Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 1.djvu/362

Cette page n’a pas encore été corrigée

707

CONVULSIONxXAIRES

708

phénomènes qui les accompagnèrent n’est, en somme, contestée par personne, et ne saurait l’être. Tout Paris en fut témoin, et nous avons encore les rapports détaillés de témoins oculaires, jansénistes et catholiques, partisans du surnaturel et naturalistes, qui ont pu se contrôler les uns les autres’. Or, tous sont d’accord, en somme, sur les faits ; l’interprétation seule diffère, et de là quelques divergences de détail, dues aux préventions et aux idées préconçues des observateurs, mais qui ne nuisent en rien à la constatation du fait en lui-même, et qui ne nous empêchent en aucune façon de connaître la vérité, ni de juger de la nature des phénomènes, comme si nous en avions été témoins nous-mêmes.

Il est vrai que les jansénistes ont prétendu aussi qu’avant les convulsions, des guérisons miraculeuses s’étaient produites sur le tombeau du diacre Paris ; mais quelle différence ici avec les convulsions, pour ce qui regarde même la constatation des faits, à part leur interprétation ! Ce sont les jansénistes seuls qui tâchent par tous les moyens d’accréditer ces miracles, et ; au témoignage d’un contemporain, lord Georges Littleton. déiste redevenu protestant, ceux qui y ajoutèrent foi étaient extrêmement disposés à les croire ; le même auteur s’indigne que les incrédules aient osé comparer et opposer de tels miracles à ceux de Jésus-Christ et de ses apôtres (v. Dictionnaire historique de Tabbé Feller, v" Paris. — Cpr. Recueil de litt. de philos, et d’histoire, Amsterdam, i-30. p. 123 ; et le protestant De Vœux, Amsterdam, 1740 » lett. 8 et 9). Au témoignage d’un autre contemporain, ces miracles soulevèrent l’incrédulité générale, qui se « déchaîna dès le commencement de vive voix, et par un grand nombre d’écrits de toute espèce, sérieux, raisonnes, satiriques, burlesques, comiques. Les miracles du saint janséniste furent condamnés par des mandements (entre autres, de Mgr J.-J. Languet, archevêque de Sens, et de Mgr de Yintimille, archevêque de Paris), anathématisés en chaire et joués sur le théâtre… En un mot, jusqu’à présent, la légende des miracles de l’abbé Paris n’a trouvé de crédit que dans le parti janséniste malgré toutes les démonstrations que les convulsionnaires et leurs défenseurs ont données de leiu" authenticité. » (Cérémonies et coutumes religieuses de tous les peuples du monde, Bernard PiCART, t. IV, p. 182, Amsterdam, i^Sô.) Enlin, le cardinal de Noailles, archevêque de Paris, appelant lui-même, tout en s’occupant de faire constater, par le ministère des curés, les prodiges qu’on annonçait s’opérer sur la tombe de Paris, confesse que le plus grand miracle du saint diacre était sa vie pénitente. Après la mort du cardinal, plusieurs curés présentent des requêtes à son successeur, Mgr de Yintimille. pour demander la continuation des informations faites sous son prédécesseur. L’enquête a lieu en 1735 ; les cinq miracles choisis à cet effet sont, après un examen rigoureux, déclarés faux et illusoires (v. Biographie universelle, vol. Sa, v° Paris). D’ailleurs, quant au caractère des faits, plus ou moins merveilleux, qui pourraient s’être passés au tombeau de Paris, avant les convulsions, nous n’avons pas à

1. Nous en citons, dès à présent, quelques-uns des principaux. Cakré DE.MoxTGERON.lun Jes fervents partisans des convulsions, qu’il attribue à l intervention divine ; il se dit converti au jansénisme. Dom Lataste, O. S. B., qui attribue en partie les phénomènes ronvulsifs et ce qui les accompagne à l’intervention diabi lique, et réfute les allégations jansénistes. Hecquet et de Do.NAiRE, qui attribuent tout à l’artifice et à la nature. Le célèbre chirurgien Morand, qui décrit dans ses Opuscules de chirurgie répreue du feu subie par la sœur Sonet, dite la Salamandre. La CoNDA.MixE, qui a dressé lui-même les procès-verbaux des scènes de crucifiement, et incline pour la supercherie.

