Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 1.djvu/883

Cette page n’a pas encore été corrigée

1749

EVEQUES

1750

gage du chapitre xxi. 22. Là est rappelée une parole du Christ, qui paraît annoncer sa Aenue avant la moi’t du dernier de ses disciples : « Si je veux, dit-il en parlant du bien-aimé, qu’il demeure jusquà ce que je vienne, que t’importe ? » Sans doute, l'écrivain corrige l’interprétation excessive qui a été donnée de cette parole : le Maître na pas dit que le bien-aimé ne mourrait point. D’autre part, l'évangéliste a pu entendre que Jésus n’avait pas nécessairement prédit pour la génération présente son avènement glorieux, qu’il avait seulement parlé d’une venue préliminaire, spéciale, ordonnée à l'établissement du royaume dans sa phase terrestre, en attendant la venue pour le royaume triomphant. Il n’en est pas moins vrai qu’il met en plein relief les paroles qui concernent l’imminence de cet avènement, en leur conservant exactement leur apparence eschatologique. On Aoit lîien là encore l'écrivain soucieux de garder la réalité de l’histoire.

383. G" J.'Iiiiinanité du Christ. — N’y a-t-il pas enlin une bonne garantie de l’historicité du quatrième Evangile dans ce fait que le Sauveur, malgré qu’il soit identifié expressément dans le prologue au Verbe de Dieu et déclaré Dieu, est néanmoins appelé '( homme m (r, 30 ; iv, 29 ; vii, 46 ; aiii, 40 ; ix, 2^ ; x, 33 ; XI, 4 ;  ; xviii, 14, 17, 29 ; xix, 5), « Fils de l’homme » (r, 51 ; iii, 13, 14 ; v, 27 ; vi, 27, 54, 62 ; viii, 28 ; IX, 35 ; XII, 23, 34). présenté avec une humanité aussi réelle, aussi fortement accusée que dans les premiers Evangiles et sans qu’on lui épargne le moins du monde les infirmités, ni les humiliations, ni les souffrances, ni la mort (i, 45 ; vi, 42 ; iv, 6 ; XIII, 4-"J ; VII, 20 ; VIII, 48 ; xvni, 20, 30, 40 ; xix, i-3, 6, 15. 17-18, 28-30)? dans ce fait aussi qu’il évite de se déclarer ouvertement le Messie jusqu'à la fin de son ministère, qu’il réA'èle sa préexistence céleste avec une opportunité et une mesure remarquables, qu’il couvre enfin d’un A'érilable voile sa divinité proprement dite, jusqu'à marquer sa distinction d’avec Dieu en termes non moins surprenants que ceux des Evangiles antérieurs (xvii, 3 ; xx, 17)?

C’est donc en maints endroits et sous maints rapports, que les discours du quatrième Evangile accusent des souvenirs authentiques gardés de l’histoire et de l’enseignement de Jésus.

333. CoNCLUsiox. — Ainsi, qu’on l’envisage au point de vue des idées ou au point de vue des faits, la teneur de notre document ne contredit jias ce que nous savons par ailleurs (n" 136-185) de l’origine de l’ouvrage : elle est telle que l'écrit peut fort bien avoir été composé par l’apôtre que Jésus aimait. Les conclusions obtenues touchant l’aposlolicilé du livre gardent donc toute leur force. Or, nous avons vu que par elles-mêmes elles sont déjà décisives. C’est donc avec une définitive assurance que nous pouvons proclamer le quatrième Evangile œuvre de l’aix’itre saint Jean. Mais, par un contre-coup très logique, ce fait de l’origine johannique de notre document, en même temps qu il explique an mieux le caractère d’iiistoricité qu’il a fallu reconnaître à l’ensemble de ses récits et de ses discours, confirme d’une façon péremptoire cette historicité et nous permet d’en apprécier largement la nature et le degré.

