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INITIATION CHRETIENNE

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de pénétrer dans un temple ou d’entreprendre quelque fonction sacrée ; aussi, devant les maisons qui renfermaient un cadavre, plaoait-oii un vase plein d’euu lustrale, et à l’issue des funérailles chacun se soumettait encore à ui »e puriiication spéciale. Quand les Athéniens puritiêrent l’ile de Délos, tous les cercueils et tombeaux durent, conforménienl à cette lui, élre enlevés. La souillure que l’on encourait par un homicide était la même, que l’homicide fût criminel ou bien innocent et involontaire ; la pur16cation du sanjf versé avait lieu souvent par simple ablution ; mais il y avait aussi des prêtres all’ectés a ce service, comme les a Lloes » de Samothrace et les i< PsychagOjfues » de Phi^’alie d’Arcadie, et ceux-ci employaient naturellement un rite plus compliqué. Même la purification d’une ville entière ou d’un peuple pouvait paraître nécessaire, comme à Athènes après le massacre des compagnons de Cvlon, et à.rgos, après la vengeance 8au ; ^’lante exercée sur la bande de Bryas. A Athènes, on avait même coutume, à chaque asserabléedu peuple, d’asperger du sang des porcs immoles les bancs où prenaient place les citoyens.

28. Ici un champ immense s’ouvrait devant la superstition, les purifications, la t< cathartique’) oirraient à bien des gens une pro’"ession lucrative, et le grand nombre des purifications s accroissent constamment p.-ir des inventions nouvelles ; toutefois la ]>lns usitée était l’ablution avec de l’eau de nier, dont le principe salin passait pour spécialement opérant ; non seuleujent on s’y lavait, mais on y lavait les vases avant de les employer pour un saci-ifice ou une libation ; et même Pént.-lope, avant d’offrir sa prière aux dieux, coininenc ; a par la^er ses vêtements et s’iiaiiiller de nouveau. Oti racontait que des hommes qui s’étaient approchés de l’autel de Zeus sans laver leurs mains avaient et »’fiappés de moi-t par la foudre. Il y avait aussi des piirilieations où la main était enduite du sang d’un porc immolé, ou bien où l’on devait poser le pied gauche sur la peau d’un bélier sacrifié à Zeus ; on était friïtté de terie, on bien l’on faisait passer autour de soi un jeune chien ; le soufre, les oignons de mer et les oeufs servaient à des rites semblables. Les objets employés pour la purification étaient enfouis dans le sol ou jetés dans la mer…

Mais voici des souvenirs pli < respectables, ceux des mystères orphiques, auxquels ne furent pas étrangères certaines aspirations vers une puriiication de l’àine. Les tombes de l’Italie méridionale et de la Crète nous rendaient naguère des fragments d’hymnes, gravés sur des lames d’or trois ou quatre siècles avant notre ère. L’hiérophante parle ainsi à l’âme lavée, par l’initiation orphique, de la souillure transmise par les Titans au genre huiuain :

Inscriptionrs Græciæ Sicitiæ et lialiae, éd. Kaibel, n. G38 (Traduction de H. Weil, Etudrs sur Vantiqttité ifrecifue.p..76-57, Paris, 1900). Dans la demeure d’Hadès, tu trouveras à gauche une source, et près d’elle un cyprès blanc ; garde-toi des eaux de cette source, ne fûtce que pour en approcher. Tu en trouveras une autre, aux eaux fraîches et vives qui proviennent du lac de Mémoire. Des gardiens se tiennent devant. Dis : « Je suis enfant delà teri-e et du ciel étoile, mais moi je suis d’origine céleste ; vous le savez vous-mêmes. Or je suis sèche, la soif me fuit périr ; donnez-moi vite de l’eau fraîche qui coule du lac de Mémoire. » Et ils te donneront. à boire de la scarce divine ; et alors tu régneras avec les antres Héros.

Ibiti., n. 61l ; Je viens, pure issue de purs, A reine du monde infernal, b Euklès, 6 Euboulens et autres dieux immortels ! Je dt’clare appartenir ; "i votre race bienlieureuse ; mais le destin et le trait du dieu qvii lance la foudre m’ont vaincue. J’ai pris mon vol hors du cercle douloureux et pénible ; je me suis élancée d’un pied rapide vers la couronne désirée, je suis descerrdue dans le giron de la reine souveraine. — Bienheureux et fortuné, tu seras dieu et non plus mortel. — Chevreau, je suis tombé dans le lait.

