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INVESTITURES (QUERELLE DES)

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qui avaien", prévalu déjà en France. Dans une assemblée d’cvêques et de grands tenue à Londres, Henri 1" déclara qu’à l’avenir, ni le roi, ni aucun laïque en Angleterre n’iuvesUrait plus d’un cvèclié ou d’une ahbaje par le bàlon pastoral et l’anneau. Anselme répondit en donnant lecture d’une lettre du pape, jiar laquelle Pascal consentait à ne plus inquiéter les prélats qui auraient fait hommage au roi, jusqu’au jour où l’arclievêque aurait pu décider le roi par ses exhortations à renoncer de lui-mime à cet usage (P. L., CLXIII, col. 187). En Angleterre, le pape a donc formellement consenti à tolérer l’iiommage, à condition que le roi renonce à l’investiture et que désormais la liberté des élections soit rétablie.

Solution de la querelle des investitures dans le Saint Empire. — La révolte du prince Henri contre son père Henri IV, la déposition, puis la mort à Liège de l’empereur excommunié (iio5), les promesses du nouveau roi tirent croire au pape Pascal l que dans l’Empire la partie était gagnée et que l’investiture laïque allait disparaître. Mais il s’aperçut bientôt qu’HENRi V élevait exactement les mêmes prélenlionsqueson prédécesseur. Dès lors, la papauté cherche un terrain de conciliation, et la période des négociations est ouverte.

i* Les pourparlers de Chûlons. — Pascal H, s’étant rendu en France, convoqua un concile à Troyes pour examiner le différend qui renaissait en Allemagne au sujet de l’investiture. Henri V lui envoya une ambassade dont le chef exposa en présence du pape, à Chàlons, les prétentions impériales : « Au temps des anciens pontifes, dit-il, les droits impériaux ont été ainsi Uxés. Avant l’élection, on demande l’assentiment de l’empereur, puis l’évéque est élu suivant les règles canoniques et consacré. Il se présente alors devant l’empereur / ; oHr /es régales, afin d’en être (hyesti par la crusse et l’anneau, prr’ter serment et liommage. Il convient en effet que les cités, châteaux, marquisats, lonlieux et tout ce qui relève du pouvoir de l’empereur ne soit pas occupé autrement. » (Sugkm, Vie de Louis le Gros, éd. Moliniku, p. 27.) Henri V, qui s’inspire déjà ici de la distinction entre les régales et l’évéché, maintient pourtant les prétentions essentielles de son père, relativement au droit du roi de s’ingérer dans l’élection, de donner l’investiture des régales par la crosse et l’anneau et d’exiger des évêques l’hommage. Le pape fit rc[)ondre que l’Eglise a été établie libre et qu’elle serait esclave si elle ne pouvait élire un évêque sans l’aveu du roi. Investir par la crosse et l’anneau, ajouta-t-il, c’est usurper contre Dieu même, attendu que de tels insignes sont du domaine de l’autel. L’évéque dérogerait à son caractère sacré en plaçant ses mains consacrées par le corps et le sang du Seigneur dans les mains du laïque que le glaive a teintes de sang. Pascal II maintient donc à cette heure toutes les revendications de Grégoire VII et d’Urbain II ; aussi les négociations furent rompueset le pape reprit le chemin de l’Italie.

