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JESUS CHRIST

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dit donc très bien dans son opuscule Pâqiie et Penlecoie, que « le a été enseveli esl un des points les plus anciens de la prédication apostolique. S. Paul [en devenant chrétien] l’a trouvé déjà lixé’. »

La résurrection, fait réel

A. — Le témoignage de saint Paul

358. — Jésus, après cette mort certaine, s’est manifesté comme certainement vivant. Tel est le fait que nous garantit le témoignage des disciples et, tout d’abord, de saint Paul. Dans une lettre écrite auplus tôt en h’à, au plus tard en 67, faisant allusion à sa prédication initiale et essentielle, et s’adrcssanl à ceux-là même qui l’avaient reçue quelques années auparavant (selon toute probabilité pendant l’hiver de l’an 50-51)- l’apôtre s’exprimait en ces termes :

Je vous rappelle, Frères, l’ICfongile que je vous ai annoncé, celui i|ue vous avez reçu, dans [la croyance] duquel vous avez persévéré et par lequel aussi vous êtes sauvés si, dans les termes où je vous l’ai annoncé, vous le gardez 3 ; — à moins que vous n’ayez cru en vain !

Je vous ai donc transmis tout d abord ce que moi-même j’ai reçu par tradition ; que le Christ est mort pour nos péchés, conformément aux Ecritures ; et qu’il a été enseveli ; et qu’il est ressuscité le troisième jour, conformément aux Ecritures ; et qu’il a été vu par Pierre, ensuite par les Douze. Après, il a été vu en une seule fois par plus de cinq cents frères, dont lu plupart sont encore vivants à ce jour, et dont quelques-uns sont morts. Ensuite il a été vu par Jacques, ensuite par tous les apôtres. Après eus t jus, il a été vu par moi aussi, comme par l’avorton [de la famille apo.stolique]. Car je suis le dernier des apôtres, indigne d être appelé apcitre, puisque j’ai persécuté l’Eglise <ie Dieu ; mais par la grrce de Dieu je suis ce que je suis, et la grâce à moi dévolue n’a pas été stérile, mais j’ai plus travaillé qu’eux tous — non pas moi, mais la giài-e de Dieu qui est avec moi. Or donc, que ce soit moi, que ce soient eux. c’est ainsi que nous prêchons et c’est ainsi que vous avez cru.

Or, si la prédication [évangélitpie] porte que le Christ est ressuscité des morts, comment certains parmi vous disent-ils qu’il n’y a pas de résurrection des morts ? S’il n’y a pas de résurrection des morts, le Glirist non plus n’est pas ressuscité..Mais si le Christ n’est pas ressuscité, vaine esl donc notre prédication, vaine également est votre foi ! [Bien plus], nous sommes convaincus d’être de faux témoins de Dieu, car nous avons témoigné de par

textes ! ], l’on est en droit de conjecturer que, le soir de la passion, le corps de Jésus tut détaché de la croix par les soldats et jelé dans quelque fosse commune, où l’on ne

pourrait avoir l’idée de l’aller chercher Quelques

lettres sur des questions actuelles, Paris, 1908, p. 93-94.

1. Osttn und l’fîni ; slen, Leipzig, 1903. p. 11. c Das begra benisl eines di-ræltesten Stllcke des Kerygma. Puulus hat es schon vorgefuiiden. »

2. Pour ces données chronologi pies, je suis Ferdinand PrtAT, La Chr.malogic de l’âge ap-/slo ! i</ue, dans Recliercln’s de science religieuse, juillet 19rJ, p. 372-392 friche bihliographie ibid., ’i. 372 et 374). On sait que la rencontre de saint P.iul à Cnrinthe avec le proconsul Gallion, frère de Scnèque : Act., xviii, 12. peut être datée siirement, a un. ; ou d.’ux années près :.jl-53, par l’inscription trouvée à Delphes et publiée par.M. Bouhglet en 1905 (texte avec photogravure de l’inscription dans le Pauliis de A. Diissmam.n-, ’riihicigen, 1911, p. 159-177). Cette inscription porte en eifet. ligne fi, que Gallion était proconsul d’Achaïe entre les26’cl 27’salutations de Claude comme empereur, c’e^l : i-dire entre 52 et 53. Sur les détails, F. Pkat, lue. latid., p. 374-37 ! ».

