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à cpii dirait que la substance ou l’essence de Dieu et de toutes choses est une et la même. » — Enfin cette distinction est infinie : Dieu se suffit à lui-même : ft Ijienheureuxen lui-même et par lui-même, et élevé indiciblement au-dessus de tout ce (]ui est et peut se concevoir en dehors de lui ».

A ce pai’agraphe de la Constitution Dei Filius, répondent quatre canons : le premier condamne l’athéisme : « Anathème à qui nierait le seul vrai Dieu, Créateur et Seigneur des choses visibles et des choses invisibles. » Le second condamne le matérialisjîie :

« Anathème à qui ne rougirait pas d’affirmer

qu’il n’existe rien en dehors de la matière. » Le troisième condamne le principe du panthéisme : « Anathème à qui dirait que la sulîstance ou l’essence de Dieu et de toutes choses est une et la même. » Le quatrième condamne trois formes principales du panthéisme : le panthéisme émanatiste, le panthéisme essentiel de Schelling, et le panthéisme essentiel de l’être universel : « Anathème à qui dirait que les choses finies, soit corporelles, soit spirituelles, ou que du moins les spirituelles sont émanées de la substance divine ; ou que l’essence divine, par la manifestation ou l’évolution d’elle-même, devient toutes choses ; ou enfin que Dieu est l’être universel et indéfini, qui en se déterminant constitue l’universalité des choses et leur distinction en genres, espèces et individus. » — Il faut rapprocher de ce dernier canon les théories rosminiennes condamnées par le décret du S. Otfice du ! déc. 1887, et les propositions ontologistes condamnées par la même congrégation le 18 sept. 1861. Voici deux de ces propositions :

« L’être que nous comprenons en toutes choses et sans

lequel nous ne comprenons rien, est l’être divin. » —

« Les universaux considérés du côté de l’objet ne se

distinguent pas réellement de Dieu. » Denzinger, n"’* 1660 (iSi^) ; 1661 (1518).

Voilà ce qu’enseigne 1 Eglise sur l’existence de Dieu, sa nature^ ses attributs essentiels, sa distinction d’avec le monde. A ces enseignements il faut ajouter ceux qui se rapportent à la Trinité, à la Création et à la Providence. On en trouvera le résumé dans les articles où ces points seront spécialement étudiés.

3" Détinition du Concile du Vatican sur le pouvoir qu a la raison de connaître Dieu avec certitude. — Les erreurs condamnées : positivisme, traditionalisme, fidéisme, criticisme kantien. — Le Concile du Vatican a aussi défini ce que peut la raison humaine laissée à ses seules forces pour connaître Dieu, il La même sainte Eglise, notre mère, tient et enseigne cjuepar la lumière naturelle de la raison humaine. Dieu, principe et lin de toutes choses, pt’Hi être connu a’ec certitude au moyen deschoscs créées ; car depuis la création du monde, ses invisibles perfections sont vues par l’intelligence des hommes, au moyen des êtres qu’il a faits (/^o/ ?i., 1, 20) ; que néanmoins il a plu à la sagesse et à la bonté de Dieu de se révéler lui-même et les éternels décrets de sa volonté, par une autre voie, voie surnaturelle.’— Canon 1 :

« Anathème à qui dirait que le Dieu unique et véritable, 

notre Créateur et Seigneur, lu- peut être connu avec certitude par la lumière naturelle de la raison humaine, a moyen des êtres créés. »

Pour avoir le sens exact de cette définition et du canon correspondant, il importe de rappeler les erreurs visées par le Concile. — L’avertissement qui fut distribué aux Pères du Concile avec le schéma élaboré par la Dépulalion de la Foi, portait : « La détinition que Dieu peul être certainement connu à la lumière de la raison, i)ar le moyen des créatures, a paru nécessaire, aussi bien que le canon correspondant, non seulcnu-nt à cause du traditionalisme, mais

