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GALLICANISME

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ilonnance des Armagnacs, revint anx négociations, et tnlin conclut en 1426 la convention de Genazzano, très large aussi povir le Saint-Siège. L’avènement d’Eugène IV et l’ouverture du concile de Bàlc lui semblèrent l’occasion de pourvoir par un règlement stable et à la détresse de l’Eglise gallicane et aux Ijesoins évidents du chef de l’Eglise universelle : il lit proposer un plan à la fois à Rome et à Bàle. Les Bàlois prirent les devants. En 1438, à Bourges, dans une assemblée du Clergé où les envoyés pontilicaux l)arlcrent vainement des droits du Saint-Siège, l’Eglise gallicane adopta quelques-unes des excellentes réformes qu’on venait de voter à Bàle (vie ecclésiastique, office divin, suppression des expectatives, etc.), en écarta quelques autres trop liosliles au Souverain Pontife (interdiction d’élever à la pourpre ses neveux), pourvut aux intérêts matériels de la curie romaine un peu plus cLicLement que ne l’avait proposé Charles VII (subventions pécuniaires, maintien de quelques réserves en faveur d’Eugène IV) et à ceux du roi (droit de recommandation dans les élections épiscopales) ; mais aussi affirma son adhésion à la doctrine de la supériorité du concile sur le pape. Conséquente avec ses principes, l’assemblée de Bourges lit demander à Bàle la conlirniation de ses décisions, et, sans avoir cure de l’approbation ou de la désapprobation pontilicale, supplia le roi d’homologuer ses règlements et d’en faire une Proj^matique sanction (7 juillet 1438). Eugène IV qualiQa l’acte d’impie, les Etals du Languedoc firent à Charles VII (au pèlerinage du Puy, avril i^Sij) de vigoureuses remontrances sur cet outrage au Saint-Siège, que réprouvait, à leur dire, la plus nombreuse, la plus saine, la plus instruite partie du clergé de France ! Pour rendre vénérable aux yeux de tous la Pragmatique de Bourges, il ne fallut rien moins que l’exhibition, à l’assemblée du Clergé de Chartres en 1450 et à celle de Bourges en i/(52, d’une prétendue Pragmatique sanction de S. Louis, presque en tout conforme à celle de 1 438 : le saint roi l’aurait faite en 1 269 contre les exactions de la cour de Rome. Rarement faussaire atteignit plus parfaitement son but : la sainteté de Louis IX garantit celle de l’acte de Bourges ; la dévotion du parlement y fut constante ; au xi.x’siècle seulement, on s’est accordé à reconnaître que le protocole de cette pièce ne peut être du xin’siècle. Quant au fond, bien qu’en 1269 S. Louis sollicitât lui-même des levées de subsides pour subvenir aux frais de la croisade de Tunis, on peut concéder que les préoccupations de son temps, la suprématie conciliaire mise à part, répondent assez bien à la teneur de ce document.

Les descendants de S. Louis, de Charles VII inclusivement jus(iu’à François I", eurent moins que les légistes le culte de la Pragmatique. Non seuleuuMit ils en violèrent l’esprit cl la lettre, n’ayant aucun scrupule de faire pourvoir leurs protégés par les papes ; mais, comme Louis XI, ils la supjjrimèrent plusieurs fois, et ne cessèrent de négocier avec Rome l>our établir un Concordat qui l’eût rendue caduque (Noël Valois, Histoire de la Pragmatique sanction de Bourges sous Charles TV/, Paris, 1906).

