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ÉVANGILES CANONIQUES

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Justin, I Apol., xlv, très probablement du Pasteur d’Herraas, Sim., ix, ib, peut-être même de l’Epitre aux Hébreux, ii, 3-4. Tn. Zaun, Einleitimg in das N. T., t. II, 2^ éd., 1900, i>. 227.

Au point de vue de la critique interne. — Au point de vue de la critique interne, on remarque que l'Évangile, terminé àxvi, 8, finit court : il n’a pas de conclusion. — D’un autre côté, la finale canonique ne se relie pas très bien à ce qui précède, et, avec ses phrases serrées, a l’air d’une compilation ; on a même pensé qu’elle avait été simplement extraite des parties parallèles des autres Evanj^iles. — On ne connaît pas par ailleurs d’autre finale qui olTre de meilleures garanties. La linale plus courte que présentent certains manuscrits n’a pas d’attestation aussi ancienne chez les écrivains ecclésiastiques et est communément rejetée. La finale trouvée, en 1907, par M. Freer, dans un manuscrit du y" ou du vi" siècle, acquis au Caire, et qui est identique à celle que saint Jérôme lisait en quelques manuscrits de son temps, a toutes les apparences d’une composition artificielle, fabriquée après coup. C. R. Gregory, Das Freer-Logion, 1908 ; cf. Resue bibl., 1908, p. 450-4Ô2.

Conclusion. — Dans ces conditions, — en mettant hors de question linspiration divine du morceau — que penser de son origine littéraire ? Il est possible que le texte original de saint Marc ait fini à xvi, 8 ; cela expliquerait bien que la finale actuelle manque en un si grand nombre de manuscrits anciens, sans que l’on voie à cette omission tie motif tendancieux ni de cause accidentelle possible. Le brusque arrêt de l'évangcliste a pu être motivé par une nécessité d’ordre matériel et parce qu’il se réservait de compléter ultérieurement son œuvre par le récit des apparitions du Christ que ses données premières faisaient directement entrevoir. Si l’ouvrage a été mis d’abord en circulation dans cet état, on comprend que bientôt on ait désiré le voir poiu-vu d’une conclusion sortable. Cette addition a dû être faite par un homme autorisé : elle n’est pas un simple abrégé des autres récits évangéliques, mais contient des traits spéciaux et personnels. Rien n’enqiêche qu’elle ait été rédigée par l’auteur même de l’Evangile, en supplément à sou œuvre première. En tout cas le supplément est très ancien et a été ajouté de fort bonne heure à l’ouvrage : il doit reproduire à tout le moins une tradition primitive authenticjue. Cf. Knabkms.vufu, /// Marc, 189^, p. 444-4âi ; Mangenot, art. Marc (E^'ungile de S.), dans le Dictionnaire de la Bible, t. IV, 1908, col. 725-7^5 ; Van Kastbrkn, L'épilogue canonique du II' E’angile. dans la Revue biblique, 1902, p. 240-255 ; H. B. Swete, T/ie Gospel uccording to St Mark, 1902, p. cxin ; F. Salmond, art. Mark (^Gospel of), dans le Dictionary of tfie liible. t. iii, 1900, p. 252.

48. Episode de la sueur de sang, Luc, xxii, 43 44- — Au point de vue de la critique e.rterne. — Ce passage est omis en un certain noml)re de manuscrits, entre autres A etB ; ilmanfque ilans un njanuscrit de la Vulgate préliiéronymienne, /, et dans la version sjriaciue duSinai. Au temps de saint Jérôme, Adv. Pelag., II, 16, il était absent de « la plupart des exemplaires latins et grecs ».

Par contre, le morceau se trouve dans les deux anciens manuscrits onciaux, X et D ; dans tous les manuscrits de la VuIgatc latine ; dans ceux de la Vulgate préliiéronymienne, autres que /" ; dans la version syriaque curetonienne, la Peschitto, etc. Il ligure également dans des écrits fort anciens : dans le Diatessaron de Talien, dans saint Irénée et jusque dans saint Justin, Dial., cui.

