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LIEUX SAINTS (AUTHENTICITÉ DES)

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ouvrages sont indirectement une aide i)i’ccieiise pour la question des Lieux Saints. Wallieureusemeiit la valeur des renseignements qu il fournit est très inégale, et à vouloir le suivre trop exclusivement, on se heurte à des impossibilités et à des invraisemblances. Exact, semble-t-il, quand il utilise des documents, il contredit parfois entièrement ces premières données quand il veut ajouter de mémoire des descriptions et des mesures, (Cf. P. Aucler, Le Temple de Jérusalem au temps Je J. C, H. [ !., 18g8, pp.19 ; -200.)

Xous n’avons pas à apprécier la valeur historique et critique d’ErsKDiî et de saint Jkhômiî. Ce qu’Euscbe nous fournit de plus précieux, c’est le récit complet de la découverte des Lieux Saints sous Constantin, l’événement sans contredit le plus important de toute l’histoire qui nous occupe.

Estimer à sa juste valeur le témoignng-e des pèlerins est chose beaucoup plus dillicile. Le seul princi [)ç évident est que, d’une manière générale, cette valeur croit en raison directe de leur anti(iuilé. Or une quinzaine des Itinéraires connus sont antérieurs aux Croisades, et le plus ancien, celui du PKLi ; ni. ne lîouDK.xux, remonte à 333. Mais il faudrait parfois tenir compte aussi d’autres données, qui souvent nous échappent. Un voyasjeur ne raconte pas toujours et uniquement ce qu’il a vu : il rapporte parfois sans examen les indications de ses j^^uides. C’est ainsi, nous le savons positivement, ([ue les traditions locales, les traditions juives spécialement, ont inllué sur certains pèlerins. Jacquhs dk Viîroxf, en 1335, écrit : a Si aliquis peregrinus vellet inquirere civitates et castra antiqua in Terra sancla, nonpossetinvenire iinum lnisi|per aliquem bonum ductorem cognoscenteni terras, velperaliquemJvideunihabilantem in iilis partibus, cum Judei sciant optime omnia loca antiqua demonstracione… Et ideo quum volui inquirere loca ultramarina, fréquenter et sepissime interrojjavi a.Judeis ibidem habitantibus, et bonum ductorem habui. » (Re^’ue de l’Orient Latin, 1895, p. 224.) Et ces racontars de eiceroni embarrassent souvent de détails fabuleux ou puérils un récit, où il devient dès lors diflicile de discerner l’information personnelle et le témoignage oculaire.

Parfois aussi les pèlerins copient leurs devanciers. Ainsi, deux d’entre eux, Bkunard de Brrydenbacu (1486) etMARiNo Saxuto (1321), semblentà première lecture avoir une vraie valeur objective et critique ; à y regarder de plus près, tous les passages les plus typiques, sur Nazareth, les sanctuaires-grottes, le Saint-Sépulcre, le Calvaire, Gethsémani, sont transcrits, souvent mot à mot, du récit de leir prédécesseur Bi-rohard du Mont Siox (i 283). Ce n’est pas à dire que les pèlerins manquent totalement de sens historique et critique (cf. des exemples dans : Ant. Bai : mstark, Abendlændische Palæslinapilger des ersten Jahrtausends, Cologne, 190^, pp. 74-77) ; mais il faudra toujours examiner, discuter, surtout comparer.

Si nous considérons toute la suite de nos traditions historiques, nous voyons dans la série deux points critiques : l’époque des Croisades et celle de Constantin ; ces deux grandes poussées de foi ont pu et dû entraîner une certaine crédulité historique. On peut poser en principe, sans injustice, qu’une tradition qui n’est pas antérieure aux Croisades doit être tenue pour suspecte jusqu’à bonne preuve du contraire. Par contre, une tradition préconstantinienne a pour elle une forte présomption de vérité.

Mais existe-t-il en fait, au sujet des Lieux Saints, des traditions antérieures à (Constantin ? La question est de conséquence : nous le verrons quand nous la reprendrons plus à fond au sujet du Saint Sépulcre. La constance des voyages aux L. S. durant les premiers siècles nous est aflirmée en termes généraux par la lettre de J’aule et d’Ettstochiitm (9-10, P. /.., XXII, 48y), et par saint Jhax Damascknh (I)e Lmng., 1. xxiii, P. C »’., XCIV, i 206 C). Mais d’autres textes plus précis nous fournissent des témoignages personnels, garants d’une tradition historicpie et religieuse.

