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HÉRÉSIE

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prédirent une terrible peste, une disette, quelque grande calaniilc, Calixte, pour détourner la colère de Dieu, ordonna des processions à certains jours, afin que, si les hommes étaient menacés de quelque mal, Dieu le tournât uniquement contre les Turcs, ces ennemis du nom chrétien. Il ordonna en outre pour fléchir Dieu i)ar des prières assidues, de donner à midi un signal avec les cloches à tous les Udèles, alin que par leurs oraisons ils vinssenten aide à ceux qui combattaient sans trêve les Turcs. »

Observons qu’au quinzième siècle les noms : astronome, astrologue, mathématicien, avaient à peu près la même signification. Comme l’astronomie et l’astrolo "ie supposent des connaissances assez étendues en matliéiualiques, le nom commun de mathématicien n’a rien d’étonnant. Par un heureux hasard, il nous reste le jugement astronomique d’un de ces mathématiciens, dont parle Platina. C’est une lettre astrologique dcPiETuoBoxo AvooARio, professeurà l’Université de Kerrare et très adonne à l’astrologie jidiciairc. Ce document porte la date du i-) juin 1406 ; il fut trouvé par M. Celoria parmi les manuscrits de Toscanelli, qui l’avait co[iié de sa propre main. Mais ce qui nous frappe dans ce jugement astrologique, c’est que les Turcs auront à craindre de la part des Chrétiens : « quia apparel e.x parte orienlis.signilicat ipiod rex Thurcarum Umcbitde inimicis. »

Nous avons traduit supplicationes par processions : c’était le terme classique pour indiipier les processions accompagnées de prières publi([ues. C’est à tort qjie plusieurs traduisent ce mot par supplications tout court ou par litanies, au sens que nous avons l’habitude de donner à ce mot.

Nous aions commencé par admettre sans aucune réserve le récit de Platina comnæ vrai en toutes ses parties. C’est le témoignage d’un conteiuporain ; de plus, le récit ne contient rien d’intrinsèquement invraisemblable. Ce ne fut qu’après une étude plus approfondie des circonstances du temps et après une comparaison faite entre le texte du récit et les documents de même date, que la conviction s’imposa qu’il y a quelque chose d’inadmissible.

Et tout d’abord il est bien certain que les sonneries de midi n’ont pas le moindre rapport avec l’apparition de la comète. La bulle authentique nous en fournit la preuve irrécusable ; elle est conlirmée par le témoignage de tous les auteurs contemporains. Mais les processions doiil parle Platina sont-elles les nicmes que celles dont parle la bulle du’J9 juin ? En cas d’affirmative, Platina a eu tort de nous proposer cette mesure comme inspirée par la crainte de la comète. Au cas contraire, il nous semble bien étrange qu’en même temps — puisque labulle fut proclamée le 29 juin, apparente per aliquot dies cometa, et que les premières processions furent tenues le 4 juillet, pendant qu’elle était encore visible à l’œil nu — rfeiix séries de processions aient été décrétées, les unes pour détourner vers les Turcs les dangers présages par l’apparition de la comète, les autres pour obtenir le secours de Dieu dans le combat contre ces mêmes Turcs. En outre, on a à expliipier dans cette supposition :

Pourquoi Platina ne dit pas un mot des processions dont parle la bulle, bien que celles-ci, à raison de leur solcnnitéextraordinaire et dugrand concours du peuple aient dû laisseruneimpression ineffaçable dans la mémoire des contemporains ;

Pourquoi saint Antonin passe sous silence dans ses Chronica ces autres processions contre la comète, bien qu’il fasse mention de la comète et qu’il donne rénumération couqilète des prières et processions [irescrites par la bulle ;

Pourquoi de même tous les autres contemporains

qui mentionnent ou la comète ou les processions prescrites, ou toutes les deux, gardent le silence sur les prières à propos de la comète.

Ajoutons que d’une part nous n’avons pas dedonnées ollicielles sur ces processions contre la comète et que d’autre part le sens obvie du récit de Platina ne permet pasd’attribuer lesdeux mesures — sonneries des cloches et i)rocessions — à des motifs différents ; et nous aurons le droit de conclure <[ue Platina a considéré à tort la bulle comme publiée sous l’influence de la peur causée par la comète. Une telle méprise n’aurait rien d’inexplicable. L’apparition de la comète coïncidant avec la publication de la bulle, on peut croire que plusieurspersonnespeuattentives aient cru à une certaine connexion entre l’une et l’autre, et la supposition que plusieurs de ceux qui prirent part aux processions, sous l’impression de la peur, aient conjuré le Tout-Puissant de les prései’ver de la peste, de la famine ou d’autres calamités, n’a rien d’invraisemblable. Le souvenir de ces circonstances se sera présenté à l’esprit de Platina lorsqu’il écrivit son récit. Une telle hypothèse ne saurait être taxée de calomnie à l’égard d’un écrivain qui est loin de peser scrupuleusement chaque parole sur la balance de la critique, parce qu’il ne veut pas, comme le dit Gregorovius, diminuer l’intérêt de sa narration.

La plupart des historiens, depuis Platina jusqu’à Laplace, se contentent de citer avec plus ou moins d’exactitude le texte de Platina, sans se donner la peine de contrôler le récit par l’examen des documents contemporains. Nommons Calvisius (1605),

SpONUANUS (164 1), LuBIENIKTSKl(l666). Fabre (1^26),

dans sa continuation de l’Histoire ecclésiastique de Fleury, nous en offre une paraphrase plus ample. Bruvs (1^33), dans son Histoire des Papes, emprunte son récit à l’histoire de Fleurj- ; il ajoute malicieusement que le Pape prolita en habile homme de la superstition et de la crédulité des peuples. L’œuvre de Fleury étant très répandue en France, il est bien probable que Laplace et Arago ont puisé à celle source. C’est aussi l’opinion du P. Delsaulx : « Les savants qui ont complaisamment attribué à Calixte III une bulle d’excommunication et l’injonction de prières comminatoires contre la comète, auront sans doute exagéré, par mégarde ou avec intention, et interprété à leur façon ce que Fleury raconte au sujet de l’apparition de la comète en 1456 dans son Histoire ecclésiastique. .. Peu au courant des choses ecclésiastiques et des termes canoniques et liturgiques… ils en auront conclu à un exorcisme, car le terme conjurer, employé par Laplace, ne peut pas avoir d’autre signification, et à « ne excommunication lancée contre les Turcs et la comète dans des prii/res publiques. »

Amsterdam, fêle de l’Epiplianie, 1911.

J. Steix, s. J.


HÉRÉSIE.

PREMIÈRE PARTIS

I. Nature ; division. — II. Objections. — III. Réponses.

DEUXIEME PARTIE

Répression de l’hérésie. — I. Question de droit. — IL Détermination des responsabilités de l’Eglise dans la répression de l hérésie au moyen âge.

PREMIÈRE PARTIE

I. Nature de l’hérésie ; division. — On appelle hérésie, dans l’Eglise catholique, toute doctrine directement opposée à l’un des dogmes, définis ou enseignes comme divinement révélés.

On distingue l’hérésie matérielle et l’hérésie for-