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MARIE.

IMMACULEE CONCEPTION

232 La même réponse s’applique aux Pères postéphésiens et aux Pères plus anciens ; ou plutôt, la doctrine des Pères postépbésiens éclaire la pensée de leurs devanciers : il s’agit, non pas d’une purification absolue ni d’une sanctification première, mais d’une purification et d’une sanctification relatives, c’est-à-dire portées à un degré supérieur, en vue de la conception virginale du Verbe incarné. Saint Soi’HRONE s’explique dans un texte déjà signalé, quand il commente ainsi le Spiritus sanctus superteniet in te : « Sur vous, l’Immaculée, le Saint-Esprit descendra, pour vous faire briller d’une pureté plus ^(raîide, yaOy.poincr/.-^ ai -Koir^z^^iiz-^vj^ et vous rendre cajiable de produire votre fruit ï, Orat., ii. In Anniint., /|3, ¥. G., LXXXVIl, ’i^-j’i ; de le produire

« en dehors de tout rapport et de tout plaisir charnel, 

r, èovr, i éy.roi yy./j Ln ?, z yc/.t ffjyCàTSW ; , » Ibid., Sq,

col. 8269. Même explication, plus nette encore, dans le commentaire d’ANTiPATER de Bostra (vers 460) :

« Pourquoi cette descente du Saint-Esprit ? Parce

que, toute sainte que vous soyez, vous devez devenir plus sainte encore, afin de pouvoir engendrer le Saint, i~£iôf^ f/ytv. /iiv ùnv.pyîu’Ssî Si fji /jz^Ov.t c/yifjjnpv.j, l’jt. t-iv i/’/m uiiXidCr-ii.)) lu ss. lieiparæ Annunt., 8, P. G., LXXXV, 1781 ; cf. IUli.erini, Srlloge monuuicntorum, t. II, p. 460. Au x » siècle, Jean le Gko-MKTBB reprend l’explication, quand il nous montre le Saint-Esprit descendant sur Marie pour purifier préalablement la couche oii le Fils de Dieu doit reposer, « ou plutôt pour embellir encore plus cette couche déjà purifiée et ornée, fià/J-yj Si y.xi

TÏC5JX « >/W7Ti’^&y, £t Ky.’t TTpOxl^.dOy.pTOCt xy.i’np0xiy.V.J/0jVt7TXI, »

iiermo in Annunt. Deip., 16, P. G., CVI, 825.

Saint Jean Damascène s’est inspiré, suivant son habitude, de saint Grégoire de Nazianze, Or., xxxviii, In Theophania, 13, P. G., XXXVI, SaS ; cf. Or., XLv, In sanctum Pascha, g, Ibid., 633. Ce dernier parle d’une purification de l’àuie et du corps de la Vierge au jour de l’Annonciation ; les deux termes, emplojés par le disciple, dans la première homélie In Dormitionem, l/.àitr, pi ii /.a. r/iVzjs, semblent répondre à cette double purification, le premier à celle du corps, le second à celle de l’àme. Que dans ce dernier cas, il ne soit pas question d’une sanclitication première, qui ferait disparaître en Marie la souillure héréditaire jus<]u’aIors existante, ou d’une rémission de péchés quelconques, tout l’enseignement du saint docteur, exposé plus haut, le proclame. La pureté absolue de la bienheureuse Vierge est de beaucoup antérieure au jour de l’Annonciation pour celui qui salue en elle dès son apparition dans le monde « une enfant toute sainte, une DUe digne de Dieu », qui la proclame, alors qu’elle est encore dans les bras de sa mère, a terrible aux puissances infernales », et qui la dit « gardée dans la chambre nuptiale de l’Esprit-Saint et conservée sans tache, pour être l’épouse de Dieu et devenir sa mère ». Iloni., i. In Nativ.. 7, P. G., XGVI, 672. Ce qu’il faut entendre par l’autre purification, celle qui concerne le corps, ou peut facilement le comprendre par le rapprochement des divers textes. Il fallait que Marie, destinée à devenir le temple de la divinité, reçût la force d’engendrer l’Homme-Dieu, et qu’en même temps elle gardât dans toute son intégrité sa pureté virginale. Dans les conceptions ordinaires, l’homme a son rôle et la concupiscence charnelle aie sien ; rien de seml >Iable ne devait exister dans la conception de l’IIommeDieu. Marie devait donc recevoir de l’Esprit-Saint une vertu supérieure, et cette -vertu fortifiante devait être aussi purifiante, dans l’acception jibis relevée du mot.

