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ENFANCE (CRIMINALITÉ DE L’)

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pétentes affirment qu’en accord avec ces mêmes instructions relativement récentes, un grand nombre d’adolescents sont, à la suite d’un acte donnant lieu à une plainte, mandés devant le procureur de la République, réprimandés et innnédiatenient rendus à leur famille, sans que cette comparution laisse, cette fois, aucune espèce de trace. On estime que le nombre de ces derniers pourrait l)ien être égal ou supérieur au précédent…

<( En juillet 1909, un fonctionnaire de la Préfecture de police communiciuail au Comité de défense des enfants traduits en justice, un tableau d’où il ressortait que, de 1906 à 1907, le nombre des arrestations de mineurs dans Paris et le département de la Seine s’était accru de 31 0/0.

! Quels étaient les caractères principaux de cette

aggravation ? On ne signalait rien qui put faire croire à un développement inusité des tentations de la misère, rien qui démentît ce que tant de gens attendent de l’extension si considéraljle des services de l’Assistance publique. En revanche, les actes publics d’immoralité de jeunes garçons sur d’autues jeunes garçons avaient quadruplé, et le nombre des souteneurs mineurs (mineurs, remarquons-le bien, car il ne s’agit que de ceux-là), qui avaient été, non pas connus ou soupçonnés, mais arrêtés, avait, en une seule année, augmenté de 52 °/„. »

Il y a une criminalité de l’adolescence, qui est telle moins par la résistance aux conditions contemporaines de la vie sociale ciue par une inqjuissance fâcheuse à les redresser là où elles méritent de l’être.

Cette criminalité s’accroît. On observe surtout un accroissement des formes graves et un accroissement de la récidive ; le mal est encore plus grand qu’il n’apparaît à une lecture superficielle des statistiques ; en effet, voyant leur attention retenue par les actes les plus dangereux ou les plus scandaleux de la jeunesse dévoyée, les pouvoirs publics négligent trop les délinquants moins coupables ou plus habiles à dissinniler. La statistique seule n’explique rien. Des concomitances qu’elle découvre, on ne peut déduire avec sûreté l’action d’un phénomène sur un autre, si l’on n’est guidé dans l’étude de ces phénomènes et de leur nature par la connaissance de l’homme intérieur. Ainsi, l’hérédité morbide engendre la pauA reté organique, plus dangereuse que la pauvreté des moyens extérieurs d’existence. Au regard de l’éducation, il faut mettre en ligne la négligence des parents, les défaillances de l’éducation scolaire, la disparition de tout refrénement par l’opinion puljlique et la ruine de l’éducation professionnelle. Vientensuile, non plus l’absence d’une éducation pour le bien, mais l’action d’une éducation pour le nuil, dont sont responsables lapornographie contenqjoraine et les facilités laissées, sinon offertes, à des vices de toute nature. La dissolution sociale résulte de la progression des crimes, des délits, des suicides des adolescents, de la confiance aveugle et dangereuse que l’adolescent met de plus en plus en lui-même, du prétendu droit ([u’il revendique à la satisfaction de tous ses appétits. Les plus bruyants amis de l’enseignement laïinu> nuilliplient, d’ailleurs, les cris d’alarme. La Luuldue parle des

« statisti(pies sur la criminalité iiifaiilile, tous les

jours plus inquiétantes, du dével()[>|)ement atteint, en ces dernières années, par la précocité des criminels » (n"" des 30 septembre, 7 décemi)re 1908).

La Petite Uépiibiique, dans un article du 5 septembre 1908, dit : « L’accroissement delà criminalité juvénile s’accuse si inquiétant que tout le monde se préoccupe de découvrir les moyens proi>res à arrêter ce danger », et conclut à rélai)lissi’meiil, comme aux Etats-Unis, de tribunaux spéciatix i)our enfants. La Lanterne (15 janvier 1908), à la suite du cri de

guerre : « Défendons la laïque contre l’Institut », préconise, sans d’ailleurs la justifier autrement, la solution, socialiste, de V enseignement obligatoire.

