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1867

LIEUX SAINTS (AUTHENTICITE DES)

1868

aucune jusqu’à Constantin. Reste à recUercher si les lieux consacrés alors étaient vraiment le Calvaire et le Sépulcre de l’Evangile.

La première négation semble remonter à Jonas KoRTE, dans sa Beise niicli dent ^elohten l.ande, publiée à Altona en l’jii (pp. 158 à 17^, et Suppl., pp. 1 1 à 32). Le Golgotlia actuel étant à l’intérieur delà ville, il concluait à son inaullienticité. Il n’y a eu depuis que deux essais pour substituer positivement au site traditionnel une localisation nouvelle. James Fbugusson (An essa on the ancient topogrtiphy of Jérusalem, Londres, 1847, — The Iloly Septilfhre nnd tlie Temple nt Jérusalem, Londres, 1865), raisonnant uniquement d’après les données architecturales, prétendit identifier la Basilique de Constantin avec la mosquée d’Omar ; sur le plan inséré dans son Essay, il localise le Gol^^otlia au S. de la Porte Dorée, tout contre le mur E. du Haram, Cette o[)inion, par trop aberrante, trouva peu de crédit ; on ne peut guère en citer qu’un autre partisan sérieux : F. V. Unger (Die Baulen Constanlins des Gros%en am kg. Grabe zii Jérusalem, floellingen, 1863). Warren s’est cependant donné la peine de la réfuter en soixante-trois points, dans : Tlie Temple or the Tomh, Londres, 1880.

Plus heureuse a été l’hypothèse qui situe le Golgotha et le Sépulcre au N. de la ville, entre la Porte de Damas et la Grotte de Jérémie, où un escarpement rocheux, percé de plusieurs cavités, dessine de fait assez bien un crâne. Proposée déjà parTuB-Nius en 1842, puifi en 1882 par le Général Gordon lors d’un voyage à Jérusalem, elle a rencontré, spécialement en Angleterre, d’assez nombreux adhérents. On trouvera leurs arguments exposés avec chaleur et conviction, comme « le résultat de dix années d’étude », par Conder : Ilandhook to the Bible, Londres, 185g, pp. 356 sq ; cf. l’EF, 1883, pp. 69-78.

Moins hardis, bon nombre d’auteurs ne proposent aucune localisation, mais déclarent simplement la question insoluble. Roiunson (Hihlical researches, t. 1, sect. VIII, p. 4’7), niant l’aulhenticité du Calvaire et du Sépulcre traditionnels, ajoute : « Si l’on me demande où chercher l’emplacement véritable du Golgotha et du Sépulcre, je dois répondre que prob.iblement toute recherche sera vaine. » Aussi découragée est la conclusion de G. A. Smith (Jérusalem, Londres, 1907, t. I, pp. 2^8-249). AVilson (Golgotha and the Hoir Sepiilclire, Londres, 1906. p. 120) cite, en la faisant sienne, la ]>hrase de Robinson. LoisY (/.es Synoptif/ues, t. II, p. 663) reproduit une déclaration de Rknan : « Il n’y a pas de raison décisive pour i)lacer le Golgotha à l’endroit précis où depuis Constantin la chrétienté tout entière Ta vénéré ; mais il n’j' a pas non plus d’objection capitale qui oblige de troubler à cet égard les souvenirs chrétiens. » (Vie de Jésus’^, 1867, cli. xxv, p. f{^).)

Est-il critiquement i)ossible de sortir de cet agnosticisme ? Avant de le tenter, une question ju’éalable se pose : le Saint Sépulcre actuel était-il au temps de J. C. à l’intérieur ou à l’extérieur de la ville ? S’il était à l’intérieur, la question est tranchée contre l’authenticité du site traditionnel. — Ici s’insérerait la longue et délicate discussion du tracé du Second Mur, qui, au temps de N. S., protégeait toute la partieN. et N. O. de la ille. Nous nous contenterons de renvoyer à un excellent article du P. II. Vinchnt : La deuxième enceinte de Jérusalem, Hli, 1902, pp. 81-57.’^'^ détinilive, la non-inclusion du Calvaire et du Sépulcre actuels peut être considérée, du sinqite point de viu^ archéologique, comme très l)robabIe, surtout depuis les fouilles exécutées à plusieurs reprises en ces trente dernières années, à l’E. de

