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INSTRUCTION DE LA JEUNESSE

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prêtres. A Angers, on a créé récemment une chaire de philosophie scolastique, à coté des deux chaires de la faculté des lettres, qui préparent à la licence universitaire. A Lyon, l’enseignement philosophique est aux mains d’un maître illustre, Mgr Elle Blanc, qu’assiste un maître de conférences. Lille a trois chaires de philosophie scolastique et une chaire spéciale pour la préparation à la licence universitaire. Beaucoup de ces cours se transforment en livres et, par là encore, nos facultés de théologie exercent leur action sur le clergé et sur les lidéles, contribuant à répandre certaines idées, nécessaires à la défense d’une doctrine constamment attaquée. Je ne prendrai qu’un seul exemple, celui de la faculté de Toulouse, qui a été particulièrement féconde. Les recteurs ont donné l’exemple ; les deux premiers, le R. P. Caussette et Mgr de Lamotte-Tenet, par des ouvrages très distingués, destinés surtout à la formation du clergé ; le troisième, Mgr Duilhé de Saint-Projet, de qui l’^^olugie scientifique du christianisme a été traduite dans toutes les langues ; le quatrième, Mgr Batiifol, l’auteur de l’Histoire du bréviaire romain, de l’Enseignement de Jésus, des Etudes d’histoire et de théologie positive, riches de faits et de vues, et qui plus récemment a pulilié un livre excellent, très fort et très utile, sur l’Eglise naissante et le catholicisme : le cinquième enlln, Mgr Breton, qui, par un livre de profonde et pieuse théologie sur le sacritice de la messe (Le Drame éternel) et par sa Vie de Mgr Bertauld, rappelle la tradition des deux premiers recteurs A peu près tous les professeurs de la faculté de théologie de Toulouse ontapporté leur contribution à la discussion des plus graves problèmes religieux ; le P. Ramière est brillamment intervenu dans la controverse ontologique ; le P. Desjardins a publié des dissertations très appréciées sur /n Providence dans la distribution des grâces, l’équiprohabilisme, les droits de l’Eglise dans ses rapports avec les sociétés, etc., etc. ; parmi les titulaires de la chaire d’Ecriture sainte, l’abbé Thomas, mort à trente-neuf ans, a laissé divers mémoires que l’on a réunis sous le titre de Mélanges d’histoire et de littérature religieuses, et qui donnent une haute idée de son talent et de son savoir ; le P. Condamin a écrit un Commentaire d’Isaie, où sont utilisées toutes les découvertes modernes ; au P. Prat, nous devons des opuscules très substantiels : Le Code du Sinaï, la Bible et V Histoire : deux volumes sur ii’aini Paul. Le P. Eugène Portalié s’est montré dans ses écrits, et principalement dans l’admirable article sur saint Augustin, qu’il a donné au Dictionnaire de théologie, patrologiste documenté, philosophe délié, théologien vigoureux. Son successeur, M. Cavallera, s’est déjà fait connaître par un bon livre sur le Schisme d’Antioche. Dans la chaire de théologie scolastique, le P. Guillermin et le P. Pègues se sont montrés de remarquables interprètes de saint Thomas. L’abbé Gayraud, avant de devenir à la Chambre des députés le successeur de Mgr d’Hulst, avait rompu des lances à Toulouse en faveur du thomisme. Le P. Coconnier et le P. Montagne se sont attachés aux problèmes plus modernes que soulèvent la physiologie du système nerveux ou les théories contemporaines opposées à la liberté. M. Michelet a donné d’excellents travaux sur Dieu et l’agnosticisme, sur Maine de liiran, etc. L’histoire ecclésiastique, aujourd’hui représentée par M. l’abbé Saltet, l’auteur d’un volume érudil sur les liéordinations, a eu un titulaire illustre dans la personne de Mgr Douais, l’évéque actuel de Beauvais, chercheur infatigable, paléographe distingue, de qui les travaux très personnels sur l’Histoire de l’Inquisition font autorité. M. l’abbé Crouzil, docteur endroit, a dit sou mot, avec compétence et sagesse, dans presque toutes les questions

qui se sont posées dans ces dernières années à propos du droit civil ecclésiastique : les Associations, la Séparation de l’Eglise et de l’Etat, la Police du culte, les législations étrangères, etc., etc.