Mais rien ne vaut les aveux des chefs de l’Eglise athée et nihiliste, dont tant d’instituteurs sont les prêtres fanatiques. M. Buisson n’a-t-il pas écrit ces lignes terriblement curieuses dans leur précision cynique ? « C’est l’expérience la plus hardie que jamais peuple ait faite sur lui-même : car nous nous sommes privés de ce résidu inqjalpable, de ce minimum de religiosité difluse que la petite Démocratie helvétique et la grande République américaine ont soigneusement gardé. » (Congrès international d’éducation morale, tenu à Londres les 27 et 28 septembre 1908.)

IL Progression de la criminalité. — Elle est attestée par des criminalistes, des juges d’instruction, des écrivains compétents, par des statistiques qui veulent être creusées et approfondies.

I" Témoignages. — M. l’abbé Bertrin fait cette constatation : « Dix ans après la fondation de l’enseignement prétendu neutre, dès 1892, au lieu de 16.000 criminels au-dessous delà vingtième année que Ton comptaiten 1882, les statistiques oflicielles durent en enregistrer 41.000 : f/eHx fois et demie plus, et davantage encore. Dans une seule année de cette période, sur 26.000 malfaiteurs arrêtés à Paris, 16.000, près des deux tiers, n’avaient pas vingt ans. » (Resuc prat. d’Apolog. Immoralité de la morale indépendante, dans livraison du 15 nov, 1900, p. 162.)

Un avocat général, présentement ministre du Commerce, M. Cruppi, requérant contre un de ces précoces criminels, put dire en pleine audience : « Aujourd’hui, tous les grands crimes sont commis par des adolescents. » (Même revue et même livr.) — Un juge d’instruction au tribunal de la Seine, M. Guillot, a dégagé la conséquence de la morale nouvelle, aussi nettement que possible, dans un ouvrage appelé à un grand retentissement : « Il ne peut échapper à aucun homme sérieux que celle effrayante augmentation de la criminalité a coïncidé avec les changements introduits dans l’organisation de l’enseignement public. »

M. L. Aliîanel. un auti-e juge d’instruction, a écrit, dans un rapport fait en collaboration avec le docteur Legras, expert : « La criminalité augmente […L’accroissement de cette criminalité porte tout particulièrement sur les jeunes gens compris entre treize et vingt et un ans. Ainsi, de 1826 à 1880, le nombre des adultes poursuivis pour délits de droit commun a triplé, mais celui des inculpés de seize à vingt et un a c/iiadruplé, et celui des jeunes filles a. presque triplé. Mais à Paris, de 1880 à 1898, l’augmentation des jeunes gens poursuivis s’est régulièrement accenluée ; plus de la moitié des individus arrêtés avaient inoins de vingt ans, et presque tous avaient commis des fautes graves ; en une seule année, celle de 1880, par exemple : 30 assassinats, 89 homicides, 3 parricides, 2 empoisonnements, 184 infaiilicides, 4-3 12 coups et blessures, 25 incendies, 153 viols, 80 attentats à la pudeur, 458 vols qualifiés, 11.862 vols simples, doivent être inscrits à l’actif des jeunes gens compris dans les limites d’âge rpicnous avons indiciuées. En 1894, sur 40.000 mineurs, délinquanlset criminels, il y en avait 32.849 de seize à vingt et un ans. La slalisti(]ue de 1895 constate que 554 jeunes gens de seize à vingt et un ans ont été poursuivis en assises, et leurs crimes se répartissent ainsi : 32 assassinats, 20 meurtres, 3 i)arricides, 44 infanticides, 2 empoisonnements, 91 viols et attentats à la pudeur, 7 avorteinents ; en outre, 35.387’"ndres jeunes gens du même âge passaient devant le tri])unal correctionnel. D’une année à l’autre, l’augmenlalion a donc été de 35.941 moins