Parfois un sens spécial s’attache à l’action purificatrice du Saint-Esprit au jour de l’Annonciation.

Ainsi Jacques, évêque syro-chaldéen(monophysite) de Sario ou Batna en Mésopotamie (-j- 52 1), nous montre ce divin Esprit sanctifiant la Mère de Dieu et la rendant pure et bénie, comme l’était Eve avant son entretien avec le serpent : Sanctificavil eamque puram effecit mundam et benedictam, sicut erat ipsu llea antequam eam serpens esset allocutus. Carmen de B. V. Maria primum, dans J. B. Abbeloos, De iila et scriplis S. Jacobi, Batnarum Sarugi in Mesopotamia episcopi, p. i^i, Louvain, 1867. D’après le contexte, cette pureté privilégiée de la seconde Eve, devenant Mère du Verbe incarne, comprend deux choses distinctes : d’abord la filiation adoptive dont notre premier père avait été gratifié, adoptionem filioruin qitæ patri nostro Adamo fueral concessa, Mariæ per Spiritum sanctum tribuit, cum esset in ea Italiitaturus, Ihid., p. a43 ; puis la conception et l’enfantement sans concupiscence, sans corruption et sans douleur. Cette dernière assertion est facile à comprendre, mais la première est équivoque. Elle peut signifier la liliation adoptive, telle qu’Adam l’avait reçue, avec les prérogatives de l’état de justice originelle ; ou bien, la liliation adoptive entendue en sa simple notion, et dans ce cas nous rencontrerions chez l’évêque syrien l’opinion partagée plus tard par des théologiens catholiques, suivant laquelle la filiation adoptive serait un don du Saint-Esprit distinct du simple état de sainteté intérieure. Cette sainteté intérieure, Jacques de Sarug la suppose manifestement en Marie, car nul n’a plus énergiquement alUrmé l’absolue pureté comme condition préalable de la maternité divine : « Si une seule tache, si un défaut quelconque avait jamais terni l’àme de la Vierge, sans nul doute le Fils de Dieu se fût clioisi une autre mère, exemple de toute souillure. Ibid., p. 223. Et c’est au niêine évêque que la liturgie syriaque doit cette acclamation, rappelée dans la bulle Ineffabilis. « Soyez en paix, ô^ sainteté restée toujours intacte, justitia nunquam læsa ; salut, ô nouvelle Eve qui avez enfanté l’Emmanuel, n Officium feriale juxta ritum ecclesiae Syrorum, p. 292, Home, 1853.

Il est une autre objection qui tend à dénier toute valeur dans la question présente aux téuioignages allégués des Pères grecs, pour la raison déjà signalée dans les attaques contre la bulle de définition, col. 218 : « A l’époque de saint Jean Damascène, l’Eglise grecque ignorait encore le dogme de la faute héréditaire. Elle ne pouvait donc pas songer à exempter la Sainte Vierge d’une loi qui lui était inconnue. 1) Le pourquoi de cette ignorance, c’est qu’en Orient, « au vu’et au viii* siècle, la doctrine de la chute avait encore conservé sa forme primitive 11, entendez celle où la chute se réduit à une pure déchéance du genre humain. — A supposer cette assertion exacte, le problème qu’on prétend supprimer d’un trait de plume ne serait, en réalité, nullement supprimé. Les Pères grecs parlent d’une déchéance qui n’est pas simplement physique, mais qui est aussi morale. Cette déchéance morale, ils la. caractérisent en termes assez nets pour qu’on puisse faire théologiquemenl l’équivalence entre les elTetsqu’ils assignent et ceux dont les Pères du concile de’Trente se sont servis pour décrire le péché originel. Cela étant, si les Pères grecs écartent de la Mère de Dieu les éléments de la déchéance commune, ils ne font qu’exprimer ou supposer à leur manière ce que l’Eglise romaine entend par l’exemption du péché originel ou l’Immaculée Conception.

D’ailleurs, prise en elle-même, l’assertion n’est pas moins inexacte qu’elle est audacieuse. Voir péché ORiGi.NEL. Parmi les tliéologiens catholiques, les uns conçoivent la faute héréditaire comme un péché