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MARIE. — IMMACULEE CONCEPTION

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ratlacbaieiil au même ortlie d’idées fuient modifiées et adoucies ; en i)ailicu ! ier, il n’est plus question, § Et re qiiidem vent, de doctrine constante Je rjEfj’lise, mais seulement de doctrine qui a lou jours existé dans l’Eglise comme reçue des ancêtres, in ipsa Ecclcsiu semper e.rstitisse veluti a mujorilius acception. Ce qui perniel de conclure qu’en définissant l’Immaculée Conception comme doctrine révélée et, à ce titre, contenue dans la sainte Ecriture ou la Tradition, Pie IX n’a rien défini sur le mode, explicite ou seulement implicite, soit de la contenance de cette doctrine dans les sources de la révélation, soit de la profession ou croyance de cette même doctrine dans les premiers siècles du cliristianis : ne.

B. Attaque du dogme diIiini pau Pik IX. — Prise dans ses grandes lignes, l’attaque se présente sous une double forme, SHi^ ant qu’elle s’en prend à la doctrine elle-même, ou plus particulièrement à la bulle InefjahUis Deus, en tant que celle-ci propose la doctrine comme dogme de foi et [n étend en trouver les fondements dans les sources de la révélation.

1. Attaque de la doctrine. — Sur ce terrain, les adversaires de maintenant ne font guère qu’exploiter l’ancien fonds de diflicultés accumulées jadis par les adversaires d’avant la définition. Tous invoquent la sainte Ecriture, en raisonnant à peu près comme Melchior Cano, De locis tkeologicis, 1. Vil, c. i, concl. II. On ne trouve aucun texte qui, pris dans le sens naturel et littéral, établisse clairement l’Immaculée Conception ; au contraire, rien de plus jjrécis que les textes proclamant tous les hommes pécheurs, soit en général, soit en particulier, eu égard à leur naissance : « Tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu i>, Rom., iii, 23 ; cf. Gal., iii, 22 ;

« Ue même que par la désobéissance d’un seul tous

ont été constitués pécheurs, de même par l’obéissance d’un seul tovis sont constitués justes », Rom.. V, 19 ; « Je suis né dans l’iniquité, et ma mère m’a conçu dans le ])éché », Ps., l, 7. Kien de plus précis que les textes établissant une stricte corrélation’entre la mort et le péché, entre la mort de Jésus-Christ pour tous et la mort (spirituelle) de tous : « La mort a passé dans tous les hommes, parce que tous ont péché, if ù r.d-jrti y.u.v.pn-j 1, Rom., v, 19 ; « Si un seul est mort pour tous, tous donc sont morts », Il Cor., V, 14 ; or la Vierge est morte, comme les autres. Kien de plus précis que les textes ailirmant l’universelle et absolue nécessité de la régénération spirituelle et de la rédemption en.lésus-Christ : « Nul, s’il ne renaît de l’eau et de l’Esprit, ne peut entrer dans le rojaume de Dieu ». Joaii., ui, 5 ; « Un seul médiateur entre Dieu et les hommes, le Christ Jésus fait homme, qui s’est donné lui-même en rançon pour tous », 1 Tii)i., 11, 6. Marie n’est jamais excejv tée ; elle-même, d’ailleurs, se donne pour rachetée, quand elle salue en Dieu son Sauteur, Luc. 1, 4" ; or, comment comprendre qu’elle ait été vraiment rachetée, si elle n’est pas tombée dans la servitude du péché ? Dans ce cas là, ne serait elle pas plus tôt, comme l’objecte Métropuanb Critopoulos, rédemptrice, et l’incarnation du Verbe ne deviendrait-elle pas inutile ?