6) Pendant la seconde moitié du xv" siècle, dans toute la nation, le gallicanisme est en baisse. En 14Ô7, la province de Reims entière se soulève contre un décime prescrit ]iar Calixtk III, c’est la dernière grande révolte contre la liscalilé pontilicale. Les chapitres, directement lésés dans leiu’droit électoral, prolestent seulement un peu plus longtcmiis que les autres corps de l’Eglise gallicane contre les provisions de la cour de Rome ; puis ils se résignent. Les évêques, recrutés [larmi les serviteurs de la monarchie, et le plus souvent établis iiar l’accord direct du

pape et du roi, n’ont point d’hostilité contre leur bienfaiteur romain. Dans une bonne partie de la France, les doctrines ultramontaines sont hautement professées ; il est vrai que quand elles paraissent à Paris, l’Université les frappe (1508, rétractation imposée à Jacques du Moulin). C’est à l’Université de Paris qu’en 1512 Louis XII, en guerre avec Jules II, défère le De comparatione aullioritutis papæ et conci 7/( deTuo.MASDE Vio(Cajétan), paru en octobre 1511. Un docteur destiné à mourir tout jeune trois ans aiirès, Jacques Almain (1480-1515) fut chargé d’en faire une réfutation, demeurée célèbre : Pierre et les papes, enseigne le représentant de l’Ecole de Paris, ont reçu leur pouvoir immédiateinenl du Christ ; de même les autres apôtres et l’Eglise universelle. L’autorité du pontife romain, supérieure à celle de n’iraporte quel autre Odèle, est inférieure à celle de l’Eglise universelle, mère commune, maîtresse, et juge de tous ses enfants. Le pape a la suprême autorité executive. S’il recherche diligemment la vérité, il n’est pas probable que Dieu le laisse errer dans son magistère, mais on n’est jamais assuré qu’il n’ait point péché par négligence. Telle est la forme modérée du gallicanisme universitaire au début du xvis siècle. A la même date, Louis XII, cruellement joué par le pape sur le terrain politique, et jaloux d’une revanche sur le terrain doctrinal, avait bien pu trouver à Tours une assemblée de prélats et de docteurs l’autorisant à faire la guerre à Jules II et à lui soustraire, entre temps et partiellement, l’obédience de son royaume ; mais, même avec le concours des cardinaux rebelles et de l’empereur, il n’avait pu réunir à Pise ([u’un conciliabule misérable, où trois demi-douzaines de mitres, au milieu de l’indifférence générale, renouvelaient les décrets de Constance et citaient à leur barre un pape qui au moment même, ouvrait à Rome le concile général de Latranl A ce concile de Rome, les évéques de Pise, chassés sur Milan, puis dispersés, les cardinaux rebelles, le roi Louis XII lui-même seront heureux, dès la mort de Jules II, de pouvoir adhérer (cf. Imbaut de la. Tour, f.es origines de ta Hé forme, II, 126 sq.). Les doctrines gallicanes ne passionnaient plus la cliréticnté.

/) L’Eglise concordataire et l’Ai.cien Régime

1) Le Concordat de 1516 fut, en même temps qu’un triomphe pour le gallicanisme royal, la reconnaissance du bien-fondé des revendications pratiques du clergé gallican, et une déroute pour ses théories ecclésiologiqucs. A la première entrevue du aimjueur de Marignan avec Lkon X à Bologne, François I" demanda au pape de conlirmer la Pragmatiiiue sanction (le Bourges. « Au lieu d’icelle, répondit le Médicis, qu’on fasse un concordat qui serait semblable. » .insi futfail..-V l’issue des travaux, Antoine ou P «.4.T, le chancelier dont la ruse auvergnate avait la charge de débattre nos intérêts avec les diplomates romains ou florentins, pouvait écrire : « Il n’y eut d’autre différence, si ce n’est que ce qui s’appelait Pragmatique s’appelât Concordat, et que ce qui avait sa source et autorité du concile de Bàle, l’eût du concile de Latran.

« Tout l’intérêt delà coniliinaison est dans cette

dilTcrcnce : ce n’est plus un règlciiicnt fait par les prélats gallicans, mais un accord fait avec le chef de l’Eglise ; au concile de Bàle, les décrets sonlintilulés : Sacrosancta synodus… in Spirilu Sancto légitime congregata universalcm Ecclesiam repræsentans, etc. ; au concile de Latran, Léon X légifère en son propre nom, sacro approhanle concilio : à Bàle, toutes lis réformes dépendent du principe de la supériorité du concile sur le pape, au Latran, dans la bulle même