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EUCHARISTIE

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tie. — Dans ce fqui vient d’être dit, on a déjà vu comment le terme commun de l’incarnation et de l’eucharistie était l’union du Christ et des chrétiens. Cette union est très souvent décrite par les Pères, et toujours comme une union physique de notre être entier, et en particulier de notre chair avec la chair du Christ : S. Irénée, Adv. hæres, V, ii, 2-3 ; S. Cyrille DE JÉRUS., Catech. mrst., iv, 3, 5 ; S. IIilaire, De trinit., VIII, 13-17 (P., L., X, a^ô-a/lg) ; S. Grégoire DE Nysse, Orat. catech., xxxvii (P. G., XLV, g^, cf. 97) ; S. Jean Chrysostome, In Mattli. hom. lxxxii {P. G., LYIII, 7/J3) ; In loan. hom., xlvi(L1X, 260) ; In I Cor. hom. xxiv LXI, 200-201), etc. ; cf. A. Nægle, Die Euchavistielehre des hl. Joh. Chrysost. (Freiburg i. Br., 1900). p. 288-262 ; S. Cyrille d’Alex., In loan., VI, 50 (P. G., LXXIII, 577-580), cf. ib.. V, 35 (520521) ; 55 (581) ; 57 (58^ ; XV, i LXXIV, 237-34’»)- etc. ; cf. E. ^VEIGL, Die Ileilslehre des hl. Cyrill von Alex. (Mainz, 1905), p. 203-221 ; J.Maué, art. cité ; A.Struck-MAXX, Die Euchavistielehre des hl. Cyrill von Alex., (Paderborn, 1910), p. 1^2-1 58.

Tous ces textes ne font que développer la doctrine contenue dans le discours eucharistique du Christ, mais ils le font dans le sens le plus réaliste : par l’eucharislie, le chrétien devient membre du Christ (S. Irénée. s ! Chrysostome), « concorporel etconsan"uin » (7^77wyo ; y.y.l ^yjy.iu.oî) avec lui (S. Cyrille de Jérusalem ) ; il n’y a pas là seulement une union morale par la grâce, la foi, la charité, mais une union proprement physique (S. Hilaire, S. Chrysostome, S. Cyrille d’Alexandrie) ; le corps du Christ s’unit à notre corps comme un remède contre la mort (S. Ignace, Eph., xx, 2), comme une semence d’immortalité (S. Irénée), comme un ferment qui, mêlé à la masse, la fera lever tout entière (S. Grégoire de Nysse, S. Jean Chrys., S. Cyrille d’Alex.). Aussi ces Pères répètent-ils avec force l’enseignement du Christ : sans cette union viviliante avec la chair du Seigneur, il ne peut y avoir ni vie éternelle ni résurrection glorieuse (on expliquera ci-dessous dans quel sens il faut entendre cette nécessité).

S’il en était besoin, on pourrait conlirmer les arguments précédents en montrant comment, dans leurs controverses avec les hérétiques, les Pères se sont servis du dogme eucharisticfue comme d’une vérité universellement reconnue. C’est ainsi que s’en sont servis, contre les gnostiques, S. Irénée, Adv. hær., IV, xviii, 3-4 ; IV, xxxiii, 2 ; V, 11, 2-3 ; contre les Marcionites, Tertcllien, Adv. Marc, I, xiv (P. L., II, 262) ; IV, xlII, 460) ; V, viiiII, 489) ; contre les Ariens, S. Hilaire, De Trinitate, VIII, 13-17 (P. L., X, 245249), S.Cyrille d’Alex., In lo., XV, 1 (P. G., LXXIV, 34*1) ; contre les Donatistes, S. Optât, De schism. Donat., VI, 1 (P. L., XI, io63 sqq.) ; contre Xestorius, S. Cyrille, Adv. Nestor., IV LXXVI, 192-193). Anathem. XI LXXVII, 121) ; contre les monophysites, S. LÉON, Serm. xci, 3 (P. L., LIV, 452), etc.

Aux conclusions ainsi établies la principale objection qu’on peut opposer se tire des expressions en apparence symboliques par lesquelles un certain nombre de Pères, surtout au m’et au iv’siècles, désignent l’eucharistie : elle est pour eux « l’image », ’( la ressemblance », « l’antitype », « la figure » du corps du Christ.

