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ils Ariens ou Dravidiens ? Cette question n’ayant pas encore reçu sa solution définitive, on ne peut pas dire non plus d’où ils apportèrent leur religion et leur civilisation. A leur entrée dans l’histoire, vers 2698 s’il faut en croire la chronologie chinoise oilicielle, ils apparaissent comme un peuple distinct, relativement peu nombreux, ayant ses idées et ses mœurs propres, étal)li par stations parmi un autre peuple aborigène, d’idées et de mœurs ditlerentes. Les Chinois ne rendaient de culte qu’au ciel et aux mânes ; les Miao aborigènes étaient fétichistes. C’est tout ce qu’on sait de ces temps reculés.

II. Avant les Tcheou, religion primitive. — Pour la période historique (jui précéda iavènement de la dynastie Tcheou, xxiv’au xii* siècle avant J.-C, voici les notions que les anthologies confucéennes, Odes et Annales, seuls documents existants, nous ont conservées. Nous supposons que Confucius les a fidèlement rapportées, et que la postérité ne les a pas altérées… Au-dessus de tout, les Chinois plaçaient un Etre supérieur, qu’ils appelaient Sublime Ciel, Ciel, Sublime Souverain, ou Souverain.

Ces termes sont strictement et parfaitement synonymes. LeCiel.leSublimeSouverain, donne, conserve, ou ravit l’existence. Il est l’auteur de toutes les relations, de toutes les lois. Il considère les hommes et les juge. Il récompense et punit, selon le mérite et le démérite. De lui viennent la disette ou l’abondance, l’adversité ou la prospérité. L’empereur est son mandataire. Le Ciel prédestine à longue échéance, prépare son élu durant des siècles d’avance… Etant donné ces attributs, il est impossible d’admettre que les anciens aient considéré le Ciel comme une voûte matérielle, ou le Sublime Souverain comme un ancien héros. Ces interprétations sont également inconciliables avecles textes, les commentaires et la tradition… Le culte qu’on rendait au Ciel, au Sublime Souverain, était simple et expressif. On lui immolait des victimes, ordinairement un bœuf. On l’avertissait des événements majeurs, en allumant un bûcher sur la cime d’une montagne. La fumée était censée porter au Ciel la communication qu’on voulait lui faire. On s’inquiétait beaucoup de savoir s’il était content ou mécontent, favorablement ou défavorablement disposé. Pour cela, on examinait les corps célestes et les météores terrestres ; on flambait des écailles de tortue, et l’on conjecturait d’après les craquelures produites. Le choix de ce dernier mode de divination fait bien comprendre ce que l’on prétendait. La carapace dorsale bombée de la tortue figurait le ciel, sa plaque ventrale plate la terre, l’animal entre les deux figurait l’homme. On voulait apprendre la voie du Ciel, disent les textes ; ce que le Ciel préparait, ce qu’il désirait.

Dès la même époque, divers êtres transcendants étaient l’objet d’un culte secondaire. Les textes énumèrcnt les c/ien du ciel et les k’i de la terre, spécialement ceux des monts et des fleuves, le patron des terres et le patron des moissons, etc. C’étaient les mânes d’hommes illustres, considérés comme bienfaiteurs et protecteurs. — La grande affaire, c’était le culte des Mânes. La survivance de l’âme hunuiine était crue généralement et fcrnunnent. Un texte célèbre de l’an 1400 parle au long de l’élysée céleste, de l’effet des bénédictions ou des malédictions des ancêtres. Jamais aucune allusion à un jugement après la mort, à un purgatoire ou à un enfer… l’nc tablette en bois servait do médium entre le défunt et ses descendants. C’est devant cette tablette qu’on offrait au défunt des mets et des étoffes. On l’invitait, en déclamant des adresses, en chantant des odes, en faisant de la musique. Non que l’on crût <iu’il viendrait,

qu’il mangerait réellement, disent les commentateurs tout d’une voix. On espérait seulement que l’ancêtre, informé de la peine que ses descendants se donnaient pour l’honorer, leur enverrait sa béné-, diction, qui leur porterait bonheur. Cependant on parlait et on agissait comme si on avait espéré la venue réelle du défunt. Fiction i-ituelle, disent les commentateurs : le cœur humain est ainsi fait ; il prend ou feint de prendre ses désirs pour des réalités. Parfois, dans les occasions très solennelles, pour donner plus de vie à la scène, on habillait un descendant du défunt avec ses vêtements soigneusement conservés, et c’est à ce représentant muet, médium vivant, qu’on offrait les mets et les chants.

m. Sous les Tcheou, innovations. — Notons d’abord, outre l’ancicu procédé de conjecture par l’écaillé de tortue, deux autres systèmes de divination, l’un par les nombres, l’autre par les diagrammes. — Attribuée à l’empereur Yu le Grand, le fameux canalisateur du xxiii= siècle, exposée en l’an 1122 par l’oncle du dernier empereur de la dynastie Yin, la divination par les nombres, basée sur les chiffres simples i à 9, n’eut d’abord que peu de vogue. Plus tard on perfectionna le système. On ajovita le chiffre 10. On construisit deux dessins. On raconta qu’ils avaient été copiés sur le dos d’un dragon, d’une tortue. Les lettrés de la période Ilan s’en occupèrent. Ceux de la période Song en firent le jeu d’esprit à la mode. Ils crurent au dragon et à la tortue, à un dessin céleste rond et à un dessin terrestre carré. Le ciel et la terre, les deux principes, les cinq éléments et les nombres combinés, formèrent un système ignoré de l’antiquité et oublié depuis. — La divination par les diagrammes joua, dans l’histoire de la Chine, un rôle plus important. Elle est basée sur huit figures dites /oa, formées chacune de trois lignes entières ou brisées. On a voulu voir, dans ces trigrammes, des caractères cunéiformes ; plaisanterie ! Les trigrammes ne figurent rien. Chacun porte un nom conventionnel. Ces noms sont empruntés à la natiu-e, ciel, terre, soleil, tonnerre, vent, montagne, eau stagnante, eau courante. Tout le système est basé sur ces noms. Primitivement on tirait au sort, d’abord un premier trigramme, puis un second, et l’on conjecturait, par rapport à la question proposée, d’après le changement que le second sens semblait apporter au premier. De là le nom /, Mutations, que porte le système. Par exemple, supposons qu’on conjectural sur l’avenir prochain de l’empire. Le premier trigramme tiré au sort ayant été montagne, notion de solidité, et le second ayant été tonnerre, notion d’ébranlement ; on concluait que, à la tranquillité actuelle, succéderait une révolution. Il est évident que, dans ces interprétations, la marge laissée aux devins était très large et les consultations que l’histoire nous a conservées, prouvent qu’ils en usaient largement. Plus lard on conq)liquales figures graphiques, probablement pour mettre dans le système plus de mystère apparent. Les 8 trigrammes furent combinés en 64 hexagrammes, numérotés, et l’on tira la mutation de la comparaison des deux hexagrammes, le procédé restant d’ailleurs le même. Le tirage au sort successif (les deux numéros se faisait par une série de coupes, avec un jeu de brins d’achillée… Quant à l’origine de ce système de divination, encore enq)loyé de nos jours, il est moralement certain que ce fut, non pas l’empereur légendaire Fou-hi, niaisleduc T’changde Tcheou, père du fondateur de la dynastie impériale Tcheou, plus connu sous son litre posthume Wcn-wang, qui l’inventa entre 1144 et 1142 avant J.-C. Son fils Tan, duc de Tcheou, le perfectionna. Les deux ajoutèrent aux diagrammes d’ineptes sentences. Confucius