La doctrine de l’Immaculée Conception n’est i)os moins contraire à l’antique Tradition, a Jusqu’au xu « siècle, nous voyons l’Eglise en possession paisible de la foi à l’universalité du péché originel ; aucun Père, aucun écrivain ecclésiastique ne songe à soustraire la Vierge Marie à cette loi, en lui attribuant la prérogative d’une conception sainte ; ce qui ne doit pas surprendre, si l’on considère qu’une telle prérogative, en même temps qu’elle tendait à elfacer

la difl’érence spécifique du Sauveur’avec le reste des hommes, était essentiellement incompatible avec l’idée qu’on se faisait de la transmission héréditaire du i)échc d’Adam. Il était, en cfTct, universellement admis, que cette transmission s’ex])lique par la concupiscence qui préside à la génération, que la corruption est inséparablement attachée à la conception faite parles voies ordinaires, ([ue le péché ne saurait manquer là où la convoitise sexuelle a été indubitablement présente ; que, par conséquent, pour être immaculée, une conception doit nécessairement exclure runioncharnelledi^l’hommcet de la femme, s (Jrand Dictionnaire du xix".s(èf/e, art. Conception. hes textes apportés à l’appui de cette assertion sont presque tous empruntés à saint Ambroise, saint Augustin ou des écrivains de filiation auguslinienne.

De leur côté, les Pères grecs, interprétant les juiroîes de l’ange : «.’<piritus sanctus suiien-eniet in le ii, Luc, 1, 35, enseignent qu’à ce moment-là, Marie fut purifiée dans son âme et dans son corps ; c’est donc qu’auparavant elle était soumise à la loi du péché, au moins [)ar sa naissance Dans cette hypothèse, Marie n’aurait été délivrée du vice héréditaire qu’au jour de l’Annonciation ; et telle est, en cd’et, la position que tiennent, à la suite de Mbtuoi’Uanu CRrropoiLos etdeSÉDASTE IvYMiiNiTÈs, la plupart des théologiens modernes, grecs ou russes, de lEglise orthodoxe ; quelques-uns, comme LuniiUKV, estiment même que la Vierge n’a été complètement délivrée qu’au pied de la Croix. Ce qui n’empêche pas ces théologiens de tenir en même temps que Marie fut sanctifiée dès le sein de sa mère, et qu’elle n’a été, à proprement parler, ni enfant de colère ni esclave du démon. Inconciliables dans l’Eglise romaine, étant donnée sa doctrine sur lepéclié originel et ses effets, ces assertions ne le sont pas dans l’Eglise orthodoxe ; car, pour ses théologiens, le péché originel, considéré dans les descendants d’Adam, n’est rien autre chose que la concupiscence, ou la privalion de l’intégrité et de l’immortalité, auxquelles Adam seul a renoncé. Que la Vierge ait été, comme saint Paul, en butte aux mouvements de la concupiscence, c’est une eonsécpience de sa descendance adamique et c’est une condition nécessaire pour qu’elle pùl agir d’une façon libre et méritoire.

a. Attaque de ladé/inition et de la huile Ine/fabilis Deus. — Le grand scandale, c’est que Pie IX ail osé proposer l’Immaculée Conception comme dogme de foi et vérité divinement révélée. Les uns, comme M. H.*.RNACK, ripostent par cette interrogation : Si cette vérité a été révélée, quand donc et à qui ? Wann ? Wem ? Lelirbuch der Dogmenf ; eschichte^, Tiibingen 1910, t. III, p. 71Î7, note t. D’autres, jansénistes, gallicans ou vieux-eatholiques, s’emparent du vieil axiome, formulé par Vincent de Lérins : Quod ab omnibus, quod ubique, quod semper, et en tirent cette conclusion : Ne peut être imposé comme dogme de loi, que ce qui a été cru par tous, partout et toujours ; puis ils énumèrent soigneusement tous les adversaires de la pieuse croyance au cours des siècles chrétiens. De là cette accusation d’innovation doctrinale, dont le patriarche Antuime de Conslantinople s’est fait l’écho, dans sa Lettre encyclique patriarcale et synodale, de 1896, n. 13 :

« i/Egliso des sept Conciles œcuméniques, une, 

sainte, catholique et apostolique, a pour dogme que l’incarnation surnaturelle de l’unique Fils et Verbe de Dieu par le Saint-Esprit et la Vierge Marie est la seule qui soit pure et immaculée. Mais l’Eglise papale a encore innové, il y a quarante ans à peine, en établissant, au sujet de la conception immaculée de la Vierge Marie, la Slère de Dieu, un dogme nouveau, fini était inconnu dans l’ancienne Eglise, et qui avait