nous en occuper ici directement ; mais nous ferons observer que toute question qui peut surgir à ce sujet trouvera sa solution là où nous parlerons delà nature et du caractère des convulsions et des autres phénomènes singuliers qui les accompagnèrent, et cela d’autant plus que ces prétendus miracles ne font qu’une série, tendant aux mêmes lins, avec les convulsions, comme le reconnurent la plupart des jansénistes eux-mêmes.

Les événements qui ont rapport aux convulsionnaires de Saint-Médard présentent trois époques différentes.

Première époque. François de Paris, diacre de l’église de Paris, janséniste endiu’ci, appelant et réappelant de la bulle l’nii ; enitus, mem*t au milieu des austérités inspirées par son fanatisme, en protestant qu’il persiste dans ses sentiments sur son appel de la bulle au concile. Il meurt donc en odeur de sainteté janséniste, le i’^ mai 1727, et est enterré dans le petit cimetière de Saint-Médard.

Quelques mois se passent, et voilà que les pèlerinages commencent au tombeau du diacre ; on fait des neuvaines au soi-disant bienheureux, les fervents s’étendent même sur son tombeau ou baisent la terre qui l’environne… On annonce bientôt des guérisons prodigieuses. Les appelans crient au miracle, c’est Dieu qui décide en faveur de la doctrine janséniste, par l’intercession de son servitevu* Paris. C’est l’époque des prétendus miracles dont nous avons pai’lé.

Deuxième époque. Au mois de juillet lySi, un premier cas de convulsions se produit dans la personne d’Aimée Pivert. Au mois d’aoïit, une sourde-muette de Versailles en ressent de même, et l’abbé de Bescherand vers la fin du même mois. Depuis lors,

« Dieu changea ses voyes, c’est Montgeron qui parle, 

et celles dont il se servit alors pour la guérison des malades fut de les faire passer par des douleurs très vives et des convulsions extraordinaires et très violentes ». Cependant le 15 juillet i^Si, l’archevêque de Paris Mgr de Vintimille défend d’honorer le tombeau de Paris et de rendre à celui-ci un culte religieux. Malgré cette défense, une afïluence extraordinaire se fait au cimetière de Saint-Médard, les convulsions s’étendent, bientôt il y a des convulsionnaires par centaines. En même temps, apparaissent les petits et les grands secours. Les convulsionnaii’es se trouvent soulagés en se faisant frapper sur le ventre, sur les reins, en se faisant presser, piétiner le corps ; c’est ce qu’on appelle les secours, donnés surtout par des hommes, les frères dits « secoureurs », qui frappent à coups de poing, se mettent quelquefois une dizaine sur une planche cpii écrase le corps des convulsionnaires. Plus tard, ces grands secours deviendront les secours meurtriers, à coups de bûche, de barre de fer, etc.

La cour s’émeut à la vue de ces scènes étranges, et, le 27 janvier 1732, une ordonnance du roi ferme le cimetière de Saint-Médard, avec défense de l’ouvrir, sinon pour cause d’inhumation. En même temps, on met en prison les convulsionnaii-es les plus renommés.

Troisième époque. C’est alors que l’épidémie convulsive est définitivement constituée. « A peine eut-on interdit l’entrée du saint lieu que Dieu paraissait avoir choisi pour y opérer ses prodiges, qu’il les multiplia plus que jamais… Des convulsions bien plus surprenantes… prirent tout à coup une multitude de personnes. » Ce sont encore les paroles de Montgeron. Malgré une nouvelle ordonnance royale du 17 février 1733, défendant aux convulsionnaires de se donner en spectacle au public, et à tous de