Au point de vue de la critique interne. — Si l’on compare ces versets au reste de l’Evangile ou au livre des Actes, non seulement on n’y trouve rien qui tranche sur la manière littéraire propre à saint Luc, mais au contraire on y remarque plusieurs particularités qui semblent spéciales à cet auteur. Le verbe in^yùra ne se lit que dans notre passage et dans Act., IX, 19 ; l’idée de la prière prolongée, exprimée par iy.Tîjé—sp'-yj, se retrouve d’une façon identique dans Act., XII, 5 et xxvi, 7 ; àJj.ô/ ; àk y.ù-zôi est une expression affectionnée de notre écrivain : cf. Luc, i, 11 ; ix, 31 ; xxtv, 3') ; Act., II, 3 ; vii, 2, 26, 30, 35 ; ix, 17 ; xiii, 31 ; XVI, 9 ; xxvr, 16.

Conclusion. — Il est donc probable que les deux versets ont été supprimés dans les manuscrits où ils manquent : on aura sans doute trouvé indignes du Christ cette sueur de sang qui l’accable et cet ange qui vient le réconforter. — Aussi, le passage, déclaré par Westcott-Hort interpolé, est-il maintenu comme authentique par Tischendorf, Nestlé, Scrivener. D’après M. Loisy, Les Evangiles synoptiques, 1908, t. II, p. 574, l’hypothèse d’une suppression des versets est « non moins aisée à admettre que celle d’une interpolation ». Le critique ajoute : « La considération du style et l’emploi d’expressions qui appartiennent en propre à Luc, rendent peut-être plus probable l’hypothèse de l’authenticité. »

Cf. L. C. FiLLiox, Essais d’exégèse, 1884, p. loi sq. ; E. Mangenot, Luc (Evangile de S.), dans le Dict. de la Bible, t. IV, 1908, p. 386-391 ; A. Brassac, Manuel biblique, t. III, 1910, p. 99-100.

43. Episode de la femme adultère, Jean, vii, 53-viii, II. — Difficultés objectées à son authenticité. — Ce passage manque dans les plus anciens manuscrits grecs, ceux des IV* et v" siècles, N, A, B, C ; dans les plus anciens manuscrits de la Vulgate antérieure à saint Jérôme, a, f, l, q ; de même dans les plus anciens manuscrits des versions coptes et syriaques.

Au point de vue de la critique interne, on objecte que le morceau ne se relie pas bien au contexte : dans le discours qui suit, Jésus est censé s’adresser aux mêmes interlocuteurs que précédemment, et ce sont les pharisiens qui répondent ; or les pharisiens qui accusaient la femme adultère semblent, viii, g, s'être tous retirés jusqu’au dernier. Ce qui est dit, VIII, 2-3, de Jésus assis pour enseigner dans le temple, des scribes associés aux pharisiens, paraît convenir aux Synoptiques, non au quatrième Evangile. La démarche du Sauveur au mont des Oliviers, son retour, le luatin, au temple, où la foule se presse pour l’entendre, vni, 1-2, rappelleraient également la pure tradition synoptique. M. Loisv, Le quatrième Evangile. Hjo3, p. 534-535, ajoute que ce récit ne ])eut être jolianniiiue, parce qu’il a un cachet franchement historique et, comme tel, tranche sur le synd)olisme général île notre document.

Le texte est regardé comme interpolé, par Westcott-IIorf, B. Weiss, Nestlé, IL J. lloltzmann, Loisy, et mènu> [)ar les commentateurs protestants conservaleuis, tels que Westcott, Godet, Zahn.

Preuves de l’authenticité. — Au point de vue de la critique e.rterne. — On a cepenchint de très bonnes raisons de croire à son authenticité. Au point de vue de l’histoire, il n’y a pas de conclusion bien ferme à tirer de ce que la péricope maniiue dans les plus anciens manuscrits conservés. Ces nuinuscrits sont du v' ou du iv* siècle : or, à cette époque, le morceau était lu dans le texte de saint Jean par divers auteurs ecclésiastiques. Saint Ambroise, Apol. David., Il, I ; Ep. xxvi, 2, et saint Augustin, Conjug. adult., II, 6 ; In Joan., tr. xxxui, 3-8, le tiennent pour authentique. Saint Jérôme, y/c/w, Pelag.., II, 17,