Dans les leçons fermées de nos Facultés, on creuse à fond les problèmes et on les traite sous toutes leurs faces pour des auditeurs du métier ; dans les cours publics on les met à portée des laïques soucieux de s’éclairer, et on leur présente, sous une forme plus accessible, les résultats acquis. Xotre ambition, — et déjà nous l’avons réalisée dans plusieurs chaires, — c’est d’avoir pour les mêmes matières le cours fermé et le cours public. Tel, à Paris, le cours des Origines chrétiennes, de l’abbé Lebreton.

C’est ainsi que, par l’importance même des questions qu’on y traite et par la diffusion de leur enseignement, les Facultés de théologie, ou pour mieux dire, de sciences sacrées, si peu désirées au début et créées à contre-cœur, sont devenues les principales ; le cai’dinal Guibert lui-même, peu de temps avant sa mort, en faisait l’aveu catégorique à Mgr d’Hulst.

L’Université catholique de Paris est, comme ilcon.venait, celle qui a le plus multiplié les cours publics ; il y en a, d’un bout à l’autre de l’année, tous les soirs : cours d’apologétique, d’histoire moderne de l’Eglise, de philosophie, d’origines chrétiennes, d’histoire des religions, d’histoire de la Révolution. On y donne aussi des Conférences sociales et on y fait, quand il y a lieu des leçons spéciales, sur tel ou tel problème qui vient à se poser devant l’opinion catholique.

Lyon et Toulouse sont entrées dans la même voie ; Lille et.Angers ont leurs extensions universitaires qui répondent en partie au même besoin.

L’accueil fait à ces divers enseignements prouve à quel point ils étaient nécessaires et souhaités. Ils sont, en effet, suivis par un grand nombre d’auditeurs, parfois, à Paris, de /jooà 500. Grâce à Dieu, le chiffre de nos étudiants, malgré tant de menaces, n’a pas diminué dansées dernières années ; mais quand il viendrait à s’abaisser, les auditeurs de nos cours publics suffiraient à justitier l’existence de notre enseignement supérieur libre. Et, de fait, en présence des attaques dont la doctrine chrétienne est l’objet et des chaires créées tout exprès par l’Etat pour la battre en brèche, où donc les chrétiens trouveraient-ils les réponses nécessaires, sinon dans les universités catholiques ? Je dis les chrétiens ; je dois ajouter nos adversaires de bonne foi, lorsqu’ils cherchent à s’éclairer ; à Paris, nous avons vu tels maîtres de l’enseignement officiel, rationalistes ou protestants, oire israélitea, s’asseoir sur nos bancs, prendre des notes et, après la leçon, conférer avec le professeur de notre Institut.

/() Conclusion. — Est-il besoin d’insister davantage’.’Je ne le pense pas. Interrogé, le 3 juin 1908, par la commission d’enquête nommée par le Sénat pour examiner le projet Maxime Lecomle, relatif à l’abrogation de la loi du la juillet iS’jô, j’ai répondu à la question : « Pensez-vous que cette loi doit être maintenue ? — Oui, elle doit l’être : i" parce que les universités catholiques représentent une liberté et une doctrine, cette grande doctrine chrétienne qui a droit à être enseignée en France dans son intégralité ; i" parce qu’elles les représentent d’une manière honorable et utile. » Il me semble que les pages qu’on vient de lire établissent le bien fondé de cette assertion et démontrent péremptoirement aux catholiques qui nous ont soutenus que leurs sacrilices n’ont pas été vains. A ces deux raisons, s’en ajoute une troisième. On ne voit pas comment et par quoi on pourrait remplacer nos universités, qui donnât