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EPIGRAPIIIE

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bien peu de choses de l’Asie Mineure de Paul, d’Ignace d’Antioche, des grands Cappadociens. Il sullit de parcourir les Cities and Bislioprlcs ofPhrygia, ou V Ilistovical Geography of Asia Mliior, pour toucher du doigt l’importance de la contribution des inscriptions à la connaissance des églises de cette province. Détails, si l’on veut ; mais, en histoire, n’y a-t-il que les grandes lignes ? Cf. encore, à titre d’exemple, Ramsay, Luke the physician and other slitdies in the history of religion (iç^oS) : The chitrch of Lycaonia in the fourtli century, p. 329-/410.

Dans d’autres églises, des traditions locales ont suppléé l’histoire ; sur ce fond peu sûr, les légendes ont entrecroisé leur végétation parasite. Faire la part de la vérité serait souvent bien ardu, si, de-ci, de-là, une inscription, un nom d’évêque relevé sur une dalle funéraire, la date d’une église ou d’un tomlieau ne venaient fournir à l’histoire des appuis solides. L’épreuve a été tentée utilement pour la Dalmatie. Cf.ZmLi.ER, Bei>. d’hist.et de litt. relig., Xl, p. 198-218 ; 385-40’j et Les origines chrétiennes de la province romaine de Dalmatie, 1906 ; et les articles du P. De-LEHAYE cités plus liaut, col. 1449- La légende des 1 1.000 A’ierges de l’église de Cologne, compagnes de Stc Ursule, change bien d’aspect à la lumière de l’inscription de Clematius, qui nous reporte peut-être au milieu du iv" siècle. Voir l’article de dom G. Mo-RiN, Mélanges Paul Fabre, 1902, p. 51-64.

L’apport des monuments se réduisit-il à évincer de fausses traditions, ce serait déjà un avantage appréciable ; heureusement, nous leur devons surtout des données positives nouvelles qui enrichissent d’autant nos connaissances.

Nombre de textes viennent ajouter des noms aux fastes épiscopaux qui peu à peu se complètent ; d’autres nous révèlent l’identité d’évèchés dont le nom sevd nous était pai-venu dans des souscriptions conciliaires. L’histoire et la géographie ecclésiastiques enregistrent ces résultats et, de jour en jour, nous acquérons une connaissance plus précise des églises dont la fortune était liée à celle des métropoles.

Nidle part l’acquis n’a été plus important en cette matière qu’en Orient, Asie, Syrie et Arabie ; cf. Ramsa y, Waddington, BuuENNOw.Ces églises avaient un clergé dont la hiérarchie était plus ou moins complète ; quelqiies-unes vivaient d’une vie chrétienne très rudimentaire ; dans d’autres, l’essor Aers la perfection avait donné naissance à des institutions monastiques. Or, si les inscriptions de l’Occident latin nous font connaître une hiérarchie absolument complète, du lecteur et des humbles minorés aux évêques, archevêques et au pape, des couvents de religieux des deux sexes (cf. Le Blant, Recueil et Nouv. Recueil, passim ; Syxtus, p. 175-228 ; Diehl, n"" 17-92), il ne nous est pas indifTérent de retrouver pour l’Orient des renseignements parallèles. Ainsi la hiérarchie syrienne — métropolites, archevêques, évêques, chorévcques, périodeutes, archiprétres, prêtres, archidiacres, diacres, sous-diacres, acolytes, lecteurs — peu à peu apparaît, grâce à l’apport incessant des documents épigraphiques ; la connaissance du monachisine égyptien, syrien, asiatique s’enrichit de tous les textes qui nous font découvrir monastères et laures, abbés, archimandrites, higoumènes, moines, anachorètes, abbesses, moniales, diaconesses, et jusqu à ces femmes stylites que la renommée de S. Siméon embrasait d’une émulation inconsidérée. Voir index de Prentice, de Waddington, de Lefebvre ; sur les femmes stylites, Res’. Etudes grecques, 1904, p. 882 ; Anal. Boll., XXVII, p. 891-892.