Ne nous attardons pas à discuter le symbolisme assez obscur de ce chevreau tombé dans le lait, ni tant d’autres points dilliciles (étudiés en dernier lieu avec beaucoup de pénétration par M. H. Alline,

dans : Xenia, hommage international à l’Université de Grèce, p. 94-107, Athènes, 1912) ; même à supposer tout cela éclairci, la fécondité de la discipline orphique pour la vie reste douteuse. Avant d’assimiler son initiation à l’initiation chrétienne, il faudrait pouvoir assimiler son programme au programme chrétien. N’ous ne croyons pas que ces textes, ni les autres qu’on a pu découvrir, en donnent le droit. Si bienfaisant que fut le rêve d’une immortalité bienheureuse, armait-il réellement les âmes contre la tyrannie des sens ? Cette profondeur de vie morale, qui distingue le christianisme, appartenait elle à l’idéal des sectes orphiques ? Celles-ci prétendaient-elles renouveler l’homme dans son fond, l’arracher à sa mauvaise nature et l’orienter vers une vie sans tache ? El disposaient-elles pour cela de secours ellicaces ? Tant qu’on n’aura pas résolu affirmativement ces questions, on n’aura pas diminué la distance qui sépare du baptistère de Latran — ou des rives du Jourdain — toutes les sources mythologiques.

Il nous reste à indiquer, dans la littérature patristique du baptême, les aspects les plus nouveaux. Il y en a deux surtout. Les Pères popularisèrent, en les précisant, ces deux notions très fécondes : le sceau haplismat et l’illumination baptismale.

Ici encore, saint Paul avait ouvert la voie, en parlant le premier de i : j-pxyti spirituelle. Voir Hatch, Essors in Biblical greek, Oxford, 1889 ; et surtout DôLGBR, Sphragis, Paderborn, 191 1.

Le mot TpjjK/ii, sceau, empreinte, se rencontre, ainsi que le verbe if îayÇw, dans les passages suivants des épîtres :

Rom., tv, 1 1 : « Abraham reçut le sceau de la circoncision, comme sceau de la justice qu’il avait acquise par la foi, étant incirconcis. » — II Cor., i, 22 :

« Dieu nous a marqués de son sceau et il a mis dans

nos cœurs les arrhes de son Esprit. » — Eph., i, 13, 14 :

« … Après avoir entendu l’Evangile du Salut, vous

avez cru dans le Christ et vous avez été marqués du sceau de l’Esprit saint qui était promis. » — Ibicl., iv, 30 : « Ne conlristez pas l’Esprit saint de Dieu, par qui vous avez été marqués d’un sceau pour le jour de la Rédemption. » — II Tim., 11, 19 : « Le solide fondement de Dieu demeure, avec cette parole qui lui sert de sceau : Le Seigneur connaît les siens. »

Ces mots se rencontrent aussi en saint Jean, soit pour désigner le sceau de la divinité imprime au Fils de Dieu par l’union hypostatique, soit pour désigner le sceau des t’lu.s de Dieu.

lo., VI, 27 : i( Le Fils de Dieu vous donnera une nourriture d’immortalité : car Dieu le Père l’a marqué de son sceau. >i — Apec, vii, 3, 8 (les quatre anges parlent) : « Ne faites pas de mal à la terre ni à la mer ni aux arbres, jusqu’à ce que nous ayons marqué au front les serviteurs de Dieu. » (Et ils en marcpient douze mille de chaque tribu.) — Ibid., ix, 4 : « H leur fut dit (aux sauterelles sorties du puits de l’abîme) de ne pas faire de mal à l’herbe de la terre ni à aucune verdure ni à aucun arbre, mais seulement aux hommes qui n’ont pas au front le sceau de Dieu. »

Celte imnge, d’un sceau imprimé au nom de Dieu, devait paraître éminemment propre à désigner ceux que Dieu faisait siens par le baptême ; encore que l’acception scripturaire, dont nous Aenons de citer les exemples, soit notablement plus vague, les Pères ne devaient pas tarder à en apprécier les ressources et à les exploiter.

Dès le commencement du 11’siècle, saint lopfACE D’.A.NTiocnB, écrivant aux Magnésiens (v, 2), oppose en ces termes l’empreinte (/ypvjt-rr.p) de Dieu et celle du monde : « Il y a comme deux médailles, l’une de Dieu, l’autre du monde ; chacune d’elles porte son