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CHINE

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mort en Chine. — Le Tao-tei-king a été traduit en français par Stanislas Jilien, en anglais par J. Lkgge.

Léon WiEGi’R S. J.

Confucius. — Proprement K’oiig-fou-tse, maître K’ojig. politique chinois, né en 55 1, mort en 4/9 avant J.-C. Originaire de la principauté de Lou, province actuelle du Chan-tong. Fils d’un officier militaire obscur, qui le laissa orphelin à trois ans. Tout ce qu’on sait de son enfance, c’est qu’il ralTolait des cérémonies, et excellait dans les rits. Marié à dix-neuf ans, il devint, avec le temps, intendant des greniers, puis des pacages du marquis de Lou. Il avait cinquante ans quand, en 501, il fut promu préfet. En 500, il devint grand-juge du marquisat, et en ^97 vice-ministre. Dans ces diverses fonctions, il se montra sévère, intransigeant, cassant. Trouvant le mai-quis de Lou trop peu déférant et trop peu souple, il le quitta brusquement, et se mit à errer, colporteur de politique à la disposition du plus offrant, à travers les principautés féodales pratiquement indépendantes, qui composaient alors l’empire chinois, prêchant partout le retour aux mœurs anticxues, parfois écouté pour un temps, plus souvent éconduit sur-le-champ, l’acrimonie de son caractère servant mal sa politicomanie… En 484, après treize années dévie errante, âgé de 67 ans, il revint à Lou, mais ne rentra pas au service du marquis. L’empire était caduc, les rits et la musique dégénéraient, les odes et les annales étaient oubliées. Confucius chercha à faire revivre tout cela, à réformer son temps en le ramenant de 18 siècles en arrière. A cette fin, il tria les Bits, il fit une sélection des Annales et un choix des Odes, il commenta les Mutations (voyez LnRES chinois). Confucius compila ces choix de textes, ces anthologies, pour l’usage de ses élèves. Or, par suite de la destruction des bibliothèques en l’an 213 avant J.-C, il est arrivé que ces manuels scolaires, en somme moins de deux cents pages in-8° de textes détachés, sont à peu près tout ce qui nous reste de la Chine ancienne. Ces petits livres ont fait la grande réputation de l’homme… Confucius tint école privée jusqu’à la fin de sa vie. Il enseigna successivement environ trois mille élèves, dont 72, qui le satisfirent plus particulièrement, sont appelés ses disciples… Avec l’âge et les mécomptes, car il n’agréa jamais à ses contemporains, son caractère alla s’aigrissant et il devint superstitieux. Il regretta de n’avoir pas cultivé davantage la mj-stique divinatoire. Des chasseurs ayant tué un animal extraordinaire, il en conclut que son œuvre ne lui survivrait pas. Il consacra ses dernières années à la rédaction des Annales de Lou, ouvrage dans lequel il créa cet art des réticences calculées, des insinuations perfides, des travestissements délibérés, des euphémismes trompeurs ; art mauvais dont les Lettrés ont depuis lors tant usé et abusé. En 479’Confucius annonça que le mont sacré allait s’écrouler, que la maîtresse poutre allait se rompre, que le Sage allait périr. Ses dernières paroles furent : « Pourquoi vivrais-je davantage ? Aucun prince n’a l’esprit de m’écouter, personne n’est capable de me comprendre ; autant vaut mourir ! » Il s’alita, ne parla plus, et s’éteignit le septième jour, à l’âge de 78 ans. Ses disciples l’ensevelirent au nord de la ville de K’iu-fou, la capitale de Lou, au bord de la rivière Se. Sa tombe existe encore, inviolée… Le fils de Confucius, Pai-yu, était mort avant son père, laissant un fils nommé Ki (Tse-se), auteiu- du traité sur le Juste milieu, qui contribua beaucoup à systématiser les propositions éparses de son aïeul. — Retournés dans leurs patries respectives, les élèves de Confucius firent école privée

