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GUERISONS MIRACULEUSES

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modernes est vague et peu encourageant. RounY (op. cit., p. 92-93) cite un cas de « lupus russe » d’après la Médecine mvderiie (15-1-1900) mais la guérison est progressive. — En droit, comme nous l’avons dit aussi (cf. A’ïff^/es, 5 novembre 191 i), la reserve de M. Vourcli est plausible pour des scliismali(iues qui adorent le vrai Dieu et vénèrent sa Mère ; les faveurs du sanctuaire s’expliquent si elles répondent à des intercessions aussi louables : ce n’est pas en tant que séparés de l’Eglise que les bénéficiaires les obtiennent, et par conséquent l’on ne voit pas pourquoi leur seraient déniés des bienfaits qu’ils n’utilisent pas contre la vérité. (Cf. Albeht le Grand, loc. cit., S. Thomas, Summa TheoL, 11= II’"', 178, art. 2, invoquant S. Paul, I Cor., XIII, 2, et commenté par D. Lataste, lue. cit.. et Benoît XIV, op. cit., lib. IV, p. 1, cap. m et iv.)

IV. Dans la pratique, comment discernex" les guérisocs miraculeuses ? — En fait, la ([uestion se pose quelcjnefois à propos d’un cas connu, présumé miraculeux. Si le fait est obtenu par l’intercession d’un personnage non canonisé ni béatifié, l’enquête fait partie des procès de canonisation (voir Saints). Pour prouver que le fait est obtenu par l’intercession de la sainte Vierge ou des saints, ou par l’intervention directe de Dieu, apparaissant, par exemple, sous les traits de son Verbe incarné, l’enquête doit préciser les points suivants : a) La maladie était-elle connue ? S’il reste un doute sur son essence, était-elle du moins de nature évidemment organique ? {Luc, XIV, 2 ; xviii, 12) ; — b) Les moyens humains avaient-ils été employés ? avaient-ils échoué ? (Luc, viii, 43) ; — () La guérison al-elle été soudaine ? (Marc, I, 31 ; vii, 35 ; Matth., xii, 13) ; — A-telle présenté les caractères d’une guérison organique ? (Marc, iii, il ; Matth., iii, 13). A- 1- elle été totale ? — d) La guérison s’est-elle maintenue (yeon, v, i^), et pendant combien de temps ? Il faut en principe qu’on puisse répondre positivement à ces questions pour que l’enciuête aboutisse : encore les évêques chargés déjuger apportcnl-ils à leur verdict la considération d’éléments surnaturels (tels que prière, fruits de conversion, etc.), dont la constatation n’est pas de la compétence médicale, mais contirme la certitude du caractère miraculeux du fait jugé. Lorsque l’enquête a lieu pour signaler, par un nouvel exemple, la puissance de la Vierge immaculée au sanctuaire de Lourdes, la procédure vise à éclaircir tous les témoignages, à les idcntilier, à les ordonner, à parfaire, en un mot, l’insutlisancede l’examen médical improvisé au sanctuaire. L’intervention de Pie X à ce sujet (cf. BoissARiE, L’crinre de Lourdes, chap. xvi, et P. Teiliiard de Chardin, Les miracles de Lourdes et les Enquêtes canoniques. Etudes, 20 janvier igoy)a suscité de subtiles enquêtes, véritablement scientifiques, complétant parlesressources physiques, chimiques, bactériologiques, etc., des laboratoires et par la confrontation de témoignages cliiii(iues [ilus nombreux, les documents hâtivement recueillis au cours d’un iièlerinage. Cette procédure comporte l’avis d’un évêqneinstituant une commission composée de théologiens et de pliilosophes et nommant un médecin ex|iert, lequel s’adjoint ordinairement des confrères et s’clt’orcc de démontrer les quatre points susdits. Les théologiens èludientct discutent le rapport, questiennent les médecins sur les points les plus délicats, citent les témoins signalés par l’enquête coiiiuie compétents sur tel ou tel point de détail, puis se réunissent sous la présidence de l’évêquc dans une session où tous, médecins et théologiens, sont liés par le secret canoniciue, après serment prêté sur l’Evangile (l’e.’ccommunication est la sanction du parjure). L’évcque a seul autorité, les théologiens n’ont que

