depuis le negéb et Séir jusqu’au Liban et à 1 Hermon [Jos., XI, 16-23). Une sorte de tableau synoptique achève cette section ; c’est la liste des rois vaincus : Séhon et Og en Transjordane, trente et un roitelets en Canaan (Jos., xii).

SOS. — f) Puisque le pays est conquis, il semble qu’il n’y ait plus qu'à le partager entre les tribus (Jos., xiii, 6t>, 7). Néanmoins, avant de lui donner des ordres à ce sujet, Yahweh rappelle à Josué devenu vieux qu’il y a encore beaucoup de territoire à gagner (/os., xiii, 1-Ga). Le récit mentionne d’abord que la Transjordane a été répartie par Moïse entre Ruben, Cad et une moitié de Manassé (Jos., -Mil, 8-33). Le partage de Canaan se fait en deux fois. D’abord en faveur de Juda (et Galeb), puis de Joseph (Ephraïm et Manassé ; 70s., xiv-xvii). On rencontre alors un renseignement (/os., xviii, 1|, d’après lequel la tente de réunion est installée à Silo ; le peuple s’y réunit devant Yahweh. Sept tribus n’ont pas encore reçu l’indication de leur territoire. Josué envoie explorer le pays inoccupé et le fait distribuer en sept lots. On les tire au sort en faveur de Benjamin, Siméon, Zabulon, Issachar, Aser, Neplitbali, Dan ; Josué reçoit pour lui la ville de ThamnatSaraa (Jos., xviii-xix). L opération a pour complément la désignation des villes de refuge et des villes lévitiques (Jos., XX, xxi). Les récits du retour des Transjordaiiiens en leurs foyers, des derniers jours et de la mort de Josué remplissent la fin du livre (Jos, , xxii-xxiv).

806. — g) Une impression générale se dégéige de l’ensemble du volume et plus spécialement de la deuxième partie. C’est que l’on opère sur un terrain conquis, dont on dispose et que l’on distribue sans résistance. Mais, quand on y regarde de plus près, on saisit diverses réserves. D’abord celle de Jos.,

XIII, 1-6^, dont nous avons parlé. Celle encore de Jos.,

XIV, 6-15 et XV, iS-ig où l’on voit les Calébites conquérir ou achever de conquérir Hébron et Debir alors que, d’après Jos., x, Sô-Sg, ce serait Josué qui se

serait emparé de ces villes (cf. Jos., xi, 21, 22, où il chasse de ces villes les flls d’Enac). Ensuite : Jos.,

XV, 63, où les fils de Juda sont impuissants à chasser les Jébuséens de Jérusalem ; xvi, 10, où les Epbraïmites ne peuvent déloger les Cananéens de Gézer ; XVII, ii-13, où les iManassites éprouvent la même résistance dans le district des Trois-CoUines ; xvii, 1/J-18, où les « fils de Joseph », désignés par leur nom générique, ont à conquérir une partie du territoire qu’ils convoitent ; xix, ^7, où les Daniles, trop à l'étroit en leurs territoires, émigrent en partie vers le Nord. — li) Il est intéressant de rapprocher ces données de celles que fournit / « rf., i, en un récit que l’inscription du début reporte aux temps qui ont suivi la mort de Josué. Juda et Siméon ont à conquérir laborieusement le territoire qu’ils doivent occuper, sans même réussira s’emparer de la plaine (vers. 1-20) ; Benjamin (dans Jos., xv, 63, c'était Juda ; dans Jiid., i, 8, au contraire, Juda réussit en cette entreprise) est impuissant à chasser les Jébuséens de Jérusalem (Jud., i, ai). Désignée par un terme collectif (cf. Jus., xvii, ii-18), « la maison de Joseph » monte à la conquête de Béthel (vers. 22-26) ; cependant on répète, à propos de Manassé (vers. 27, 28, cf. Jos., XVII, ii-13) et d’Ephraïm (vers. 29 ; cf. Jos.,

XVI, 10), et à peu près dans les mêmes termes, ce qui en a été dit dans le livre de Josué. Zabulon, Aser, Neplithali sont à leur tour impuissants à chasser les Cananéens de leurs territoires (vers. 3033). D’autre part, les Danites sont refoulés dans la montagne par les.morrhcens ou mieux les Cananéens (vers. 34, 35) ; d’où, sans doute, l’exode dont parle Jos., xix, 4? et que raconte vraisemblablement Jad., xvir-xviii.

807. — B. 'J’Iiéories des critiques. — Il est évident que Josué nous présente un ensemble de fragments empruntés à des documents divers, que le rédacteur n’a pas pris soin de fusionner dans une parfaite unité. De cette juxtaposition des sources, les critiques tirent de graves conséquences. — a) D’après eux, nous sommes en présence de trois documents qui traitent exactement du même sujet — la première con((uête de la Palestine, — mais présentent les événements sous des jours très différents. — h) Le principal de ces documents est le Deulérononiiste (D"^) ; il a englobé l'£loliiste, dont quelques fragments seulement ont été insérés après coup sous leur forme primitive. D’ai>rès D'-, qui a fourni la trame principale des récits de Jos., i-xii, la conquête a clé l'œuvre des tribus réunies en un seul groupe, sous la conduite de Josué. Non seulement Juda y a pris part ; mais, malgré qu’ils eussent déjà acquis leur territoire, Kuben, Gad et le Manassé oriental s’y sont associés. Cette conquête a été rapide, réalisée en une série de quatre campagnes qui ont assuré aux vainqueurs la possession immédiate de tout le pays convoité. Cette idée était déjà celle de E (cf. 200, /') ; elle a été adoptée, développée par D- et les rédacteurs de la même école, qui l’ont encore accentuée. — c) De son côté, le récit sacerdotal, auquel on doit la trame de Jos., xiii-xxi, est tout entier à cette conception et renchérit encore sur ceux qui l’ont précédé. La conquête est si complète qu’on peut entièrement disposer du pays, le diviser en autant de parts qu’il y a de tribus et tirer ces parts au sort. — à) Mais toutes ces constructions sont purement chimériques et c’est à un autre document qu’il faut prêter attention, au Yahtviste, dont quelques fragments ont été dispersés dans Jos., xin-xix, puis groupés avec quelques autres dans Jud., 1. Dans ce document, loin de s’accomplir en une série de victoires éclatantes et décisives, la conquête apparaît surtout comme une œuvre de pénétration progressive ;