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1843

LIBÈRE (LE PAPE)

1844

Théodorbt, //. E., II, xiii, reproduit P. L., VIII, 1359-136C.) On lui donna trois jours pour rétléchir. Alors il fut déporté à Bérée en Tlirace, et, par les soins de l’empereur, l’arcliidiacre Félix l’ut préposé à l’Eglise de Rome. L’exil de Libère dura environ trois ans. Vers le milieu de 358, il était rendu à son siège ; il acheva sa carrière en bon pasteur.

La question qui se pose est celle-ci : de quel prix Libère avait-il jiayé son retour à Rome, après l’exil à Bérée ? Car Constance n'était pas homme à céder spontanément.

II. Documents accusateurs. — Ces documents se répartissent en deux groupes : i) dépositions des contemporains, auxquelles on peutjoindre quelques témoignages postérieurs ; 2) aveux de Libère luimême.

i) Les contemporains. — a) Saint Athanase, qui, on l’a vii, fut en cause dès le début des démêlés de Libère a ec le pouvoir impérial. On lit dans V.ipologia contra Aruinos, lxxxix, P. G. XXV, 409 : « Au nombre des évêques qui m’appuyèrent de leurs paroles et souiTrirent l’exil, est Libère, évoque de Rome : il est vrai qu’il ne supporta pas jusqu’au bout les rigueurs de l’exil, mais il était resté deux ans éloigné, connaissant la trame ourdie contre moi. n Dans ï'Histovia Arianorum ad ni’innckos, XLl, P. G., XXV, '^Iji : li Libère, exilé, fléchit après deux ans (//.stk 5t£T^ Xpdj’yj oi/.yy.-i), et devant la menace de mort, il signa. Mais cela même montre la violence dont on usa contre lui et la haine qu’il portait à l’hérésie, et les sentiments qu’il monlrait envers Athanase, quand il était libre. » — Il faut observer qu' Athanase écrivait VApologia contra Arianos en 350 ; Vl/istoria Arianorum en 35^ : la défaillance de Libère s'étant produite au cours des années 359-3'ï8, on a le choix entre deux hypothèses : ou bien Athanase aura revu son travail à une date postérieure, ou bien une main étrangère l’aura interpole.

b) Saint IIilairk, après avoir reproché àl’empereur Constance ses attentats contre les Eglises d'.lexandrie, de Trêves, de Milan, passe à la persécution exercée contre l’Eglise de Rome, Contra Conslantiunt ('mpera/orem, XI, f.i, X, 589 : Vertisti deinde usqiiead Uomam belhim tuum, eripuisti illinp episcopum : et o te miseriim, qui nescio iitriim maiore impielate relegat’eris quam remiseris. On voit généralement dans ces paroles une double allusion à la violence physique subie par Lilière lors de son exil, et à la violence morale subie par le même pontife avant son retour. Et l’on trouve une confirmation de cette vue dans un autre passage du même livre où, énuraérant les grands évêques exilés pour leur foi, Paulin de Trêves, Eusèbe de Verceil, Lucifer de Cagliari, Denys de Milan, l’auteur ne nomme pas Libère. /I>id., 11, 5^8 D. — Hilaire écrivait au printemps de 360.

c) Saint JiiRÔMH, dans sa Chronique^ écrite vers 380, P. /,., XXVII, 684-Û85, mentionne l’exil de Libère pour la foi ; il ajoute que les clercs romains jurèrent de ne pas recevoir, lui vivant, un autre évêque, mais que, des inlluences ariennes ayant procuré l'élévation de Félix, plusievirs trahirent leur serment. Toutefois, l’annéesuivante, Libère, vaincu par les rigueurs de l’exil, ayant souscrit à l’hérésie et étant rentré dans Rome qui lui lit un accueil triomphal, ceux qui s'étaient attachés à la fortune de Félix partagèrent sa disgrâce. — Dans le De tnris illastrilins, tcTil vers 392, saint Jérôme a des paroles sévcrespour Kortunatiend'.Vquilée, coupable d’avoir ébranlé la constance de Libère à son dopait pour l’exil, et de l’avoir fait plus tard souscrire à l’hérésie. De viris, xcvii, P. I., XXIII, 697 : hi hoc liabetur deteslabilis quod J.iberium, Homanæ urbis episco pum, pro fide ad exsilium pergentem, primus sollicitavit ac fregit, et ad subscriptionem liæreseos cornpulit. — Saint Jérôme, qui étudiait à Rome en 358, a pu voir de ses yeux la rentrée triomphale de Libère.