324. Si notre Evangile est de saint Jean, c’est évidemment un document d’une importance exceptionnelle. Sans doute, l’apôtre a pu inq)rimer son cachet propre dans la manière de raconter les miracles du Sameur, dans le choix qu’il a fait des scènes évangéliques, dans le relief relatif donné aux traits qui les composent. Il est nu'-me inconteslal)le que ses comptes rendus de discours ne ])r(tendent pas reproduire la pleine réalité ; à la distance d’un demi-siècle.

il ne pouvait, sans un miracle auquel Dieu n'était nullement obligé, avoir retenu intégralement les paroles du Christ et de ses interlocuteurs, et l’on peut parfaitement penser qu’il les a exprimées plus d’une fois sous une forme qui se ressentait de l’expérience acquise et accusait le travail accompli dans ses pensées par l’elTet de ses longues méditations. Mais nous sommes ici dans le simple domaine du probable, sans qu’il soit possible de préciser dans quelle mesure le disciple a pu marquer de son empreinte la pensée originale du Maître. Rien n’est plus aisé que de formuler sur ce point une théorie générale : rien ne l’est moins que de l’appliquer au détail concret de l’Evangile.

333. A dire vrai, cette délimitation rigoureuse n’est pas nécessaire pour une juste appréciation de la valeur essentielle de notre document. S’il est l'œuvre de l’apôtre saint Jean, nous pomons avoir confiance en l’accord général de ses récits et de ses discours avec la réalité. Pour élre apologiste, l’auteur n’en est pas moins historien. Ses narrations ont beau avoir leur cachet propre, elles n’en correspondent pas moins aux faits. Ses discours peuvent porter la marque de son esjirit, ils n’en reproduisent pas moins la pensée authentique du Sauveur. Voilà ce que nous pouvons tenir pour assuré. Et c’est là ce qui fait la valeur incomparable de l’Evangile de saint Jean.

A consulter. — P. Batiffol, Th. Calmes, J. FoxTAiXE, C. Chauvin, E. Jacquier, A. Br.^ssac, op. cit. (no S34). En outre, M. Lepix, La aleiir historique du quatrième Evangile, 1910.

M. Lepin.


ÉVÊQUES. — Comme jadis au temps de la Réforme, on a beaucoup agité et débattu de nos jours la question de l’origine de l'épiscopat.

C’est en effet une thèse fondamentale de la doctrine de l’Eglise catholique que les évêques sont les successeurs des Apôtres et que le corps épiscopal. qui gouverne l’Eglise du Christ dans le monde entier, n’est pas autre chose que la continuation du collège apostolique, dont il a hérité l’autorité et les pouvoirs divins. Les èvèques, supérieurs aux simples prêtres, sont au premier rang de la hiérarchie ecclésiastique.

Les protestants en général rejettent l’autorité de l’Eglise et toute sa hiérarchie, son sacerdoce, l’origine et la succession apostoliques des èvèques et leur supériorité sur les prêtres. Ils proclament le caractère purement laïque de tous les ministres.

Les critiques libéraux ont multiplié les essais et les hypothèses pour exjjliquer la formation de l'épiscopat sans transmission du pouvoir apostolique. A leur avis, la hiérarchie tout entière n’est qu’une institution purement humaine, appelée progressivement à l’existence sous l’action combinée de divers facteurs : le besoin notamment aurait créé l’organe. Non seulement la synagogue, mais surtout les associations religieuses du monde gréco-romain auraient considérablement infiuencé l’organisation des premières communautés chrétiennes, bien que celles-ci ne reproduisent aucun tyj)C déterminé de ces associations. La constitution de l’Eglise primitive serait toute différente de celle de l’Eglise catholique ; en particulier il n’y aurait eu à l’origine ni èvèques, ni hiérarchie.

Allons donc aux sources ; dépouillons les écrits et les documents des deux premiers siècles pour y apj)r('ndre l’origine et le développement de l'épiscopal.

En guise d’introduction, il est utile de se demander si Jésus-Christ a prétendu instituer une Eglise orga-