3. Pour la construction adoptée ici, R. Cornfly, Conimentarius in I- « ad Cnrinlhins, Paris, 1890, p. 451, 452. On peut consulter, sui- l’ensemble du lexle, avec le P. Cornely, E. Mancenot, La Ilrsurrrclii>n de Jesus^ Pari », 19Iii, surtout p. 40sqq. ; et les commentaires de A. LemOiNnyeu, hpitres dé S. Paul,. Paris, 1908, p. ir>2-172 ; de G. Tois-SAINT, Eptlres de saint Paul, ], Paris, 1910, p. 406-422.

Dieu qu’il a ressuscité le Christ — ce qu’assurément il n’a pas fait si les morts ne ressuscitent ]>as.

Car si les morts ne ressuscitent pas [ne peuvent ressusciter ], le Christ non plus n’est pas ressuscité. Et si le Christ n’est pas ressuscité, vaine est votre foi, vous êtes encore dans vos [anciens] péchés [dont vous croyiez que la foi vous avait tirés]. Donc encore ceux qui sont morts dans le Christ ont péri. Or, si c est dans cette vie seulement que nous espérons au Christ, nous sommes les plus malheureux des hommes.

Mais au fait, le Christ est ressuscité des morts, prémices de ceux qui se sont endormis [dans le Seigneur]… I C„r.. XV. 1-20.

359. — Je n’ai pas voulu couper par des gloses ce témoignage capital. Il nous ramène, qu’on y songe bien, par la prédication de Paul à Corinthe, aux années 50-5a ; par la croyance traditionnelle que Paul a trouvée vivante en s’agrégeant à l’Eglise, aux années 34-36’ ; par l’identité de la prédication apostolique sur ce point de la résurrection, à tout l’intervalle compris entre ces dates. Cela nous met à vingt ans, à dix ans, à quatre ans et moins encore, de la passion du Seigneur I

360. — La déclaration est épisodique, et d autant plus notable : la dispute des Corinthiens portait en effet, non sur la résurrection du Christ dont ils n’avaient garde de douter, mais sur la résurrection des morts en général. Tout l’effort de l’apôtre va à rendre manifeste l’étroite connexion des deux faits : si le Christ est ressuscité — et nul chrétien ne saurait le contester sans ruiner du coup tout 1 édifice de sa foi — la résurrection est donc possible 1 Non seulement une reprise momentanée des conditions mortelles, comme il était arrivé par exemple au fils de cette veuve de Nain ou à Lazare, mais’une entrée définitive, triomphante, dans une vie désormais immortelle. Paul ne dit pas qu’il faut croire à la résurrection de Jésus, encore que, de cette résurrection, il rappelle en passant les preuves irréfragables, — il dit que la résurrection de Jésus, bien comprise, assure le fidèle de la certitude et de la gloire de sa propre résurrection Il est donc tout à fait vain d’alléguer, contre la réalité du fait, le caractère théologique du morceau. Tout de même que la mention de la mort rédemptrice : « Il est mort pour nos péchés, conforméiuent aux Ecritures », offusque si peu la réalité de la mort, qu’au contraire le dogme est fondé sur ce fait et s’écroulerait avec lui ; de même, la description de la gloire des ressuscites, qtii est pour nous objet de foi, n’infirme en aucune manière la réalité de la résurrection. Pas plus ici qu’ailleurs, Paul ne distingue des éléments — apologétique et tliéologique ; objet de « vue rationnelle » et objet de « foi » — que des nécessités de méthode nous ont forcés depuis de discerner. Ces éléments sont présentés par lui, et par toute la prédication apostolique, dans leur indissoluble union. La mort du Christ est, par identité, mort rédemptrice ; sa résurrection est, j)ar identité, son entrée dans une vie glorieuse. Mais c’est le même Jésus qui est mort et qui est ressuscité, car en décrivant la résurrection des justes, dont celle du Christ

1. Feid. Pkat, La CItronalogit de l’âge apostnlique, dani rie, herc/ies, 1912, p. 383-392. Il est très notable que S. Paul, dans le fameux passage de rE[>itre aux Calâtes, I. 18 sqq., où il raconte que, trois ans après sa conversion, it vint à Jérusalem et y passa une quinzaine de jours dans le but précis de s’entretenir avec Pierre (t’7Ti’ : i^7at I> ; ^àv). nomme justement Pierre et Jacques comme les deux seuls apôtres qu’il vit alors. Il est infiniment probable que i-’cst en cette occurrence — de <-inq à huit ans apiès les faits — qu’il reçut, de la bouche même de ceux qui en avaient été favorisés, le récit des visions du Christ ressuscité mentionnées ici. Voir F. H. Cuase, dans les Cambridge l/icologicat Fssnys, London, 1905, p. 392.