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LOI DIVINE

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Ce principe J’aclion ou cette opinion a-t-elle cliance de l’empoiter clans l’avenir’.' Si oui, qu’il lui prête les mains..Si non, qu’il s’y oppose. Mais évidemment, l’art moral rationnel doit renoncer à la cliimère d’un bien absolu. Il ne peut que constater l’état présent de biens particuliers. »

lié/ulation. — u On serait presque tenté de savoir gré à M. Albert Bayel de sa Iranchise, si l’on ne savait que, de nos jours, les doctrines les plus anarclii ques risquent de faire des recrues et de passer dans les faits ou dans les lois. Il y a trois ans, M. A. Bayct avait donné les lignes de son programme révolutionnaire, dans son livre : La murale scientifique. Aujourd’hui il pousse son attaque contre la morale traditionnelle. Mieux vaudrait dire qu’il s’en prend à toute idée morale. La stalistique remplace la morale. Le praticien suppute le nond)re des faits humains qui se produisent, et, selon le caractère dominant soit d’aujourd’hui, soit de demain, il prononce que ceci est bien, que cela est mal. il favorise ou réprime.

« Voilà bien la hrutulité du suft’rage universel. Que

disons-nous : brutalité ? L’homme descend au-dessous de la brute. Au moins celle-ci a-t-elle l’instinct de la conservation individuelle et le souci de l’espèce. Le praticien, art nouveau, ignore si cela est viable, partant si cela est un bien. C’est le triomphe du nombre, de ce qui s’additionne quantitativement. Si la multitude des écus va dans les colïres de tel accapareur, respect au linancier ; c’est le bien ! Honte aux gens simples qui se sont laissé dépouiller de leur argent : là est le mal. Juslilicalion cynique de la force.

« C’est en ces débauches de négations que tombent

ceux qui renient et l’antique morale et le spiritualisme traditionnel, qui excluent de l’homme ce qui fait l’homme, sa raison, sa liberté, sa vie spirituelle et immortelle. »

Voir encore D J. Grasset, La morale scientifique et la morale de l Evangile, devant la sociologie. Etudes, t. CXVII, p. 433-454. 20 nov. 1908.

11° SySTÈMKS de morale qui SB RATTACHENT AU SUBJECTIVISME DE IvANT.

Ces systèmes sont nombreux ; outre le système de Kant lui-mèmo, qui admet l’existence de l’absolu et, pour parler avec lui, du nouméne objet de la raison, nous signalerons le Criticisme de Renoivieb, qui ne s’appuie que sur les phénomènes contingents, et l’immoralisme de Nietzsche, lointaineet suprêmeperversion du subjectivisme kantien.

1° Morale kantienne. — Kant, de Kœnigsberg, 17241800.

Exposé. La raison spéculative et la raison pratique sont des facultés distinctes : l’une trace les règles qui dirigent l’esprit dans le domaine de la science, elle est incapable de produire la certitude ; l’autre intime les préceptes que la volonté doit suivre pour atteindre sa lin. Or il y a deux espèces de commandements que la raison pratique peut faire : les uns sous condition : ce sont des impératifs hypothétiques ; tels sont tous les commandements intéressés, qui reviennent à dire : « Si tu veux atteindre telle liii, prends tel moyen » ; les autres sans condition : ce sont des impératifs catégoriques ; tel est le devoir, car il s’impose non comme un moyen, mais comme une un en soi, ([ui a une valeur absolue. U n’y a qu’une chose qui ait ainsi une valeur absolue, c’est la bonne volonté, qui, étant libre, ne doit rien qu’à elle-même, et étant raisonnable, se trouve d’accord avec toutes les volontés raisonnables et libres comme elle. C’est donc la volonté libre et raisonnable qui est l’objet de la loi morale. « Tu dois vouloir être libre et raisonnable », voilà la loi. La liberté

se propose donc comme fin à la liberté. C’est ce qui fait Vauliinomie de la loi. Delà découle cette formule de la loi morale ; u Agis de telle sorte ijue lu traites toujours la volonté libre et raisonnable, c’est-à-dire l’humanité, en toi et en autrui, comme une fin et non comme un moyen. » Ou cette autre : « Agis de telle sorte que la raison de ton action puisse être érigée en une loi universelle. »

lit’/utatiun. Nous avons exposé très sommairement la morale de Kant, sur laquelle on trouvera des données beaucoup plus précises à l’article CriticisME KANTIEN. Nous nous contcntcrons donc de montrer ici la fausseté des principales assertions dans lesquelles Kant s’est mis en contradiction avec la morale traditionnelle des philosophes catholiques.

Kant admet que la raison théorique ne peut donner la certitude et que la raison pratique la donne. On ne voit pas de fondement plausible à cette dirtérence : si la raison pratique nous donne la certitude des principes de la morale, la raison théorique doit nous donner aussi la certitude des principes spéculatifs ; par conséquent, elle démontre les vérités qui regardent les fondements de la morale et dont Kant fait des postulats.

Kant fait du principe de la loi morale une forme purement subjective de l’entendement ; lalois’aflirme, selon lui, indépendamment de toute connaissance expérimentale et de toute notion spéculative. Or on ne voit pas qu’une forme purement subjective de l’entendement, si impérativement qu’elle s’affirme, puisse donner la certitude que la morale oblige ; car la question n’est pas de savoir si le devoir s’aflirme, mais s’il s’afTirme légitimement et s’il est fondé en raison.

Toutes les preuves par lesquelles nous avons démontré comment nous connaissons la loi morale, et quel en est le fondement, réfutent la théorie de Kant, et enfin une partie des difficultés que nous avons opposées aux partisans delà morale indépendante, peuvent être faites à Kant.

2° Morale criticisle de Renouvieh (Français, 18151goS).

Nous emprunterons l’exposé de ce système et sa réfutation à L. Roure, Doctrines et problèmes, Impartie, ch. IV, p. 124-152, Paris, Retaux, 1900.

« … L’ordre moral ou la loi morale ne se comprennent

pas sans la liberté, sans l’immortalité de l’âme, sans l’existence de la divinité. Liberté, immortalité, existence de Dieu, autant de postulats de l’ordre moral. Gomme chez Kant. la raison pratique va relever ce que la raison théorique a mis à terre.

i) a Le premier postulat est facile à saisir. « Si la loi morale nous oblige et si nous tenons que nous sommes obligés, nous devons nous estimer libres de nous conformer ou non à cette loi de nos actes »… Cette liberté, rétablie comme postulat, n’est évidem’ment, comme l’ordre moral tout entier, que probable et conjecturale. Mais cette liberté qui nous est rendue, est-ce la réalité de la liberté, ou en est-ce seulement la persuasion subjective ? M. Renouvier répond nettement : « Le postulat de la liberté comme réelle… n’est i)as réclamé pour l’existence de la morale. .. Ce qui est indispensable à la morale… c’est le fait de la liberté apparente et crue pratiquement… La moralité étant essentiellement subjective ou du ressort delà conscience dansrhomme…, ilne faut pas s’étonner si la liberté f|u’elle implique est de la même nature. » (Science de la morale, I, p. 7-9). Je me crois liljre, cela suffit à la morale.

2) (I La doctrine sur l’immortalité ne présente guère plus de précision et d’assurance. On rappelle d’abord que l’harmonie entre le bonheur et la vertu n’est pas réalisée ici-bas ; d’où nécessité, ou mieux