à cause de l’erreur fort répandue, d’après laquelle l’existence de Dieu n’est démontrée par aucune jireuve indubitable, ni par conséquent connue avec certitude par la raison. » (Cî.Y xcA.’sr, Etudes sur les Const. du Conc. du Vatic., i, p. 286, et Document vii, p. 609.) Ainsi il est hérétique de soutenir avec les athées et les positivistes cju’il n’est aucun mojen pour nous de connaître Dieu, ou avec les traditionalistes et les fidéistes les plus avancés, que nous n’avons d’autre mojen de connaître Dieu que la révélation ou un enseignement positif reçu par tradition. La condamnation du fidéisme permet de préciser la pensée de l’Eglise sur ce point. En 1840, la Congrégation de l’Index lit signer à l’abbé Bautaix, entre autres propositions, la suivante : « Le raisonnement peut prouver avec certitude l’existence de Dieu (Ratiocinatio Dei existentiuni cuin certitudine prohare i-alet). La foi, don céleste, suppose la révélation et ne peut donc être invoquée pour prouver contre un athée l’existence de Dieu. » Denzinger, n° 1622 (1^88). La même Congrégation de l’Index, le Il juin 1855, imposa quatre thèses à la signature de M. Bonxetty, également suspect de fidéisme ; la 2’porte : « La raison a la puissance de démontrer avec certitude (Ratiocinatio cum certitudine prohare potest) l’existence de Dieu, ainsi que la spiritualité et la liberté de l’àme. » La/|’ : « La méthode employée par S.Thomas, S. Bonaventure et d’autres scolastiques après eux, ne mène pas au rationalisme, et n’est pas non plus la cause qui a fait tomber la philosophie des écoles contemporaines dans le naturalisme et le panthéisme. C’est pourquoi on n’a pas le droit de faire un crime à ces docteurs et à ces maîtres de s’être servis de cette méthode, surtout a^ec l’approbation au moins tacite de l’Eglise. » Denzinger, n"* 1650-1652 (1506-1508). Il est incontestable que le fidéisme est condamné par notre définition et par le canon correspondant. La doctrine kantienne est-elle "sisée ? — Kaxt soutient que les preuves spéculatives de l’existence de Dieu sont insuffisantes, que la métaphysique est impossible, et qu’il y a d’autre preuve de Dieu qu’une preuve pratique, ou morale, qui produit la/b/ morale, dont la certitude est sul)jecti’ement suffisante bien quobjectii’ement insuffisante (Critique de la Raison pratique, 1, 1. II, c. 5). Nous examinerons plus loin cette preuve. Mais nous pouvons dire dès maintenant que le kantisme, non moins que le traditionalisme et le lidéisme. est Aisé par le Concile. Cela ressort nettement du rejet des six amendements proposés pour la suppression du mot certo. « Vous savez, Révérendissimes Pères, répondit Mgr Gasskr dans le rapport qu’il présentait au Concile au nom de la Députation de la Foi, vous savez quel sentiment ont fait prévaloir dans un grand nombie d’esprits les encyclopédistes de France et les premiers i)artisans de la philosophie critique d’Allemagne ; ce sentiment très réi)andu, c’est que l’existence de Dieu ne peut être prouvée avec une entière certitude, et ipie les arguments rjui ont été si estimés de tout temps ne sont pas au-dessus de toute discussion. Il en est résulté que la religion a été méprisée comme dépourviu’de fondement. Bien plus, dans ces derniers temps, on en est venu en différents lieux à Nouloir séparer la morale de toute religion ; on dit cette séparation nécessaire, de peur qu’arrivé à un certain âge et s’apercevant que rien dans la religion n’est certain, pas même l’existence de Dieu, l’homme ne tombe dans la perversion morale. Mais vous savez aussi, Uévérendissimes Pères, ce que vaut cette éducation morale qui n’a jxnnt son principe dans cette parole du psalmisle : « Le connuencement de la sagesse est la crainte du Seigneur. » (Cf. V.cant, op. cit., p. 301 et GÔ7. — t : f. Jeta et Décréta Sacrorum Concilioruiu recrntiorum. Collectio I.acensis, t. VII.