2° La convention de Sutri. — En 1109, Henri V parut en Italie avec une formidable escorte de seigneurs allemands, annonçant l’intention de se faire couronner empereur à Rome. Son dessein était nianifestcuient d’exercer contrainte sur Pascal II pour lui arracher l’abandon des investitures. De nouveaux pourparlers furent engagés à Sutri entre Pascal et les députés dont le roi se faisait précéder sur la roule de Rome. Le pape reconnut que la prétention de l’empereur relativement aux regalia avait quelque fondement, et il lit à ses messagers cette ])roposition inattendue. Le clergé se contentera désormais des dîmes et des offrandes ; il rendra au roi les régales que les églises ont reçues de Charte-’magne. En conséquence, les églises garderont les biens fonciers qu’elles doivent à la libéralité des particuliers et les dinies que les lidèles acquittent, biens et revenus qui manifestement n’ap|)artiennent pas à la royauté. Mais le pape exigera des prélats qu’ils se dessaisissent en faveur du roi de tous les regulia, c’est-à-dire des villes, châteaux, duchés, comtés, territoires, droit de frapper monnaie, droits de douane et de marché, etc. A ce compte, le roi s’engage à renoncer à l’investiture, à laisser libre les églises (voir les textes dans AVkiland, Conslitul : ones imperatorum, t. I, p. 137-141) Telle l’ut la célèbre convention de Sutri, qui à la question tant débattue donnait une solution radicale. La distinction entre les régales et le spirituel, le désir de mettre un terme à une si longue agitation en reconnaisstint ce que peuvent avoir de fondé les prétentions impériales, ont induit Pascal II à sacrifier au pouvoir laïque toute la part du temporel ecclésiastique qui relève du roi.

Le clergé allemand ne consentit pas à se laisser dépouiller. Les regalia n’appartiennent-ils pas aussi légitimement aux églises que leurs biens privés ? Les prélats estimèrent qu’une telle solution abandonnait au roi non seulement son droit mais aussi le droit de l’Eglise. Rompre, au prix des biens terrestres, les liens qui attachent le clergé à la société séculière et féodale, ce fut un instant le beau vère d’un pontife qui avait été moine. L’exécution de ce programme, si elle avait clé possible au xii’siècle, aurait exposé l’Eglise à des dangers nouveaux. La perle de leur pouvoir temporel eut laissé les prélats sans défense au sein d’une société anarchique. Au reste, la féodalité laïque elle-même n’admet jias que l’Eglise soit dépossédée au profit du roi, déjà trop puissant au gré de ses barons. Les nombreux laïques qui détiennent à titre de fiefs des terres appartenant aux évèchés, ne veulent pas s’exposer à les perdre et sont intéressés au maintien des grandes seigneuries ecclésiastiques. Aussi quand, dans la basilique de Saint-Pierre, le pape eut fait connaître ses engagemenls, des murmures éclatèrent. Non seulement les prélats, mais les seigneurs laïques s’écrièrent qu’ils rejetaient de telles conditions. Pascal, se croyant pris dans un piège, refusa de couronner l’empereur. Une bagarre s’ensuivit dans la basilique. Romains et.llemands s’entretuaient dans les rues de la ville. Henri V cpiilta Rome, emmenant le pape et les cardinaux prisonniers.

3° Le Praiilegium d’Henri V. — Après deux mois de captivité et d’angoisse, Pascal II eut un instant de faiblesse. Craignant pour la vie de ses cardinaux et de ses clercs, alin d’éviter à l’Eglise de nouveaux schismes, le pape, sous le coup de la contrainte, consentit à délivrer au roi le privilège qu’il réclamait. A condition que les élections fussent libres et non simoniaques, Henri V était autorisé, comme ses prédécesseurs, à conférer l’investiture des évèchés par la crosse et l’anneau. A ce ])rix, le pape et les membres de la curie romaine furent relâchés et l’empereur, après avoir clé couronné par Pascal, reprit la roule de l’Allemagne.

Mais les idées de réforme et de liberté, dont la papauté s’était faite le chaïupion, avaient si bien pénétré toute la clirétienlc que l’acte d’un pape a[qu’ouvant l’investiture fut immédialemenl tenu pour entaché de violence et radicalement nul. Au printemps de 11 12, Pascal II conlirma à nouveau dans un synode romain les décrets de ses prédécesseurs. Le synode déclara sans valeur « m ])rivilège extorqué par la force. C’était non pas un priyilegiunt mais un praiilegium. Le pape refusa toutefois de lancer l’analhéme contre l’empereur, comme l’eussent