Ainsi, parmi les Pères grecs, ORiGÉNE, /n3/rt///<. tom. XI, 14 (P. G., XIII, 952 A) ; Adamantius, De recta in Detim fide, v, 6 éd. v. d. Sande (Leipzig, 1901), p. 184, 16) ; Euséhe, De dem. evang., i, 10 (P. G., XXII, 89 D), VIII, I (596 A) ; S. EusTATHE, ap. conc. Nie. II, act. vi (Cavallera, S. Eustathii homilia (Paris, igoS), p. 79, 80) ; SÉRArioN, Anaphore, iii, 12-14 ; S. Cyrille de

JÉRUS., Catech. niyst., iv, 3 ; v, 20 ; Macaire, /<o/h.xxvii, 17 (P. G., XXXIV, 705) ; Constit. apost., V, xiv, 7 ; VI, xxiii, 5 ; VI, XXX, 2 ; VII, xxv, 4 ; S. Epiphane, Hær. Lv, G (P. G., XLI, 981 A) ; S. Grégoire de Xazianze, Orat. viii, 18 (P. G., XXXV, 809 D) ; cf. Orat. 11, 90 (497 ^)’^rat. XVII, 12 (980 B) ; 5. Grégoire DE Nysse, Adv. Etinom., xi (P. G., XLV, 880 B) ; S. Jean Chrysostome, In Matth. hom. lxxxii, i LVIII, 739) ; S. Cyrille d’Alex., //j loan., XII, xx, 26 LXXIV, 725 D) ; Théodoret, in I Cor., xi, 26 LXXXII, 317 A).

Chez les Latins on rencontre, quoique plus rarement, des expressions semblables : Tertullien, adv. Marc, IV. lx (P. G., II. 460) ; S. Jérôme, In Jerem., XXXI, 10 XXIV, 875 D), cf. adv. Jovin., II, 17 XXIII, 3Il A) ; Ps. Amuroise, Z>e sacramentis, i, 5, 21 XVI, 443 B) ; Gaudentius de Brescia, Serm. xix (XX. 989 C) ; S. Augustin, Enarr. in ps. iii, 1 XXXVI, 78) ; Contra Adimant., xii, 3 (XLIl, 144) ; S. Gélase, Tract.

I, 14 (éd. Thiel, p. 541). Sur tous ces textes cf. Pusey, Tlæ real présence, note I, p. g4-118 ; Batiffol, VEucharistie. p. 198-210. 216, 300-304.

Les noms seuls des Pères qui viennent d’être cités suffisent à montrer que ces locutions sont conciliables avec la foi en la présence réelle ; en face des déclarations si explicites et si formelles de S. Cyrille de Jérusalem, de S. Grégoire de Nysse, de S. Jean Chrysostome, de S. Cyrille d’Alexandrie, ou de l’auteur du De Sacramentis, nul historien ne peut douter de leur croyance ; il faut donc reconnaître que le symbolisme de ces expressions n’exclut pas la réalité du corps du Christ, et en etïet, si on se reporte aux textes cités, on y trouvera seulement une doctrine sacramentelle, suggérée par l’analogie des autres sacrements et, dans l’Eucharistie même, très légitime : ce qu’on voit dans le sacrement est le signe et le symbole du don invisible qu’on reçoit ; ainsi en est-il dans l’Eucharistie ; ce qu’on voit du pain et du vin consacrés est le signe et le symbole du corps du Christ ; ce symbolisme n’implique ni n’exclut la présence du corps du Christ sous ces apparences ; et, cette présence étant prouvée d’ailleurs, ce symbolisme n’3' contredit en rien. Cf. Bossuet, Exposition, xiii.

Certains Pères introduisent dans l’interprétation de l’Eucharistie un symbolisme tout différent : ils voient non plus dans les espèces sensibles, mais dans le corps du Christ lui-même le symbole d’une autre réalité, par exemple de la doctrine du Verbe, ou du corps mystique du Christ, c’est-à-dire de l’Eglise. De ces deux interprétations la première a été développée par Origène {fn loan., tom. xxxii, 16 (éd. Preuschen, p. 467) ; in Vh/jj., xvii, 9 (P. G., XII, 701) ; In Matth. /o/ «. xi. 14 (P. G., XIII, 948-952) ; cf. Struckmann. Z. /., p. 158194) et adoptée par plusieurs autres Pères : Eusèbe, Eccles. theol., 111, 11-12 (éd. Klostermann, p. 167-169) : S. BXS11.E, Epist. viii, 4 (P- G., XXXll, 253) ; S. Hilaire. In psalm. cxxvii, 10 (P. L., IX, 709), cf. In psalm. Lxviii, 19(482), //( Matth., xiv. 10-11 (1000) ; S. Am-BROisE, In Luc. X, 49 XV, 1816) ; S. Jérôme, // ; Eccles. m, 13 XXIII, 1039). cf. In Is. lxvi, 17 XXIV, 666). L’interprétation qui voit dans l’Eucharistie le corps mystique du Christ, l’Eglise, se trouve déjà chez saint Paul (I Cor., x. 17) ; elle est particulièrement chère à saint Augustin (cf. Portalié, art. Augustin, dans le Dict. de théol., i, col. 2424-2426 ; K. Adam, Die Eucharistielehre des hl. Augustin, p. 152 sqq.).

Not. a) De la communion sous une seule espèce. — Dans l’antiquité chrétienne, la communion était administrée généralement sous les deux espèces. Cependant on constate déjà chez Tertullien l’usage de la réserve et de la communion sous la seule espèce du pain : De orat., xix (P. L., i, i 181 sq.) ; Ad uxor.,

II, 5 I, 1296) ; on le retrouve chez S. Cyprien, De