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aux conditions présentes delà société. Liîon XIII fait mention de ces idées et de ces projets dans l’encyclique ()//iciorum ac munerum : avec une entière franchise, il rappelle les vœux exprimés par des évoques français cl allemands, il en reconnaît la légitimité, et il annonceque le butdeses nouvelles dispositions est de réformer la léffislation del’Kfïlise dans ce sens et d’en faciliter l’observation. On peut croire a priori que cet illustre Pontife, aux vues si hautes et si généreuses, si ami de la science et du progrès, n’a point manqué à sa promesse. Et de fait, si l’on examine ne fut-ce que les premiers articles de ses Diicreta jféiiéraii. i, on verra qu’il n’en est presque pas un seul qui n’introduise dans la discipline existante des adoucissements hautement appréciables : auparavant la prohibition de la seconde règle de l’Jiidex englobait tous les livres des hérésiarques ; désormais, sont défendus ceux-là seulement qui propagent l’hérésie ou le schisme, ou qui attaquent d’une façon quelconque les fondeuients mêmes de la religion (<I^^ 2) ; auparavant les ouvrages d’auteurs non catholiques, traitant ex profi-sso de religion, étaient universellemenlinterdils ; aujourd’hui, ils ne le sont plus, s’il est certain qu’ils ne contiennent rien contre la foi (or/. 3) ; en outre, les livres de même origine ne traitant pas de religion ex professa, tandis qu’ils n’étaient précédemment permis qu’après examen de l’autorité, le sont toujours, sauf le cas d’interdiction spéciale (art. i). Nous avons déjà indiqué comment, dans l’intérêt de la science, les éditions ou versions lie la Bible, dangereuses et défendues au commun des lidèles, sont permises par Léon XIII à quiconque s’occupe d’études Ihéologiques ou bibliques (arl. 5, 6, 7 et 8). On pourrait allonger la liste de ces rapprochements éloquents. Rappelons encore l’abandon, depuis la dernière édition de V Index, de toutes les condamnations in odiiim aiictoris. En présence de ces faits, il serait aussi injuste que déraisonnable d’accuser l’Eglise de se désintéresser des droits de la science et de la libre recherche. Mais si le Saint-Siège a tenu à élargir autant que possible les limites légales du champ d’investigation scientifique, il a dû pourtant maintenir les barrières indispensables pour préserver les âmes de la perdition. Si l’on veut bien sesouvenir que la loi ecclésiastique n’atteint en aucune façon les livres qui ne touchent ni à la foi ni aux mœurs, que la science n’est pas nécessairement et uniquement contenue dans ceux qui olïensent ou compromettent l’im ou l’autre de ces biens précieux, et qu’cnlin il est aisé pour quiconque s’adonne à des recherches spéciales d’obtenir l’autorisation requise, on verra combien l’Eglise laisse de latitude et accorde même de faveur au développement des connaissances humaines. Il est du reste tout naturel que cette mise au point d’unediscipline ancienne, partiellement altérée parles diflicultcsdela pratique.se soit opérée, conmie tous les changements disciplinaires qui ont eu lieu dans l’Eglise, avec une sage lenteur ; elle a été faite, comme dit la Constitution de Léon XIII, après un mûr examen « et de nombreuses consultations des cardinaux qui composent la Sacrée Congrégation de l’Index ».

