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DOGME

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gnage ijrésenle ainsi des degrés, l’assentinient qu’il appelle en comporte également.

De plus, il est reçu qu’une parole de l’autorité n’oblige qu’en son sens strict. On suppose, en effet, qu’elle n’intervient sur le terrain de la liberté, qu’autant qu’il est nécessaire, et donc quelle n’exige pas plus que ce quelle demande formellement.

Entin, le principe précédent va pratiquement à dénier à ceux qui parlent le droit de ne dire que ce qu’ils veulent, et sui)pose gratuitement que toutes les têtes humaines sont logiques, ou ont voulu l’être.

On objectera que Dieu est la logique même et que la remarque vaut, au moins, à son sujet. Ce serait exact, si nous pouvions connaître la pensée divine avec l’intelligence divine, mais en fait, c’est par le raisonnement humain que nous parvenons à l’interpréter.

Si l’on répond que ce motif d’hésitation cesse, quand l’Eglise infaillible garantit la valeur de ces raisonnements, il convient de distinguer trois cas :

« ) Ou la vérité nouvelle est tirée par syllogisme

de deux prémisses révélées ;

, î) Ou Tune des prémisses est soit l’énoncé d’un cas particulier é^’idemment contenu dans l’autre prémisse uniA erselle (v. g. tout homme naît avec le péché originel ; or S. Joseph est homme…), soit la traduction és’idente dun des termes (v. g. le Christ est vraiment homme, or tout homme a une volonté…) ; /) Ou l’une des prémisses est une vérité naturelle, plus ou moins systématique et contestable. Il devient aisé de conclure :

c.) Dans le i" cas, la proposition déduite est révélée {implicite >iitualiter), puisque les deux prémisses révélées ne s’accordent entre elles, et donc ne peuvent demeurer acquises, qu’à condition qu’elle soit vraie ;

.3) Dans le 2’cas, la proposition déduite est révélée {implicite formalitei), puisque le sjllogisme qui la nu

ifeste est purement expositif : ce qui est dit de toutes les parties eut dit équi’alemineiU de chacune ; /) Dans le 3’= cas, le raisonnement avertit seulement d’un lien entre les deux ordres de connaissance, naturel et surnaturel.

Dans les deux premiers cas, il y a donc matière à un acte de foi, si nous recevons cette vérité, non à cause de l’opération logique qui l’a dégagée, mais en raison de l’autorité divine, avec qui elle l’a montrée en relation et dont l’Eglise garantit la présence ; Sua-REZ, De pde, disp. iii, sect. 11, 11. 5 sq.

Dans le second cas, si la déduction est légitime, tout ce qu’on jjcut dire, c’est que la vérité nouvelle est en rapport certain avec la a érité révélée ; elle se trouve à ce titre sinon dans la révélation, du moins sur les confins de la révélation. Sullit-il que l’Eglise garantisse cette constatation, i)ovu’que cette vérité soitconsidérée comme révélée ? C’est là une question controversée, les uns préférant dire que cette vérité relèvera proprement de in. foi catholique. S. Schiffim, Tractatus de yirtutibus infusis, in-8°, Friljourg-en-Br. , 1904, I ». 213-231 ; les autres de la foi ecclésiastique, Ch. Pescu, De’irtulibus in f^enere. 2’éd., in-8°, Fribourg-en-Br., igoo, n. 256, 264, 2^)5, 2O9, 2^3, s(|. Nous n’axons pas à encombrer ces pages de notre opinion personnelle. Au d( ! meurant, tous s’accordent :

« ) à rccpiérir pour de telles décisions un assentiment

intellectuel intérieur ;  ; S) à reconnaître que par cette voie s’accroît réellement, sinon la somme des vérités objectives, du moins la connaissance sultjective <|ue nous en avons ; /) qu’avant toute déliiiition du magistère ecclésiastique, il demeure nécessaire de ne pas confondre ces conclusions avec les vérités révélées, pour les motifs que nous avons dits. Les mêmes raisons obligent à distinguer encore :

3° Dogmes et systèmes. — Un système est un ensemble de vues, destinées à expliquer le dogme, commandées et réunies entre elles par quelques principes philosophiques.

Tous les systèmes scolastiques ontceci de commun, qu’ils s’appuient sur les principes d’identité et de causalité, qu’ils insistent sur les rapports de déterminant et de déterminable, d’acte et de puissance.

La synthèse la plus remarquable construite sur ces bases est celle de S. Thomas d’Aquin.

Le scotisme se distingue en introduisant sa distinction

« formelle a parte rei » ; le thomisme en

poussant la théorie de l’acte et la puissance jusqu’à la distinction réelle entre l’essence et l’existence ; le suarézianisme en adoptant ime théorie spéciale des modes. D’autres systèmes se différencient moins par leurs principes généraux, que par la manière dont ils en précisent l’aboutissement extrême dans un cas donné : tels le bannézianisme et le molinisme.

La liberté laissée ainsi à chaque école prouve que l’Eglise ne confond pas la parole de Dieu avec les raisonnements de l’homme, les dogmes avec leur exposition systématique. Cette diversité ne préjudicie en rien à Funité doctrinale, puisque la rivalité n’existe que sur la question de savoir comment défendre mieux la foi commune. Cf. Newmax, Difficulties fell by Anglicans…, 4’= édit., lect. x, p. 269 sq. De ce que certains dogmes sont formulés dans le langage des écoles, on ne saurait daA-antage conclure que leurs théories font corps avec eux.

Ce que l’Eglise emprunte aux philosophies diverses, c’est leur terminologie ; mais elle l’emploie sans canoniser le reste des systèmes, et, d’ordinaire, sans donner au mot autre chose quune moyenne courante de signification.

L’accord sur ce point tend à s’établir de plus en plus entre les théologiens.

Toutefois la généralité de cette assertion et l’imprécision des termes laissent place à des malentendus, ([u’on pourrait peut-être prévenir par les observations suivantes :

a. En disant que les formules dogmatiques exprimées en langage philosophique n’ajoutent nulle philosophie au dogme, on n’entend pas dire qu’elles n’ajoutent pas au concept vulgaire quelque chose de plus philosophique. On entend affirmer seulement que ce quelque chose, c’est plus de précision abstraite dans l’expression du dogme, et non l’intrusion des « constructions » humaines dans les « données » de la révélation.

Les mots du langage courant, col. ii^a, détachent en pleine lumière une notion centrale (v. g. paternité), dont les alentours sont indécis (v. g. paternité transitive ou immanente ? avec ou sans mutation ? ) ; ceux de la langue phih)sophi<]ue sont obscurs pour le commun, mais à contours très nets pour les initiés. Instruments de précision, ils permettent de déjouer les subtilités hérétiques, qui d’ordinaire transforment le dogme en prétendant interi)rcter savamment la formule vulgaire, ou le déforment a tout le moins en voulant le préciser. En parlant la langue pliilos »)phi<iue. l’Eglise répond aux hérétiques en leur langue et, parlant plus clair, n’exprime rien de plus.

; ?. De ce fait, on peut conclure que le dogme impose

une philosophie qui respecte ces notions abstraites (le personne, de nature, de substance distincte des apparences sensibles, etc., on n’en peut déduire que telle philosophie qui les respecte soit entrée dans le dogine, le jour où on lui a emprunté les mots qui les exi>rimaicnt., , ,.„,

Le dogme et la philosophie sont des plans différents. En formulant son dogine dans telle philoso-