Entre 281 et 235, OnicèNE nous dit avoir visité les lieux (-/îvoyevsi h rat : totioi ;) « à la recherche des traces de Jésus, de ses disciples et des Prophètes » (ht /o., vr, XXIV, P. G, , XIV, 269.). Nous y trouvons presque en même temps Fir.mime.v de Césarée, « occasione sanctorum locorum Palæstinam veniens » (S. Jk-KùiiE, De yir, ill., liv, P. /,., XX1II, 665 A). Vers 212, nous voyons Alexandbk, qui allait être élevé sur le siège de Jértisalem, venir de Cappadoce, où il était déjà évêque, « pour prier et visiter les lieux » (sùyf, i

X’xi Tftv Tc’nu-J hror.iy.i hsy.s-j (Eus., //. E., VI, XI, P. G.,

XX, 541 C). Enfin, vers 160, Méliton de Sardes, voulant recueillir à sa source la véritable tradition touchant les livres de l’.Vncien Testament et la personne de J. C, se rendit « jusqu’au lieu où furent écrits ces livres et où se passèrent ces faits » (Eus., //. £’., IV, XXVI, /’. G., XX, 396 C). Si l’on se souvient que Siraéon, successeur immédiat de saint Jacques sur le siège de Jérusalem, ne mourut qu’en 107, à l’âge de cent vingt ans, on voit que ces jalons, bien qu’un peu espacés, font au moins concevoir comme possible la constance de traditions reliantConstantin à J.C.

Il est donc injuste, comme l’a fait par exemple RoBiNsoN (Bihlical researclies in Palestine^, t. I, sect. VII, pp. 251-267), de représenter les traditions relatives aux L. S. comme « une vaste masse d’éléments de provenance étrangère et de caractère douteux », et de poser en axiome le principe suivant : a Toute tradition ecclésiastique relative aux sites antiques de Jérusalem, des environs, et de toute la Palestine, est sans valeur, tant qu’elle ne s’appuie pas sur des données fournies par les Ecritures ou d’autres témoignages contemporains. » II faudrait, pour être dans le vrai, , ajouler : ou tant que nous ne l)ouvons faire remonter cette tradition, d’unemanière sullisarament certaine et continue, jusqu’à une date assez rapprochée des événements pour rendre une erreur moralement impossible.

On pourrait se demander à quelle époque remonte l’appellation même de Lien v Saints ? Plusieurs des célèbres ampoules du Trésor de Monza, à la lin du VI’siècle, portent la légende : é’/y.m X-jjk,-j Çw> ;  ; tvv cîyitov X1517Toi r ! s’r : t.)v (cf. Dom Leclbrcq. Dict.d’Arch. chrét.ei de Liturgie, I, 1737 sq.). La formule est déjà courante dans saint Jérôme et Eusèbe ; l’appellation absolue oî ToTTst semble se trouver pour la première fois dans le passage cité d’Origène.

Parmi les Lieux Saints traditionnels, nous n’étudierons en détail que les principaux : le Saint Sépulcre et le Calvaire, le Cénacle, le Prétoire et la Voie douloureuse, Bethléem et Nazareth.

m. Le Saint Sépulcre et le Calvaire. — D’après l’Ecriture, Jésus fut crucifié : a) hors de la ville : , Io., XIX, 20 ; ffeh., xiii, 12 ; — b) proche de la ville : Jo, , XIX, 20 ; — c) à un endroit fréquenté, probablement près d’une route :.^/^, xxv^, 89 ; Mc, xv, 29. Les quatre Evangélisles parlent manifestement d’un site bien connu, portant encore de leur tenqis le même nom qu’au temps de Jésus, le lieu du crâne, K ; 5’/v(îv (Ac, xxiii, 33), Kpmioj romi (.’/<., xxvii, 33 ; Me, XV, 22 ; /o., XIX, 17).

La tradition actuelle touchant le Calvaire et le Sépulcre remonte sans déviation ni hésitation