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GRECQUE (ÉGLISE)

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L’apologiste ne peut d’ailleurs se contenter d’examiner les seules divergences mises en avant par les lliéologicns schismatiques. En dehors de celles-là, il en est d’autres, sou^ent très importantes, sur lesquelles ils ont l’habitude de faire le silence. Signalons la recontirniation des apostats, les nombreuses causes de divorce admises dans les Eglises autocéphales, la perte du pouvoir d’ordre par la déposition, etc. On ne peut pas dire que ce sont là de purs prétextes. Ce sont des doctrines pour ainsi dire vécues par la pratique courante.

Il est donc entendu qu’une œuvre doctrinale s’impose à l’égard du schisme oriental. Comment la mener ? La méthode à sui^Te ne saurait être la même à l’égard de toutes les divergences. Contrairement à la tactique habituelle des polémistes pholicns, qui attribuent une importance égale aux diiîérences rituelles et aux divergences d’ordre dogmatique, il importe extrêmement d’étaijlir une distinction très nette entre les premières et les secondes.

A. Méthode à suivre à l’égard des divergences rituelles. — Les divergences liturgiques étant le principal soutien du schisme parmi les masses populaires, l’apologiste s’attachera à montrer que la diversité des rites et des usages ne saui’ait être une cause de séparation entre les chrétiens. Il rappellera l’exemple de l’ancienne Eglise, une et indivise dans la foi. malgré la variété des liturgies et des coutumes locales. Par le témoignage vivant des Eglises orientales unies à Rome, conservant intégralement, dans tout ce qui n’est pas contraire à la foi, la liturgie et les usages des Eglises séparées, il cherchera à persuader à un peuple formaliste à l’excès et idenlitiant trop souvent son rite avec sa nationalité, qu’on peut être à la fois catholique romain par le dogme et la soumission au pape, et grec ou slave par la liturgie.

Aux innovations liturgiques reprochées par les polémistes schismatiques à l’Eglise occidentale, sur un ton de véhémence presque comique, il sera de bonne guerre d’opposer les innovations de même genre qui se sont produites dans la liturgie byzantine, depuis la séparation. Ce serait une erreur de croire que l’Eglise orientale n’a modifié en rien ses rites et ses prières, depuis le ix’siècle. Il ne faut point se laisser impressionner par certaines déclarations des théologiens orthodoxes sur l’immutabilité liturgique de leur Eglise. Ces déclarations sont aussi sujettes à caution, lorsqu’il s’agit des rites ou de la discipline, que lorsqu’il s’agit du dogme. Montrons-le par quelques exemples.

Autrefois, les fidèles orientaux communiaient sous les deux espèces de la même manière que communièrent les.-apôtres, à la dernière Ccne : ils recevaient le pain consacré sur la main et buvaient au calice. Vers le x’siècle, s’introduisit la coutuiue de mélanger l’hostie consacrée au précieux sang et de la distribuer ainsi aux comuiuniants à l’aide d’une cuiller. C’est une modification assez sensible du rite de la coujmunion. tel qu’il se pratiqua à la dernière Cène. On ne peut pas dire que les lidêles boivent le sang du Seigneur, dans le sens naturel du mot. Pourquoi, dès lors, accuser l’Eglise latine de violer le précepte du Sauveur : « Jiuvez-en tous », parce qvi’elle ne communie plus ses fidèles que sous l’espèce du pain’? On sait d’ailleurs que la communion sous une seule espèce était en usage en maintes circonstances dans l’ancienne Eglise.

