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JUIF (PEUPLE)

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sur l’histoire de la religion cl du peuple juifs, on arrive bien vite à se convaincre que cette lijpotliése correspond strictement à la réalité : — a) L’on pourrait remonter jusqu’aux ancêtres d’Israël, aux patriarches, pour trouver, dans ce qui nous reste de leur histoire, des traces frappantes de ce plan divin. Kn faisant commencer ces remarques avec les origines pro-Iirement dites de la nation Israélite, on constate que, par le ministère île Moïse, c’est le nom de Valnveh, le nom du Dieu qui sera un jour honoré i)ar tout l’univers, (]ui groupe, pour les séparer du reste <lu monde, en queli|ue sorte abandonné au paganisme, les tribus qui vont constituer le peuple d’Israël. C’est ce même nom qui sert de mot d’ordre pour toute l’œuvre de la conquête de la Terre Promise. — / ?) C’est ce même nom qui, pendant la période si tourmentée des Juges, maintient l’esprit national dans les àmcs qui savent le garder ; c’est lui qui, aux heures particulièrement critiques, a assez de force pour assembler à nouveau les tribus et leur faire réaliser contre de redoutables ennemis des elforls décisifs. L’on saisit en toute vérité, à ces origines de l’histoire juive, que c’est Yahweh lui-même qui se forme un peuple pour en recevoir les honneurs auxquels il a droit et qui prépare à ce peuple des destinées uniques. — /) La période de la royauté est marquée par d’étranges vicissitudes, au point de vue religieux plus encore qu’au point de vtie politique et social. A plusieurs reprises, on a l’impression que la religion mosaïque va sombrer au milieu des cultes idolâtriques. Mais toujours se manifeste la Providence très particulière de Dieu ; toujours il se réserve un groupe de lidèles ; pour les soutenir et pour faire triompher la juste idée de sa religion, il fait surgir une série d’àmes inspirées qui deviennent ses représentants et ses champions. C’est ainsique le yahwisnie survit aux assauts qui semblaient devoir l’anéantir. Bien plus : c’estaumomentoù cesassautsdeviennent plus redoutables que les représentants de Yahweh proclament avec plus de force les destinées futures de sa religion ; c’est à partir de ce moment que les événements se précipitent, avec plus de rapidité et d’une manière plus caracléristique, en vue de les réaliser. — c) Le coup qui semblait devoir être fatal à Israël fut des plus ellicaces pour préparer l’avenir du monothéisme :

— xy)Ce fut, nous l’avons dit, la foi en Yahweh, comjilélée par la perspective des plus glorieuses destinées, qui empêcha le peuple Israélite de sombrer pour jamais sous le coup de la tempête ; ce furent cette foi etees perspectives qui maintinrent et excitèrent dans lésâmes (idèlesle désir de la restauration. — 53) Mais, en même temps, des transformations s’opéraient dans la vie religieuse des Juifs, qui devaient être extrêmement signifleatives en vue des propagandes futures. En Palestine, la religion était étroitement liée aux sanctuaires et aux institutions liturgiques dont ils étaient les centres. Depuis la réforme de Josias, le culte authentique des lidèles de Yahweh était le culte du Temple, à telle enseigne qu’en dehors de ses parvis aucun acte spécifiquement religieux ne pouvait s’accomplir. Le séjour en Chaldée allait avoir pour effet de faire comprendre, non seulement que la religion de Yahweh n’était pas liée à un paj’s et à une ville, mais qu’elle devait subsister en dehors du système d’institutions qui, à un grand nombre, avait paru essentiel ; c’était comme un premier pas vers l’abrogation des observances légales que saint Paul devait prononcer. — //) Sur la terre d’exil toutefois, il était absolument nécessaire de se prémunir contre des intluences à ce point délétères qu’elles eurent raison des attitudes religieuses d’un grand nombre de déportés ; il fallait se défendre contre le prestige éminemment séducteur des dieux étrangers. Loin du

Temple et de ses cérémonies, on ne pouvait le faiie qu’en développant ces éléments constitutifs du culte intérieur — le seul qui dût par la suite subsister — qui sont la foi, l’amour, le souci de la justice et de la vie morale. — ôS) Cependant l’attention se concentrait sur cette littérature du passé que les scribes recueillaient, ordonnaient, étudiaient, enseignaient ; on s’accoutumait à aller y chercher l’inspiration de ses sentiments religieux et la règle de sa foi ; de la sorte, se préparait la juxtai)osition, puis la substitution de la religion du Livre Saint à la religion du Temple : nouvelle transformation des plus importantes en vue de l’avenir. — £) A partir de l’édit de Cyrus, on vit se dessiner un double courant dans la religion juive. En Palestine, le terme du mouvement fut l’organisation de plus en i)lus stricte du Judaïsme. On peut n’avoir qu’une sjnipathie restreinte pour ces tendances, surtout pour les excès qui devaient aboutir aux étroitesses du pharisaïsnic. Mais on ne saurait méconnaître le caractère hautement providentiel de l’institution fondée par Esdras. A une éjiociue où Israël allait se trouver perpétuellement mêlé aux nations, où un si grand nombre de ses lils allaient subir l’ascendant des civilisations étrangères, il ne fallait, pour préserver la religion authentique de Yahweh, rien moins que les barrières étroites du Judaïsme : l’on peut se demander ce que seraient devenus, humainement parlant, ces trésors, futures richesses des nations, s’ils n’avaient été gardés par une austèreetvigilante orthodoxie. C’estau Judaïsme aussi que nous devons la conservation de nos Ecritures ; c’est son intransigeance qui a préservé le saint recueil contre l’invasion detant de productions apocryphes, indignes d’y figurer. — ;) Il n’en est pas moins vrai que nous nous tournons plus volontiers vers ces colonies de la dispersion, vers celles-là surtout qui, après l’exil et sous l’influence des circonstances politiques, se multiplièrent dans le monde grec. Par elles, en effet, la foi religieuse, soigneusement gardée dans le Judaïsme palestinien, commença à se répandre parmi le monde païen ; par elles les nations entendirent pour la première fois parler de Yahweh et, après l’avoir d’abord considéré avec toutes sortes de suspicions, s’accoutumèrent à le respecter. Par elles furent posés, en toute vérité, les premiers jalons sur la route que devaient suivre les missionnaires du ro3aume messianique. — r, ) Un dernier signe enfin permettait de s’apercevoir que l’on allait à grands pas vers la plénitude des temps. Les persécutions dont les Juifs avaient été les victimes avaient exaspéré en leurs âmes le sentiment de l’attente messianique. De là ces multiples productions qui, en reprenant le thème de l’antique espérance, en altéraient les données par de multiples corruptions : si jamais l’œuvre de Dieu devait se réaliser, le moment était venu où, en les accomplissant, ! e Messie dégagerait les promesses authentiques de tous les éléments étrangers qui risquaient de les dénaturer. — S) Il est donc aisé de constater, l’histoire en main, l’unité profonde de l’action divine mettant tout en œuvre pour conserver ce monothéisme qui doit être la religion de toute la terre, et pour en [)réparer la diffusion. Il est aisé de saisir les liens qui unissent les deux Testaments comme les deux parts d’un seul et même tableau.

E. — S’il en est ainsi, on est amené naturellement à admettre qu’un même Esprit agit d’un bout à l’aulre de la grande œuvre judéo-chrétienne. — o) Sons le nom d’esprit prophétirpie, il domine toute l’économie ancienne ; la religion de Yahweh est surtout la religion prophétique. Or l’Esprit qui l’inspire ne se manifeste pas seulement en annonçant, de temps à autre et par des déclarations expresses, ce qui doit