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CONCILES

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<Mansi, t. XVI, col. 7) : Vous as-ez ordonné qu’un conc le se tint à Constantinople.

Ces témoignages semblent bien impliquer, de la part du pape, un concours effectif à l’acte de convocation. Les deux derniers surtout sont aussi clairs et aussi catégoriques qu’on pourrait le désirer ; pour en décliner la force probante, il ne suffit pas d alléguer, comme on l’a fait, que le caractère spécial du VIII « concile et l’époque tardive à laquelle il appartient expliqueraient ces façons nouvelles de parler et en diminueraient la signitication. Mais les témoignages antérieurs ne sont pas non plus sans valeur comme indices de l’opinion publique et de la pei-siiasion des papes. Quand même nous devrions admettre que le Liier pontificalis est une source peu sûre pour l’époque du concile de Nicée, quand même les Pères du VI^ concile se seraient trompés touchant le fait particulier qu’ils atlirment, nous savons du moins ce que le rédacteur du Liber pontificalis et de nombreux évêques orientaux de la (în du vue siècle pensaient sur la question de fond. Dans la lettre des évêques de Mésie, nous saisissons 1 opinion reçue parmi eux dès le v’siècle. Du reste, il n’est pas admissible qu’on rejette les allirmations si importantes de saint Léon et d Hadrien lei" ou qu’on les détourne complètement de leur sens naturel, sous prétexte qu’elles seraient erronées et en opposition avec d’autres témoignages qui attribuent la convocation aux empereurs. Les règles de la critique historique ne permettent pas, sauf le cas de nécessité absolue, d’accuser de fausseté ou de réduire à rien deux textes si olficiels et en soi si expressifs ; or, dès qu’on les entend d’une ratitication subséquente par les papes des actes des empereurs, cette ratification eût-elle été rendue nécessaire par la suite des événements ou motivée par la crainte d’un plus grand mal, ils ne contiennent absolument rien de contraire aux faits certains d’ailleurs, et ils attestent dans leurs auteurs la conscience d’un droit à exercer concernant la convocation des conciles. Toutefois, parce que, dans l’ensemble des monuments conciliaires, les témoignages analogues à ceux dont nous arguons sont comparativement rares, parce que le plus souvent ni les conciles ni les papes n’ont affirmé ou revendiqué la part de coopération qui revient de droit à l’Eglise, jtarce f(ue surtout les empereurs nous apparaissent constamment persuadés qu’ils convoquent de leur initiative propre et indépendante, nous n irons pas, avec certains théologiens, jusqu’à dire que les princes ont agi de fait comme instruments ou délégués du jtouvoir spirituel, que leur convocation acte simplement ( ministérielle » ; il nous suffit qu’elle n’ait été que matérielle, au sens déjà indiqué, que nous allons préciser davantage.

2) Les circonstances historiques expliquent, nous l’avons dit, et la conception des princes, et l’abstention ou tolérance extérieure observée généralement par l’autorité ecclésiasti([ue. Funk les a exposées dans une excellente esquisse (A7/v7/eM^esc//. Ahtnindlungen, t. I, p. 71 suiv.). dont nous reproduirons la substance. Tout d’abord, les premiers conciles ne comprenaient en somme que des évêques de diocèses renfermés dans les limites de l’empire romain ; du nu)ins les autres évèqucs n’y furent jamais qu’en très petit nombre. Uiu- fois tombés, au vu" siècle, sous la domination des Arabes, même les patriarcats d’Orient ne furent jilus représentés aux assemblées conciliaires que par quelques prélats. On conçoit que, dans ces conditions, les empereurs se soient habitués à ne voir <lans la convocation des conciles (ecumcniques<|u’une affaire de leur ressort i)ropre, tout comme d’autres souverains prirent parfois riiiilialivc de conciles nationaux ou provinciaux. Puis, il faut le reconnaître.

