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1919

FIN DU MONDE

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gile. S. Paul, cbez qui la préoccupation escbatologique est assez fortement marquée, n’est pas, sous réserve de sa vocation à l’apostolat et de ses révélations, un disciple personnel de Jésus,

D. Conclusion. — En résumé, dans la plupart des écrits apostoliques, nous trouvons donc les deux énonciations — ne disons pas assertions — suivantes. 1° La parousie, la tin du monde, est proche. Cette énonciation est posée d’une manière assez ferme et seml)le commune à toute la première génération chrétienne. Toutefois la façon dont on la propose et dont oji la justiŒ montre clairement qu’on ne la regarde pas comme faisant partie de la doctrine expressément révélée. Elle ne représente que le sentiment personnel de ceux qui la proposent. De plus, certaines hésitations montrent suUisamment qu’ils ne la tiennent pas pour indubitable et tout à fait certaine. Ce n’est au fond qu’une opinion. Entîn la nature de cette proximité demeure très imprécise et tous font l’aveu de leur ignorance touchant la date exacte de la parousie. 2° La génération présente verra peut-être, vraisemblablement même, l’avènement glorieux du Seigneur et la lin du monde. Ce second point ne fait pas corps avec le précédent. Il est moins universel et surtout formulé avec beaucoup moins de fermeté. Il est presque excessif de parlera son sujet, non seulement d’assertion mais même d’énonciation proprement dite. L’idée dont il s’agit demeure implicite. Elle imprègne et colore certaines affirmations, sans former l’objet d’énonciations distinctes et formelles. Manifestement nous avons affaire à une simple et hésitante conjecture personnelle, qui ne va pas jusqu’à prendre la consistance d’une opinion tant soit peu ferme, à une espérance que l’on caresse, à un vœu que l’on formule timidement.

Cette conclusion, que nous nous sommes appliqué à nuancer aussi exactement que possible, a déjà été formulée par bon nombre d’auteurs catholiques justement estimés. « Cette attente de la parousie prochaine, écrit Mgr Le C.4.mus, n’est pas particulière à S. Paul, bien qu’il en ait parlé plus souvent que les autres (son œuvre littéraire est aussi plus considérable), non seulement dans ses deuxépîtresauxThessaloniciens mais I Co/-., i, 7, 8 ; iii, 13 ; iv, 5 ; v, 5 (tous ces textes sont vagues) ; vii, 29-31 ; x, 11 ; xv, 22-25 et 28 ; II Cor., v, i-io ; Héhr., x, 25 etc.Tousles apôtres la partagent, Jac., v, 7-9 ; I Pierre, i, 5, 7, 13 ; II Pierre, iii, 7-12, sans parler des discours. Actes, II, 16-20 et 40 (vague ; 16-20 distingue nettement la période messianique actuelle, caractérisée par l’effusion de l’Esprit, du « jour du Seigneur » qui est au terme d’une perspective indéterminée) ; iii, 1921 (envoi du Christ dépendant en un sens des dispositions d’Israël, cf. 11^ Pétri, iii, 12) ; I Jean, 11, 18 ; Apoc, 1, 3, 7 ; ni, 10 ; xvi, 15, etc. (je ne crois pas qu’en ces endroits de l’Apoc. la parousie soit visée). Ainsi s’explique la croyance que Jean serait encore de ce monde quand le Maître viendrait. » (L’œuvre des apôtres, II, igoS, p. 3^2, note 1. — Les remarques placées entre parenthèses sont de l’auteur du présent article. De même dans les citations du paragraphe suivant.) C’est le D’Bisping (y 1884) qui, vers 1865, à propos de I Th.. iv, 15-17, rompant avec une timidité exégétique devenue difficile à soutenir, proposa le premier l’explication qu’on A^ient de voir traduite par Mgr Le Camus et sur laquelle il revient avec plus de force encore à la page 343, note 5. Le P. CoRLUY fut un des premiers à l’adopter et on en peut lire l’exposé ferme et mesuré dans la première édition de ce Dictionnaire (1889), Fin du monde, col. 1279, 33. Cf. CoRLUY, La Seconde venue du Christ, dans La Controverse, nov. 1886, et dans La Science

catholique, avril et mai 1887. Elle tend à devenir commune parmi les exégètes catholiques.

