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JESUS CHRIST

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Deux témoins au xvii" siècle : Biaise Pascal et la bienheureuse Marguerite Marie, 460461.

Les témoins contemporains, 462. Conclusion, 463-^65.

CoQclusion de l’article, 466-468.

Bibliographie générale, 469-470.

Intuodictio.v

I. — But du présent article

1. — Jésus de Nazareth a-t-il été sur terre l’envoyé, le héraut, l’indispensable témoin de Dieu ? Doit-on aller plus loin et confesser qu’il est, dans un sens unique et incommunicable, son Fils ? Ceux qui le connaissent suQisamment sont-ilstenusdemarcher à sa suite sur le terrain religieux et de mettre, s’ils ne veulent s’égarer, leurs pas dans ses pas ? Prise d’ensemble, considérée dans sa réalité passée et son rayonnement actuel, son œuvre justilje-t-elle les paroles décisives du Mailre : a Toutes choses m’ont été livrées par mon Père, et nul ne connaît le Fils, hormis le Père ; comme nul aussi ne connaît le Père, hormis le Fils et celui auquel le Fils veut bien le révéler… Je suis la voie et la vérité et la vie : nul ne vient au Père que par moi » ?(.Vi., xi, a’ ;  ; Ce., x, 22 ; Jo., XIV, 6.)

En face de ces déclarations et de l’alternativeredoutable qu’elles fornmlent. relisons un autre passage de l’Evangile : « Pensez-vous que je sois venu mettre la paix en terre ? — Non, vous dis-je, mais la séparation, car dorénavant s’ils sont cinq dans une njaisoii, ils seront divisés : trois contre deux et deux contre trois, le père contre son fils et le (ils contre son père, la mère contre sa lille et la fille contre sa mère… » (/-c, xii, 51, 54) Image frappante de la coupure faite dans une vie d’homme, ou dans une société, par l’option chrétienne acceptée ou rejetée 1 Ceux-là le savent qui ont dû conquérir ou retrouver la foi en Jésus. Mais aussi l’on ne pouirait dire avec plus de force que là-dessus se départagent, plus ou moins explicitement, les âmes religieuses, depuis la venue du Clirist.

Tout le but du présent article est de rendre plus assuré un choix de si grande conséquence, en le confirmant s’il est déjà fait ; en l’éclairant, s’il reste à faire.

Présupposés de philosophie et de méthode

S. — Celte première et essentielle déiiiarclie de l’apologétique chrétienne conclut à la divinité de la mission de Jésus. Pour en arriver là, nous nous’soMinies réduits, par méthode, aux seules ressources de la phiIoso[)hie générale et de l’histoire. Le titre et l’objet principal de ce Dictionnaire ; l’état présent des études du clergé, où les traités Du Clirisl, Envoyé divin, et Du Verbe incarné, sont enseignés à part l’un de l’autre et suivant des règles différentes ; les besoins de ceux qui cherclient ou de ceux qui, ayant trouvé pour leur comj)le, aident les autres à chercher, tout nous prescrivait de conduire notre enquête sur le terrain apologétique, sans faire appel à l’infaillible vérité des Ecritures ou de la Tradition ciilliolique.

Nous nous interdisions parla même la ilémonstration classique, parlant des Ecritures inspirées, de la divinité personnelle du Sauveur ; nous renoncions à concilier celle croyance avec le dogme de l’unité divine. Ce sont là tâches de première iniporlance, mais qui débordent notre cadre et qu’on peut remettre à une étude ultérieure de la religion chrétienne, dont

la vérité fondamentale ne dépend pas. L’effort réclamé par la discussion des dillieultés soulevées, à l’intérieur du christianisme, par les Ariens et les Sociniens, ou, à l’extérieur, par les rationalistes, contre le mystère de l’inearnalion, peut en elfet être comparé à ces raisonnements délicats de théologie naturelle opposés aux objections des agnostiques et de certains panthéistes subtils, touchant la connaissance de Dieu, considéré comme personnel et distinct de son œuvre. Au contraire, l’appréhension positive et concrète de la divinité du Christ doit être assimilée à l’appréhension générale des raisons de croire en Dieu. Cette dernière tâche est à la portée de tout homme et un esprit non pi’évenu l’accomplit spontanément. L’autre n’a toute son importance que pour des gens initiés aux problèmes techniques de la philosophie. Encore chez ceux-ci défend-elle, plus qu’elle ne la conquiert ou l’augmente, une certitude déjà possédée’.

Or c’est à cette appréhension générale et concrète que nous mène, par surcroît, la démonstration, directement tentée ici, du fait que Jésus de Nazareth s’est allirmé et prouvé Messie et Fils dé Dieu. Car beaucoup des paroles et des arguments apportés à l’appui de cette thèse conduisent, si on les pousse jusqu’au bout, à confesser la divinité du Christ. Il est certain par exemple qu’aies prendre dans leur sens naturel, et surtout dans leur convergence, les allirmations du Maître sur sa personne ne vont pas moins avant. Il est manifeste également que telle a été l’interprétation de la première génération chrétienne : les disciples immédiats du Seigneur l’ont tenu non seulement pour un héros, un saint, un pro])hete — mais pour un Dieu. Ce sont là des faits considérables. Ils paraîtront décisifs à ceux que ce travail convaincr.i <pie Jésus a véritablement reçu de son Pèrft, et donné aux hommes des signes probants de sa mission divine.

En conséquence, les documents employés ici seront considérés comme investis d’une autorité simplement humaine, non comme des écrits divinement inspirés. Ni nous ne réclameronsune créance absolue pour chacun de leurs détails, ni nous n’entreprendrons de résoudre les difficultés soulevées par les discordances résultant de la comparaison minutieuse des textes’-. Il sullira d’établir qu’à travers ces différences (favorables en somme, dans le cas d’accord sur la substance des faits, à l’historicité des pièces) les matériaux utilisés sont solides et de bon aloi. Nous n’aurons besoin pour cela que des méthodes critiques en usage parmi ceux qui estiment queriiisloire, science en mainte partie conjecturale, nous assure, dans certaines conditions de teneur, d’attestation et de continuité des témoignages, la possession de réelles certitudes.

3. — Par cette allusion aux règles de la méthode scientifique, nous n’entendons pas exclure de toute certitude d’histoire ceux ipii n’auraient pas la culture ou les loisirs indispensables pour mener, ou même pour suivre utilement, une enquête de ce genre. Outre la voie toujours ouverte du recours à une autorité ayant fait ses preuves, outre l’emploi très légitime ici de l’argument de consentement général : securus iudicat orbis terrarum ! — il reste au simple.

1. On peut voir sur ce point les rénexions des tliéolo^iensdu concile du Vatican. Acta Vaiicana, coll. Lacenais, t. VU, p. ; >3’2, 533.

2. Ces difficultés de dét.TÎl rentrent dans le ciidi-e de ce Dirtinnnaire, mjiis non dans celui du présent article. Voir ci-dessus l’article Inrhhance iiini, i(^uE, por Alfred Ouhand, vol. II, col. 781-787.