Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 1.djvu/330

Cette page n’a pas encore été corrigée

643

CONCORDATS

644

religieuse de la Révolution et celle des trente dernières années de la troisième République. Si, dans cette destruction de la nouvelle Eglise gallicane née en l’an X, le pape peut s’applaudir d’avoir le libre choix des évéques, cette bonne fortune a été achetée bien cher ; et en tout cas, nous n’en devons aucune reconnaissance ni à la loi de igoô ni à ceux qui l’ont faite. Le moyen, sans ouvrir la pire des guerres religieuses, d’empêcher le recrutement normal de l'épiscopat ?

VI. — Parmi les concordats européens, un certain nombre furent la conséquence de la chute de Napoléon. Au temps de sa puissance, l’empereur avait parfois rêvé de donner un statut légal à l'église d’Allemagne. Chacun des Etats de la Confédération du Rhin, sans parler de l’Autriche, ne favorisa guère ce dessein centralisateur. Sollicitée par des appels opposés, Rome ne se pressa point, atteiulant de savoir du temps qui il fallait écouler ; puis les malheurs de Pie VII rendirent toute négociation impossible. Après le congrès de Vienne, l’abolition de la Confédération, le remaniement de la carte européenne renouvelèrent dans la vieille Germanie et à Rome le désir d’un règlement amiable. Les idées fébroniennes et joséphistes, très vivantes dans la tête de beaucoup d’hommes d’Etat et de nombreux hommes d’Eglise, faillirent tout conqîroinettre. Impuisantes à triompher au congrès de Vienne et à la diète de Francfort (1816) pour des raisons multiples, ces idées reprirent ligueur et corps dans des. actes publics destinés à ébrécher les concordats dont elles n’avaient pu empêcher la signature.

Le pacte signé a^ec la Bavière (18 17) a tout à fait l’allure catholique. On y promet que la religion nationale jouira de tous les droits et prérogatives qu’elle tient de Dieu et des saints canons (art. i). Les menses épiscopales seront constituées en biens -fonds (art. 4)- Les prêtres infirmes et vieux seront reçus dans des asiles dotés (art. 6). On dotera aussi des couvents de l’un et l’autre sexe pour l'éducation de la jeunesse, le soulagement des malades et pour venir au secours des curés (art. 7). On garantit l’inviolabilité des biens des séminaires, des paroisses et des fabriques (art. 8). La liberté est assurée aux prélats dans le gouvernement de leurs diocèses selon les dispositions des canons et la discipline ecclésiastique approuvée par le Saint-Siège ; suit le détail, de peui' qu’on en ignore (art. 12). Contre les livres impies, immoraux, anticatholiques, détracteurs du clergé ou tournant en dérision le culte, sur la dénonciation des prélats, le roi proiuet toutes les répressions ; il ne souffrira pas que personne, et encore moins les fonctionnaires publics, manquent au respect dû à la dignité des ministres de Dieu (art. 13, i^) Quand on compare ces articles à ceux du concordai napoléonien, on est heureusement surpris de tant d’orthodoxie et de bienvcillance : surtout dans un pays où les souvcnirs de Hontheim étaient encore si vivants. L' « édit de religion » qui fut joint au concordat ne tarda ])as à trahir les véritables sentiments des politiques. Et si les protestations de Rome amenèrent le roi de Bavière à un recul (déclarations de 181 8 et de 1821), il n’en demeura pas moins que le texte du concordai — reconnu théoriquement comme l’unique loi des parties — ne fut jamais loyalement appliqué.

L’accord conclu avec la Prusse (1821) donne lieu à des réflexions assez différentes. Bien que négocié par le fervent luthérien Niebuhr, il aboutit à une organisation complète des évcchés situés en terre prussienne et notamment dansla vallée duRhin. Mais en dehors des questions de circonscription et de dotation et auti’es de ce genre (développées en 63 articles), on ne s’ex plique sur rien ; l’exercice du pouvoir spiiùtuel semble étranger et indifférent au successeur de Frédéric IL L’expérience allait montrer que, pour charger de fers l'épiscopat, les souverains de Berlin n’avaient pas besoin d’articles organiques selon la manière de Portails. Les biens-fonds promis pour doter les églises ne furent jamais donnés ; ce mancpie de parole était une prophétie de beaucoup d’autres infidélités.

Avec les Etats protestants indépendants, de la vallée du Rhin, nous revenons à une situation qui n’est pas sans rappeler l’histoire du concordat bavarois. Eux aussi avaient rêvé, dès 1818, ce qu’ils appclèvenl Magna charta libertatis Ecclesiæ germanicac. Consalvi trouvant trop petite cette grande charte, il fallut songer à autre chose. Les pourparlers aboutirent en 1821 à un simple travail de circonscription analogue à celui qu’on avait établi pour la Prusse. Mais, à peine les titulaires des évèchés nouveaux étaient-ils nommés, qu’on les pria de souscrire — te qu’ils firent, un seul excepté — à ces codes d’asservissement qu’on appelait « l’instrument de fondation » et « la pragmatique d’Eglise ». Rome protesta, refusa les bulles d’institution canonique. En 182'j, les négociations reprirent. On précisa, en ce qui concerne la nomination des évêques, la formation des chapitres, l'établissement des séminaires, la libre communication des évêques avec Rome, et l’exercice libre du pouvoir épiscopal selon les canons. Ces six clauses parurent suffisantes au Saint-Siège pour remédier au mal. Les gouvernements intéressés les publièrent a^ec des réserves suspectes ; et finirent en 1830 par édicter en Sg articles un code de police des cultes qui exprimait leiu- manière de concevoir la liberté de l’Eglise.

Tandis que les Pays-Bas, de Bruxelles à Amsterdam, ne formaient qu’un seul royaume aux mains d’un souverain protestant, l’habileté du nonce Capacini sut négocier avec Guillaume I" un concordat original entre tous (1827). Il consiste en trois articles : I " le concordat napoléonien est adopté ; 2° chaque diocèse aura son chapitre ; 3" tant que le souverain ne sera pas catholique, la nomination des évêques se fera sur une liste présentée par les chapitres, pendant le mois qui suivra ïa vacance du siège ; si quelquun des candidats présentés déplaît au roi, les chapitres effaceront son nom ; après quoi, ils procéderont à l'élection canonique, sans pouvoir choisir' en dehors de la liste présentée.

La révolution de 1830, en séparant la Belgique de la Hollande et en lui donnant un chef d’Etat catholique, aurait pu modifier ce statut. Il n’en fut rien.

C’est aussi en 1829 que fut signé le concordai suisse. Les cantons intéressés (Lucerne, Berne, Soleure, Zug) ne l’ayant pas ratifié, les négociations durent reprendre, et l’année suivante elles aboutirent à un traité en 16 articles qui fut enfin agréé. En 1830, de nouveaux pourparlers en étendirent l’effet aux cantons d’Argovie et de Thiu’govie. Circonscription cantonale des diocèses, mais siu-tout organisation des chapitres et lixation de leurs revenus : c’est presque tout le concordat suisse. La situation du diocèse de S. Gall fut réglée par acte séparé (1845).

Les concordats italiens offrent une physionomie fort différente. La transformation politique de la carte de l’Italie, après la chute du grand Empire, explique suffisamment la place que tient dans le premier concordat sarde (iSi’j) le détail de la circonscription des diocèses. Les conventions faites en 1836 et en 1841 règlent minutieusement la tenue des registres paroissiaux et des qviestions de poursuites criminelles. Mêmes préoccupations dans le concordai passé en 1851 avec le grand duc d’Etrurie. Il n’y est guère ajouté que des dispositions très nettes poiu-