Relativement aux auteurs, le reproche d’attenter à leur Icgiliuie indépendance et surtout de les embarrasser ou de les paralyser par la crainte de sentences portées comme en cachette et sournoiseuienl, n’est pas plus fondé. Pour s’en rendre compte, il suflit de considérer à la fois la composition de la Congrégation de l’Index, la procédure à laquelle elle est astreinte, la forme et la portée de sa sentence, telles qu’elles ont été et restent ofliciellement régléesparla bulle.S’o//ici^/ ac proii/la de BknoIt IV. Oulre des cardinaux en nombre variable, qui seuls, à stricte ment parler, y détiennent l’autorité et seuls prononcent la sentence définitive, la Congrégation de l’Index comprend une longue série de consulteurs, puis des référendaires ou rapporteurs, qui sont de futurs consulteurs. Tous, choisis parle Saint-Père librement et après soigneuse information, conslituent un ensemble d’hommes éndnents, habitués au maniement des affaires, d’esprits distingués ayant fait leurs preuves par des productions diverses, de compétences spéciales afTermies et allinées par l’expérience ; et leur réunion même est le gage le plus certain d’un jugement sage et modéré.

La procédure à suivre par eux a été minutieusement décrite et fixée dans toutes ses phases par cet habile canoniste qu’était Benoit XIV. Elle comprend trois parties essentiellement distinctes, et, en premier lieu, un examen préliminaire. Si, comme le supposait toujours la législation antérieure à 1908, il y a eu dénonciation du livre suspect, il incombe au secrétaire de s’informer des griefs du dénonciateur. En tout cas, et lors même que la congrégation procède d’ollice, ainsi qu’elle le peut et le doit, dans certaines circonstances, d’après la constitution Snpienti cunsilio, le même secrétaire devra faire une enquête préalable, en examinant d’abord, non pas à la légère, mais attentivement, avec deux consulteurs déterminés ])ar le cardinal préfet, si l’ouvrage paraît sujet à censure. La réponse étant allirmative, un des consulteurs, spécialement compétent dans la matière, est désigné en secret comme rapporteur. Il rédige ses remarques par écrit, en notant les pages les plus significatives. Son travail est imprimé et distribué aux autres consulteurs et aux cardinaux, qui peuvent aussiexaminer tout le dossieret l’ouvrage, mis l’un et l’autre à leur disposition. Vient ensuite la congrégation préparatoire. Elle est formée des consulteurs, qui se réunissent au moins chaque mois, sous la présidence du Maître du Sacré-Palais. Au procèsverbal, lenombre des votes conformes à celui du rapporteur est soigneusement noté, sans indication des noms des votants. A la suite de la congrégation préparatoire, la congrégation générale entre en jeu. Seuls les cardinaux en sont membres et y ont voix délibérative. Les consulteurs peuvent être admis à exposer leurs motifs ; ils doivent se retirer avant que la décision définitive soit prise à la majorité des suffrages. Leur conclusion n’est pas toujours adoptée par les cardinaux. En ce cas, ceux-ci réclament un nouvel examen et un second rapport. L’auteur n’est généralement pas admis à défendre son œuvre, ce quiadonné lieuàbiendesrécri[ninati(ms. BenoîtXIV ne les ignorait pas, et il y répond qu’il n’est pas nécessaire de le citer, parce qu’il ne s’agit ni d’ai>précier ni de condanmer sa personne ou ses intentions, mais uniquement de préserver les fidèles et d’éloigner d’eux un danger que peut créer le livre envisagé dans sa pureréalité et sa signification objective indépendamment des sentiments de celui qui l’a écrit. Que de fois d’ailleurs le mal redouté aurait le temps de se réaliser et de se répandre, s’il fallait attendre soit une comparution de l’auteur, soit la production de moyenséventuels de justilication oud’explicafion ! Néanmoins, comme on ne peut nier qu’une condamnation de la S. C. de l’Index ne soit chose pénible et ne porte quelque atteinte à la considération de l’écrivain, Benoît XIV veut que, s’il s’agit d’un autciir catholique et ayant bien mérité de l’Eglise, dont l’œuvre soit susceptible d’expurgation, on ait soin, à l’avenir comme par le passé, de l’admettre à fournir des éclaircissements ou au moins de lui assigner un défenseur d’ullice. Oans la même hypothèse, son livre ne peut être condamné qu’avec la clause res-’triclive i> donec corrigatur », et l’on doit lui laisser