Que n’ont pas écrit les polémistes latinophobes contre le baptême par infusion ? Sait-on cependant que ce baptéuie fut longtemps pratiqué en certaines régions de la Russie ? On baptisait par infusion à Pskof, au XIV* siècle, à Novgorod, au xv*. o Le rituel

de Pierre Moghila conseille de baptiser les enfants par infusion pour éviter tout danger. En beaucoup d’endroits de la Russie occidentale, conquise jadis par la Pologne et longtemps dominée par elle, les prêtres orthodoxes continuent à baptiser par infusion, malgré les timides avis du Saint-Synode. Du reste, il arrive que, même dans la grande Russie, le baptême n’est plus un bain. J’ai vii, dit le P. Baur.vi>% à qui nous empruntons ces détails, baptiser à Xotre-Dame de Kazan, à Saint-Pétersboiug. Le prêtre, de la main droite tenait le corps de l’enfant ; de la main gauche, il lui fermait les yeux, le nez et la bouche, et lui plongeait ensuite la face dans l’eau, si peu que la nuque n’était mouillée que par l’eau dont le prêtre l’arrosait ensuite de la main gauche en relevant l’enfant, et qu’aucune autre partie du corps ne participait à l’immersion » (ia vie chrétienne en /{ussie. Autour du berceau, dans la lievue Augustinienne, t. XIV (1909). p. 16-1-). Entre ce baptême à la russe et notre triple infusion, on avouera que la dilTérence n’est pas très grande.

Il n’est pas rare d’entendre les théologiens schismatiques accuser l’Eglise romaine d’avoir supprimé l’épichse (ce qu’ils n’arrivent pas à prouver), et d’avoir fait d’autres modifications et innovations dans la liturgie de la messe. Mais songent-ils alors aux additions et aux suppressions que leur Eglise a pratiquées tant dans les prières de la messe que dans celles de l’otlice ? Au ix « siècle, la messe dite de saint Jean Chrysostome portait, à son début, une épiclèse au Christ ainsi conçue : « Seigneur, notre Dieu, qui t’es otïert comme un agneau immaculé pour le salut du monde, jette les yeux sur nous, sur ce pain et sur ce calice, et fais de ceux-ci ton corps sans tache et ton sang précieux pour la réfection de nos âmes et de nos corps ! >, BniGHT.MAx, Liturgies Eastern and Western, Oxford, 1896, p, 809. Cette épiclèse a disparu depuis longtemps du missel byzantin. La cérémonie de la préparation des oblats ou ttî^ziucÔ/-. a été aussi notablement compliquée depuis le ix* siècle. L’habitude de découper des parcelles en l’honneur de la Vierge et des saints et de les rangerautour de l’hostie principale date du xii’siècle. Cf. S. Pétri-DÈs, La préparation des oblats dans le rite » rec, dans les Echos d’Orient, t. III (1900), p. 65 et sq.

Le clergé grec a supprimé plusieurs passages de l’ollice liturgique, où la primauté de saint Pierre et de son successeur l’évêque de Rome était clairement allirmée. On ne trouve plus dans les éditions actuelles des Menées le beau canon en l’honneur de saint Grégoire le Grand, qui s’y lisait autrefois et qui saluait ce pape comme le successeur du Coryphée (saint Pierre) et l’Eglise romaine comme la première des Eglises, inondant toute la terre des ruisseaux de la doctrine très orthodoxe de son chef, Ey^.Jr, 7tïij

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z-M £^711’j} ! ijTtuy S’y/aùT’M icv, XiLLEs, Kulendarium manuale utriustjue Ecclesiae, Inspruck, 1896, 1. I, p. 121. Les Grecs ont aussi fait disparaître de l’olUce de saint Léon le Grand le titre de chef de l’Eglise ortho doxe du Christ, yiyjùr, tk ; ifvciiX’yj’i/v’ir/zi-/A X, oirrîJ, donné à ce pape. Ce titre se lit encore dans les éditions slaves de Russie.

L’édition des Menées parue à Venise en 1896 a supprimé, à la fête des saints Ajiôtres Pierre et Paul, le 29 juin, deux passages allirinant la venue à Rome des deux.pôtres. Dans l’office du lendemain. 30juin, la même édition a changé la phrase suivante, adressée à saint Pierre : 1. Vous avez été le premier évéque de Home, la plus grande de toutes les c/V/e.ç i> en celle-ci : Pierre, vous avez été le docteur de l’uni> ers, le héraut et la [lierre de la foi ». Une édition oflicielle du Iliératicon ou missel, faite au Phanar, en 1896, près-