les empereurs étaient peut-être les seuls qui disposassent d’une autorité effective assez forte et de ressources assez étendues pour réunir un concile universel et soutenir les charges de son entretien. Sans doute, les pontifes romains ont toujours pu en droit ordonner aux évêques de toute la chrétienté de s’assembler en un même lieu ; mais leur voix serait-elle parvenue à se faire obéir en toutes circonstances ? surtout, comment eussent-ils triomphé des obstacles matériels ? Qu’on songe aux distances que les évêques avaient à parcourir, à la dilliculté des déplacements, à l’insécurité des routes, aux frais considérables du voyage et du séjour à l’étranger. Qu’on remarque en outre que tous les anciens conciles ont eu lieu à des époques spécialement troublées et dans des milieux orientaux exceptionnellement agités par des erreurs qu’il s’agissait de condamner ou par des dissensions et des controverses qu’il fallait apaiser. Se rendre à un concile était ou pouvait être chose aussi dangereuse que pénible. Ces dangers et ces inconvénients n’eussent-ils pas paralysé souvent, dans le corps épiscopal, les meilleures volontés et servi comme prétexte d’abstention aux tièdes et aux récalcitrants ? Ce n’est pas sans raison que la convocation impériale au III concile œcuménique proteste d’avance et en termes comminatoires cohtre les absences non justifiées. Ajoutons que les réunions nombi-euses étaient interdites par la législation de l’empire, qu’une dispense y)araissait nécessaire pour la célébration d’un concile, il ne faut donc pas trop s’étonner de voir les papes laisser aux empereurs le privilège si exclusif de la convocation matérielle : ils abandonnaient aux mains du pouvoir séculier ce pour quoi ils se sentaient en fait impuissants, se bornant à cette part d’intervention qui ne pouvait venir que d’eux et que résume l’expression de convocation formelle.

3) Malgré leur habituelle tendance à s’ingérer plus que de raison dans le domaine religieux, les empereurs eux-mêmes faisaient suffisamment la distinction de cette double forme de convocation ; ils se défendaient, à l’occasion, de toute idée de convocation formelle, qui eût impliqué l’usurpation d’un pouvoir essentiellement spirituel. En ordonnant aux évêques de se réunir, les princes n’entendaient pas constituer, créer seuls le concile selon toute l’ampleur de la définition donnée plus haut, c’est-à-dire le créer comme assemblée juridique, lui conférer l’autorité propre à un concile universel. Les textes nous sont garants de leur pensée. Dans une lettre adressée à Dioscore en vue du concile d’Ephèse de 4^9, Théodose remarquait (Mansi. t. VI, col. 687) que « le soin de la religion, de la vérité et de l’orthodoxie dans la foi appartient pleinement aux évê(]ues » ; et antérieurement, en députant le comte Candidien au III* concile, pour y veiller à l’ordre extérieur, il lui avait expressément défendu toute participation aux délibérations touchant le dogme, parce que « à ceux qui ne sont pas évêques il est interdit de s’immiscer dans des débats ecclésiastiques « (Mansi, t. IV, col. i i i<j). Les empereurs réunissaient donc l’assemblée conciliaire, mais sans prétendre l’investir de son pouvoir. Ce pouvoir lui devait venir d’ailleurs ; et d’où lui serait-il venu, sinon des pontifes romains ? C’est parce que les papes se savaient la source ])r()pre de l’aulorilc des conciles (pi’ils se sont attribué aussi le droit de la délimiter et d’en régler souverainement l’usage. Ce point sera établi ex professo un i » eu plus loin, sous la rubrique présidence des conciles. Contenions-nous pour le moment de quelques brèves indications. En envoyant SCS légats au concile d’Ephèse, Cklestin I’-^ leur trace, ainsi qu’aux autres Pères, une ligne de conduite obligatoire, il enjoint à tous de se conformer aux décisions déjà prises par lui (Mansi, t. IV, col. 1287) :