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INCINERATION

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à l’assemblée de igoy, M. Georges Salomon donna ce renseignement : « D’après l’enquête faite dans plusieurs Etats par les soins de la Société anversoise de crémation, les cendres contenues dans une urne, enfermée elle-même dans une caisse de bois (lu de métal, sont expédiées par simple colis de messagerie et même par colis postal. » Tout de même, M. Salomon trouve que le respect dfi aux morts nous interdit « d’aller si avant » ; mais tel n’est pas l’avis de tous, en Angleterre, en Suéde, en Norvège, en Danemark, dans tout l’empire allemand, puisque, dans ces contrées, les nueurs publiques supportent déjà cette façon expéditive de mettre aux bagages des restes vénérés, pêle-mêle avec tous les produits du commerce et de l’industrie. Avec la mobilité de nos habitudes de vie contemporaine et l’entassement des logis urbains, il est facile, hélas 1 de prévoir ce que deviendraient, dans nombre de ménages, des urnes funéraires (cf. Rochakd, 1. c, p. g3a).

3° Caractère antireligieux de la propagande pour la crémation. — Les ennemis de l’Eglise ont très bien saisi l’influence religieuse du rite de l’inhumation. C’est, pour beaucoup des adeptes de l’incinération, le TM motif de leur propagande : à un symbolisme ils veulent substituer un aulre^ymbolisme ; au symbolisme spiritualiste et chrétien, le symbolisme matérialiste et païen. Le décret du Saint-Ollice de 1886 constatait que lespromoteurs de lacrémation étaient des hommes de foi douteuse ou aflîliés aux sociétés secrètes. Et de son côté l’archevêque de Paris, le cardinal Richard disait dans une lettre à son clergé le ai février 18yo : « Les doctrines professées par les hommes qui cherchent à mettre cet usage en honneur étaient un motif pour rendre une pareille tentative suspecte aux lidèles. Ce sont, en effet, le plus souvent des hommes ouvertement afliliés à la franc-maçonnerie, ou du moins qui ne se tiennent pas suflisamment en garde contre l’influence des sectes condamnées par l’Eglise, ou contre la séduction des erreurs répandues danslasocicté contemporaine par le naturalisme, sous le prétexte de progrès scientilique. D’ailleurs, à plus d’une reprise, les ennemis de la religion ont hautement déclare que le grand avantage de l’incinération serait d’éloigner le prêtre des funérailles et de remplacer la sépulture chrétienne par les obsèques civiles, n

Ces constatations de l’autorité ecclésiastique sont confirmées par les francs-maçons eux-mêmes. Nous lisons dans une circulaire de la secte, que reproduit MgrCholIet : « L’Egliseromainenous a porté undéfîen condamnant la crémation des corps f/ »e noire Société avait JHsqu ici propagée avecles plus beauxrésultats. Les FF.’, devraient employer tous les moyens pour répandre l’usage de la crémation. L’Eglise, en défendant de brûler les corps, allirme ses droits sur les 1 vivants et sur les morts, sur les consciences et sur .es corps, et cherche à conserver dans le vulgaire les vieilles croyances, aujourd’hui dissipées à la lumière I de la science, touchant l’àme spirituelle et la vie’future. » (H. dés Se. Ecc, t. LIV, p. 508.)

Même quand on alTecte de donner à la propagande un caractère respectueux des convictions religieuses, l’esprit véritable qui inspire les propagandistes n’arrive pas à ne pas se trahir. Ainsi, dans le rapport du 22 mai igo5, à l’Assemblée générale de la Société pour la propagation de l’incinérât ion, le rapporteur faisait observer qu’en bas de l’annonce du crématoire d’Hambourg on lit : « Toutes facilites sont fournies au clergé pour l’accomplissement des cérémonies religieuses à l’intérieur du monument. » Mais dans la même séance, le rapporteur signalait comme un succès de la cause le vote de la loi de 1904, qui retirait aux fabriques et consistoires le monopole des

pompes funèbres ; et il revendiquait pour le viceprésident de la Société l’honneur d’avoir le premier présenté le projet qui venait d’aboutir à cette loi.

4° Insuljisance des raisons alléguées pour l’incinération. — A). La principale, presque l’unique raison queronallêgueen faveur de l’incinération, est d’ordre lirgiénitjue : par leurs (iltrations, assure-t-on, et leurs émanations, les matières en putréfaction seraient un danger pour la santé publique.

Notons-le tout d’abord, il existe, dans les usages séculaires de tout le monde civilisé, une présomption des plus graves contre la réalité de ce péril. Comment la partie la plus instruite de l’humanité se serait-elle exposée si longtemps à des risques obvies et faciles à constater, alors que des peuples moins cultivés, voire des peuplades sauvages coutumières de la crémation s’en gardaient soigneusement ? Nos adversaires conviennent assez aisément que le danger est négligeable dans les cimetières de campagne, exposés le idus souvent au grand air et éloignés des habitations. Ce qu’ils prétendent dangereux, c’est la proximité des tombesagglomérées dans nos grandes villes. Mais a-t-il été prouvé que, même là, les quartiers qui avoisinent les cimetières sont régulièrement plus insalubres que les autres quartiers ? Quelles sont, en fait, les maladies, les épidémies qu’on y a constatées comme produites normalement par ce voisinage ? Si des cas isolés ont pu paraître suspects, qui justifient une sage réglementation, a-t-on vérifié, près des millions de tombes qui couvrent la face du globe, une loi, je ne dis pas constante et universelle, mais au moins fréquente, de mortalité ? Si ces constatations expérimentales font défaut, il est nécessaire, pour incriminer une pratique partout reçue, d’en démontrer la nocuité par des raisons scientifiques pcremptoires. Or cette charge de la preuve, nos adversaires ne l’ont pas remplie. Nous examinerons brièvement leurs preuves et mettrons en regard la réponse de spécialistes qualifiés.

a) Les eaujc de pluie, dit-on, en traversant les tombes, s’imprègnent de germes de corruption, et, ([uand elles arrivent aux couches imperméables, vont empoisonner les rivières et les puits. Voici la réponse des D" Lacassagne et Dubuisson, dans le Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales de DiîCiiAMBRE : u Il n’j- a pas une (de ces assertions)… qui n’ait trouvé des contradicteurs dans les hommes les plus compétents ; et, en opposant les faits aux faits et les théories aux théories, on s’aperçoit que tout ce que l’on peut conclure pour le moment est que la science est encore peu avancée sur ces questions et qu’il serait au moins téméraire de baser sur dcsaflîrmations aussi peu prouvées des modifications sociales de l’importance de celles que l’on propose. » Il n’est démontré, ajoutent les deux praticiens, ni que les eaux pénètrent jusqu’aux couches imperméables, ni, si elles y arrivent, que les principes délétères dont on les suppose imprégnées, les accompagnent jusqu’au bout, à travers le sol, « le plus parfait épurateur des eaux chargées de matières organiques », ni que les sels azotés, l’ammoniaque et autres impuretés analogues trouvées dans les puits et les rivières, proviennent des cimetières, ni enfin qu’ils y soient en assez grande quantité pour créer un véritable danger. Et à l’appui de leurs assertions, nos auteurs citent le rapport des D"^’ScuLŒsiNO. A. Durand-Claye et Prolst au II* Congrès international d’hygiène de Paris. Le 1)"^ G. HouiNKT formule des conclusions analogues et il rappelle l’observation faite par Pasteur au sujet des sources, même peu profondes, placées en contrebas des eaux fluviales et, malgré ce voisinage séculaire, protégées par le sol contre les infiltrations de particules solides les plus ténues (Revue scientifique,