l’église du Saint-Sépulcre. (Voir pour le détail : P. P. H. Vincent, et F. M. Abel : Jérusalem, t. II, fasc. 1-2, ch. Il et iit, pp. /|0-88 ; — i>k Vogiik, Le Temple de Jérusalem, Paris, 1864, pp. 119-120 ; — Clermont-Ganneau, Archæological researches in Palestine, Londres, 1899, t. I, pp. 85-ioo ; — SciiicK, The second »’all of Jérusalem, l’EF, 1898, pp. igi-ig3 ; 1888, pp. 67-68 ; — GuTHE et ScHicK, Die zieite Mauer Jerusalems und die Baulen Constantins am hl. Grabe, y.DI’V, VIII, 1885, spéc. pp. 266-278. — Sur le confirmo / » /- tiré de l’authenticité du tombeau dit de Joseph d’Arimathie, cf. de Vogiié, Le Temple de Jér., Append., p. 115 ; Clermont-Ganneau, ^rc/i. /^es., I, p. 101.)

Nous pouvons donc passer outre aux dillicultés archéologiques et examiner historiquement la valeur de la tradition constantinienne et préconstantinienne.

Plusieurs auteurs nous ont raconté la découverte du Golgotha et du Sépulcre, et nous ont décrit les travaux exécutés par Constantin. Voici ceux de ces récils qui peuvent offrir un intérêt au point de vue de la discussion historique : vers 838, EusÈiiR, Vita Constant., 111, xxv-xl, A’.' »’., XX, io85 sq ; De laudib. Cnuslant., ix, F. G., XX, 18O9C ; — v. 450, Socrate, //. Eccl.. l.xvii, P. G., LXVll, 117 ; — après 450, Sozo-MÈNE, IL. Eccl., II, I. II. XXVI, P. G., LXVII, 929 sq. 1008 ; — V. /|50, Thkodoret, //..Fcc ?., I, xv-xvii, P. G., LXXXII, 9.56 sq ; — auvi’" siècle, Alexandre le Moine, De Inveniione.S". Crucis, P. G., LXXXVIl, 4037, 404.5, 4061 sq ; — V. 61 5-620, SoiMiuoNK i)E, lKnusALEM, Ana-- reo « /Hrt, xx, 7-54, /’.fi., LXXXVII, 8817 sq ; — en 818, TuiiopiiANE, Chronographie, ann. 816-817, Z-". 1 GVIII, io4-io5, 109-112 ; — V. 865, Georges IIamartolos, Chronicon, lV, 183, P. G., CX, 620-621 ; — V. 1380, NiCKPHORE Calliste, //. EccL, VIII, XXVlII-XXX. L,

p. G., CXLVI, io5-112, 200 ; — en 402, Rm’iN, U.Eccl., I, vii-viit, P. L, XXI, 475 sq ; — v. 403, Paulin de NoLE, Ep. XXXI, 3-6, P. /,., LXI, 826 sq ; — v. 576, Grégoire de Tours, llist. Franc, I, xxxiv, P. L., LXXI, 179.

Ainsi qu’il fallait s’y attendre, à mesure que l’on descend dans l’ordre des dates, le récit s’enrichit de traits nouveaux. Comme généralement nous en ignorons la source, il est malaisé de faire le départ de l’histoire et de la légende. Si l’on veut voir jusqu’à quel luxe d’inventions et d’invraisemblances peut aller celle-ci, on pourra lire les deux récits que renferment les Actes apocryphes de saint Judas Quiria-CH

« , évêque de Jérusalem (, 4r7rt.S’.S., Mai, 1. 1, pp. 445448) et la Doctrine d’.tddai (Ed. G. Piiillii-s, Londres, 

1876, texte syriaque, fol. 7 b-ii a, trad., pj). 10-16) ; cf. L. J. TixERoNT : Les origines de l’Eglise d’Edesse et la légende d’Abgar, Paris, 1888, pp. 161-191, et J. Straubinger : Die Kreuzauffindungslegende, Paderborn, 1912.

Ce n’est pas ici le lieu de comparer ces récits enireeux quant aux détails, d’examiner par exemple pourquoi Eusèbe, le i)lns ancien de tous, ne met pas en scène sainte Hélène, ni ne parle de l’invention de la Croix. Ce que nous demanderons à ces auteurs, c’est la réponse à une question qui pour nous est capitale : quelle raison a porté Constantin à fouiller en ce lieu plutôt qu’en un autre ? Les recherches se guidaient-elles, oui ou non, d’après une tradition préexistanle ? Or tous les récits sont unanimes à répondre : on savait que là étaient le (Calvaire cl le Sr|)ulcre, parce qu’ils y avaient clé intintionnellement enfouis sous une masse considérable de terre ra]>[iortée.

Quand, [lar qui et pourquoi avait été pratiqué cet enfouissement ? Les travaux avaient eu pour but immédiat l’établissement d’un sanctuaire de Vénus ;