e) Vie morale chrétienne. — C’est le sort des hum ides de disparaîtiNe sans laisser de traces : les annales’ne retiennent rien ni de leurs vertus ni de leurs souffrances. Cependant, plus encore que les personnages dont l’historien se préoccupe, les petits doivent avoir leur place dans la peinture du christianisme, qui est avant tout celle d’une immense transformation morale et de la religion des humbles et des doux. On conçoit donc le prix qu’auront les moindres’documents qui nous permettront de retrouver quelque chose de la physionomie des anciennes générations chrétiennes. Ces documents sont nombreux ; car, pour qui sait les interroger, les plus brèves épitaphes sont des témoignages du plus haut intérêt. On y retrouve l’empreinte des vertus morales comme des tra^œrs de ceux qui les ont fait graver ou y ont essayé eux-mêmes leur main inhabile ; sur ^i ces marbres soignés ou ces tessons frustes, un jour, / s’est fixée une pensée, un sentiment, une aspiration, ^’et, après quinze ou seize siècles, nous les retrouvons f aussi réels, aussi vivants, aussi émus.’(

On pourrait essayer des dépouillements régionaux, * classer ces menus faits d’àmes, confronter ces traits dispersés, et l’on verrait, sous la diversité des profils, se dessiner la physionomie du « chrétien » qui s’opposerait nettement à l’àme païenne. Mais c’est là une étude qu’il faut se contenter d’avoir indiquée. On se bornera à noter ici quelques détails assez généraux pour donner, à défaut du portrait, une esquisse morale des âmes chrétiennes telles qu’elles apparaissent dans les inscriptions. Deux traits surtout sont à retenir : les vertus morales et la conception de la mort ; ils nous montreront le changement opéré par la foi dans la vie pratiiiue et dans une des conceptions les plus fondamentales.

« ) Vertus morales. — Les A^ertus morales n’ont pas

manqué totalement dans le paganisme. Cependant il faut avouer que quelques-unes y sont bien rares, que d’autres y ont été inconnues. Parmi les chrétiens, bien au contraire, les belles âmes ne sont plus l’exception, c’est la foule. Ce qui, dans l’âge antérieur, semblait l’apanage exclusif de quelques personnalités plus hautes, de quelques caractères assez trempés pour retenir quelque chose de la rectitude naturelle, cela, dans le christianisme, se retrouve dans toutes les âmes simples et dioites : la transformation serait inexplicable, si l’on ignorait que Jésus a passé et que sa grâce demeure.

Les atTections familiales elles-mêmes se sont purifiées : les cœurs chrétiens semblent AÙbrer plus profondément, l’amour est plus touchant, plus ému, on le sent plus vrai et moins égoïste. Le sentiment de la solidarité humaine, devenu plus pénétrant avec les enseignements de l’Evangile, montre des frères dans tous les hommes. Ce sentiment de fraternité se traduit par la charité sous toutes ses formes : amour du prochain, esprit de conciliation, patience, douceur ; pitié pour les esclaves, ces « humbles amis » (Sénèque, Ep. xLvii, 1) devenus de Arais frères ; œuvres de miséricorde, hospitalité, aumône, rachat des captifs sont des traits ifui réapparaissent souvent dans les inscriptions, cf. Le Blant, n°’406, ! ’], 586 ; 197, 6^5, /)83, 5’48, 25, 450, 37(5, 879. Ainsi l’épitaphe du marchand Agapus (Le Blant, n° 4 ?) nous apprend qu’il fut la consolation des affligés et le refuge des pauvres, aimé de tous il visita assidûment les sépultures des saints et pratiqua l’aumône et la prière ; Viliaric (ibid., n" 386) est appelé pater pauperorum ; Epæphanius (ibid., n" ^07) était carus pauperebus ; d’une chrétienne, nous apprenons (ibid., n" 450) qvCelle élsiit omnibus cara, pauperebus pia, mancipus benigna : la bonne Eugenia fut plus généreuse encore : captii’os opihus vinclis luxavit iniquis (ibid., n° 543) Ces A-ertus, les païens les comprenaient

ils les