Cet état de choses crée-t-il des dillicultés au point de vue de l’inspiration dont bénéficiaient les auteurs des écrits que nous venons d’étudier et de la garantie divine de vérité dont toutes et chacune de leurs assertions sont revêtues à nos yeux ? Si l’on se reporte à la formule des conclusions proposées plus haut, on se persuadera, je crois, qu’il n’en est rien. II ne semble pas que l’on puisse dire à propos de la première énonciation : proximité indéterminée de la parousie, qu’elle constitue proprement une erreur, ni dans ses termes ni même à raison du sens qu’y attachaient les auteurs et qui était assez vague et passablement hésitant. En ce qui concerne l’espérance de voir la parousie se produire dii vivant de la première ou de la seconde génération chrétienne, qui seule pourrait en toute rigueur faire dilliculté, répétons qu’il ne se rencontre même pas à son sujet d’énonciation formelle, de proposition distincte. Il ne jieut donc être question d’erreur enseignée sous la garantie de l’inspiralion. Le P. Prat est évidemment du même avis lorsqu’il écrit à propos de S. Paul : « S. Paul serait-il hanté ijar la perspective prochaine de la parousie ? Il ne faut pas le nier a priori. Sur ce sujet, nous l’avons dit, il n’enseigne rien et a conscience de ne rien savoir. Mais à défaut de science certaine, il pouvait avoir une opinion fondée sur des probabilités ou des conjectures, et, du moment qu’il avertit de son ignorance, qu’il se défend de rien enseigner, on ne voit pas d’impossibilité absolue à ce qu’il règle sur ces probabilités, sa conduite et ses conseils. » (Op. laud., p. 154.)De même M. le chanoine A. Cellini :

« Mais quand les hagiographes (les écrivains inspirés

) parlent en leur nom personnel (par opposition à la situation des évangélistes exposant l’enseignement de Jésus) nous sommes alors dans un cas tout différent de celui dont nous parlions il n’y a qu’un moment ; alors rien ne s’oppose à ce qu’ils puissent avoir des appréhensions, d’ailleurs sans fondement, et à ce que ces appréhensions se reflètent dans leurs écrits, ce reflet étant celui de la pensée non pas divine mais humaine. » (La Questione parusiaca, dans La Scuola Caitolica, 1907, II, p. 22 s.) Et encore M. A. Camerlynck : « Sed hoc ipso quod promissus erat Christireditus, etignotum tenipus, licebat Apostolis parousiam sperare seu augurari vicinam, seu licebat exprimere spem et possibilitatem, proxinii Christi adventus. » (Comme/ifarius in Epistolas Catholicas auctore J. A. vax Steenkiste, éd. 5^, 1909, p. 21 3.) De même F. Tillmaxx, op. laud., p. ^7 s. ; J. Belser, Die Briefe des hl. Johannes, 1906, p. 53 ; Le Camus, op. laud, II, p. 343, note 5, dont, cependant, les points de vue ou les formules demanderaient, semble-t-il, un surcroit d’explications (cf. Lagrange, Revue biblique, 1909, p. 649 s.). P.Magnien, La Résurrection des morts d’après la première Epitre aux l’hessaloniciens, Revue biblique, 1907, p. 365 sq.

III. La fin du inonde dans les Evangiles synoptiques. — Au cours des précédentes recherches, nous avons essayé, à plusieurs reprises, de déterminer la source des opinions et des sentiments que nous rencontrions touchant la proximité de la Gn du monde, et jamais nous n’avons eu l’impression que cette source fût, principalement du moins et sans nul intermédiaire ou apport nouveau et d’origine différente, l’enseignement historique, les propres paroles de Jésus. L’absence de développements eschatologiques saillants dans le Quatrième Evangile nous a frappé et nous nous sommes demandé si cette particularité ne devait pas être considérée comme révélatrice de la pensée véritable de Jésus. Il nous faut