d) Un document de l’année 388, le Libellas precum ad imperatores Valentinianam^ l’heodosium et Arcadium, présenté par les prêtres Faustin et Marcellin, partisans de l’antipape Ursicin et adversaires du pape Damase, débute par un récit assez conforme à celui de saint Jérôme en sa Chronique. Voir/*. L., Xlll, 81. Lhsicin appartenait au groupe resté Udèle à Lil)ère ; Damase s'était compromis avec l’antipape Félix. Lesauteurs rappellentl’exil de Libère, Eusèbe, Lucifer et Hilaire pour la foi ; dénoncent l’ambition et les intrigues du diacre Damase qui, après avoir juré fidélité au pape légitime, s’est rallié à l’intrus ; les instances faites près de Constance, lors de sa visite à Rome en 35^, par le peuple, et la réponse de Constance : » Libère vous reviendra meilleur qu’il n’est parti », paroles qui semblaient escompter une faiblesse ; les complaisances coupables dont Libère a payé son retour ; la disgrâce et la mort de Félix ; enlin la mort de Libère.

e) PniLosTORGE, écrivant après ^23, mentionne sur la même ligne la défection de Libère et celle d’Hnsius de Cordoue : le premier signa une déclaration contre l'î/Mî^iiî ; et contre.lhanase ; le second céda pareillement aux suggestions d’un synode arien. Pour récompense, tous deux furent rendus à leurs sièges. /'. G., LXV, Ô17-518. — Nous entendons chez Philostorge la tradition arienne.

/) Ces récils subirent au cours des âges diverses transformations et travestissements. On peut citer, pour le VI"-' siècle :

La première version du Liber Pontificaîis (vers 530), éd. DucHESNE.t. I, p. 207-208. Félix est le héros de ce récit fantaisiste. Mis à la tête de l’Eglise romaine par Libère parlant pour l’exil, Félix se signale par son énergie contre l’arianisrae. A la tête d’un concile de 4*^ évêques, il condamne les hérétiques Ursace et Valens ; pour se venger, Ursace et A’alens intriguent près de Constance et obtiennent le rappel de Libère. Eft’ectivement, Libère rentre de l’exil, et fait cause commune avec les ariens, sans toutefois admettre la réitération du baptême, selon la discipline de la secte Une persécution éclate ; Félix est au nombre des victimes.

Les Gesta Eusebiipreshyteri, un peupostérieursàla première rédaction du Liber Pontificaîis, montrent Libère et Constance accusés conjointement d’hérésie par le prêtre romain Eusèbe ; Libère prenant possession de l’Eglise de Rome et chassant le pape légitime Félix ; Damase, à la tête d’un concile de a8 évêques et de 25 prêtres, condamnant la mémoire de son prédécesseur Libère. — Acta Sanctorum, Aug., t. ill, p. 166 sq(|.

Cette littérature, en partie légendaire, devait influer sur les martyrologes du moyen âge. Dans la galerie des bustes pontificaux érigée à Saint-Pierre de Rome sous Nicolas III (1277-1280), Libère, seul entre les papes du quatrième siècle, est dépourvu d’auréole. Son nom manque au martyrologe romain.

2) Les lettres de Libère. — Sous le nom de Libère, 13 lettres nous sont parvenues, dont 9 conservées ])armi les fragments de l’Opiis historiciim de saint Hilaire (P. L., X). De ces 9 lettres, 4 ap|)artiennent au temps de son exil ; elles lui font peu d’honneur. >Iais sont-elles aulhentiiities'.' En voici l’analyse :

Lettre Studens jiaci (= : liilaire, frcgni. iv, i, P. h.,

X. G78C-681 A). Adressée aux évê(pies d’Orient, qui

' avaient écrit au pape Jules, prédécesseur de Libère,