voix consultative ; l’un d’eux fait toutefois un rapport doctrinal où il présente ses conclusions d’après les certitudes ou présomptions de fait fournies par l’enquête médicale. L’évêque peut prononcer le jugement de miracle, même si l’un des points est resté douteux, par exemple s’il y a eu récidive, car la guérison même miraculeuse n’empêche pas la nature humaine de resteràl’avenir tributaire de la maladie ; mais en général la démonstration des quatre points susdits est exigée. Certains faits peuvent apparaître miraculeux dès le seuil du sanctuaire, ou dans le lieu (profane ou sacré) qui en est le théâtre ; mais, quand il s’agit d’une guérison comme lorsqu’il s’agit d’un autre fait, l’allirmation du miracle n’est pas dans les attributs des témoins laïcs. Les médecins, en particulier, ont qualité pour dire ([u’une guérison n’est pas naturelle, non pas pour dire qu’elle est miraculeuse ; encore ne peuvent-ils sans examen ni sans peine allirmer que la guérison n’est pas naturelle : car cela est rarement évident. C’est une des raisons pour lesquelles, sans doute, l’organisation médicale est le plus souvent si rudimentaire, là où les guérisons miraculeuses sont le plus invoquées. Les attaques assez injustiliées qui se produisent à ce sujet se brisentcomiilètemcntcontre les enquêtes minutieuses par lesquelles on supplée à l’insuflisance des constatations immédiates, et contre les mesures prudentes de l’épiscopat.

Certains faits récents ont été (tel le cas des fistules stercorales de Mlle Horrel en 1907) l’objet d’un rapport de ce genre et d’une semblable décision épiscopale (S. G. Mgr de Mende, igii) ; également pour le cas de sœur Julienne, de Brive, S. G. Mgr de Tulle a conclu à une guérison miraculeuse, et son jugement a été publié avec le rapport tliéologique du président de la commission (Mgr Farges) et avec le rapport scientifique du médecin expert (Brive, Imp. cathol., et Paris, Beaucliesne, 1912).

On voit que la notion de guérison miraculeuse n’est pas seulement un concept, mais une certitude basée sur des réalités actuelles, sur des vérités philosophiques éternelles (cf. A. Castelein, S. J, £e surnaturel dans les apparitions et dans les f ; uérisr>ns de Lourdes, chap. v, — et Mgr Farces, Cours de Phil. scoL, 1. 1, 4’" p-, cité par S. T., la Croix’du 10 mars 19 12), et sur des témoignages jalousement multipliés. Les membres delasociété deSainl-Lue(D’LEBKc, professeur A’iNc.ENT, D’Dauchez, Df Leroux, etc.), les professeurs de la Fac. cathol. de Lille (D" Duhet, Desl’LATs, Dei.assus, L.4.vnAND) et leurs élèves (D’ISabjlé, Plev), les médecins membres du clergé (D"’Abbé Maumus, de l’Institut Pasteur, U. P. Gemelli, ancien agrégé de Pavie, D’Abbé Ségaix) ont puissamment contribué, sous l’impulsion du président du Bureau des constatations de Lourdes (D’Boissarie) à présenter des observations scientifiquement inexpli cables, et non moins certaines, qui forcent l’attention du monde savant. Le sanctuaire de Lourdes n’est sans doute pas le seul où se produisent ces guérisons miraculeuses, mais il est certainement celui où l’étude de ces guérisons est le plus savamment et le plus régulièrement préparée. Nous n’en parler(ais pas ici plus longuement, renvoyant le lecteur à l’article Lourdes pour plus de précision. Mais nous ne saurions omettre de conclure que les guérisons miraculeuses sont un monopole, un privilège de Dieu ; que les faits qui en accréditent la notion glorifient tous l’Eglise catholique ; qu’il ne leur manque même pas, pour attirer l’attention et le respect des croyants et des incrédules, la C(Uilrefaçon intéressée, doneélo(iuenle, des puissances infernales. Dans ces conditions, les guérisons miraculeuses sont de puissants auxiliaires de l’apologétiipie. Et nous