autour d’eux, à l’instar du Maître. Ainsi naquit la secte des Lettrés, laquelle fut d’abord aussi peu connue et aussi mal vue qu’avait été son auteur. Les Lettrés ne fm>ent jamais ime institution publique, comme on le croit parfois à tort. Ils furent toujours une coterie privée de politiciens retardataires et réactionnaires, une caste fermée, presque une société secrète, se perpétuant par l’éducation des jeunes gens, par cooptation et par intermai-iages. Répandus un peu partout, faisant partout bande à part, hypnotisés par l’idée unique du retour à l’âge d’or, acariâtres comme leur Maître, jiédants antipathiques par nature, critiques frondeiu-s par état, ils furent parfois flattés par intérêt, quelquefois persécutés pour leur insolence, le plus souvent justement ignorés.

Généralement parlant, les dynasties chinoises leur furent hostiles. C’est sous les deux dynasties étrangères, la mongole et la mandchoue, qu’ils firent le mieux leurs afTaires ; sous la première comme agents du fisc, sous la seconde comme maîtres de l’enseignement. Voici un échantillon du ton sur lequel ces intellectuels le prenaient, non avec les petits, mais avec les gTands de la terre. En l’an 195 avant J.-C, l’empereur Kao, des Han, passant près de la tombe de Confucius, fit une offrande à ses mânes. « Jadis le Ciel a fait naître Confucius, le Maître de tous les âges. Que les peuples existent encore, c’est à la doctrine de notre Sage qu’ils le doivent. Cette doctrine pénètre l’univers, dont elle est comme l’esprit vital, comme l’âme. Les T’sin n’ont pas réussi à la détruire, les Han n’ont pas le mérite de l’avoir ressuscitée, parce qu’elle est immortelle, éternelle. Elle est au-dessus des atteintes des hommes, de toutes les vicissitudes des temps et des choses ; elle a toujours été, et ne cessera jamais d’être. L’empereur Kao, le premier des Han, un reître grimpé siu* le trône, n’entendait rien aux Odes ni aux Annales. Il méprisait les Lettrés, les outrageait quand il pouvait, allant jusqu’à uriner dans leurs bonnets. Comment cet homme qui traitait ainsi les disciples, pouvait-il estimer leur Maître ? Cependant, quand il passa près de la tombe de Confucius, il fit une offrande à ses mânes. Si les Han se maintinrent sur le trône durant quatre siècles, c’est à cet acte de déférence qu’ils le durent. S’ils en tombèrent après quatre siècles, c’est qu’ils n’étaient pas arrivés, pendant tout ce temps, à pénétrer et à appliquer la doctrine du Maître. » En 72 après J.-C. l’empereur Ming, passant par le pays de Lou, visita la maison de Confucius. L’historiographe officiel écrivit dans sa relation, que l’empereur « honora » de sa visite la maison de Confucius. Les Lettrés clamèrent.

« Cet historiographe n’entendait évidemment

rien â la valeur des termes. Le Maître de tous les âges, le Père des bonnes mœiu’s, le Soutien du ciel et de la terre, le Conservateur de la race humaine, est-il honoré parce qu’un empereur le visite ? C’est l’empereur qui s’honore en le visitant ! » (Citations du T’se-tci’ie-t’ong-kien)… Les innombrables écrits des Lettrés de tous les âges, sont dans le même goût. Les modernes n’ont rien perdu de la morgue de leurs anciens. Il ne se peut rien imaginer de plus pauvre comme fond, de plus maussade comme forme, que les élucubrations de ces esprits retardataires, empêtrés dans leurs utopies surannées du gouvernement patriarcal et de la politique équilibriste. Il y a peu d’années, ils assiégeaient encore le trône, réclamant à toute occasion le retour de quarante siècles en arrière. Malgré leurs efforts, les aiguilles du cadran ont jusqu’ici continué à avancer. Ils n’ont pas perdu l’espoir (l’arrivcr quelque jour à les faire reculer quand même. — L’introduction et l’éAolution de ce qu’on a appelé le culte de Confucius. de l’hommage olficiel rendu à la mémoire du Sage, fut singulièrement tar-