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CHASTETE

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l’amour ; celui-ci ne saurait, sans dévier, perdre chez nous des attributs qui lui sont essentiels, et notre sentimentalité s’accommoderait mal de prescriptions irrespectueuses des conjugales intimités. Mais l’homme, être sensible, est aussi doué de raison ; devenu conscient des responsabilités graves engagées dans les relations de cet ordre, il ne doit, sous aucun prétexte, laisser dégénérer ces dernières en une habitude de sensualité nécessaire. La volonté peut et doit garder sur nos sens un plein contrôle, sous peine de voir sérieusement compromis la stabilité de la famille et le bien-être social. Pour maintenir cet idéal équilibre, il est nécessaire de dénoncer les préjugés trop accrédités que, de bonne ou de mauvaise foi, le sexe masculin exjiloite pour justifier « la vie de garçon ».

§ 2. L’instinct se.tnel et ses manifestations chez l’homme : Besoin sexuel et aptitude sexuelle. La chasteté intellectuelle base de la chasteté corporelle.

— Dans la société humaine, l’instinct de la reproduction a subi des nioditîcations profondes, et lattirance sexuelle nest plus sous la dépendance des sensations élémentaires et quasi matérielles qui chez l’animal déterminent l’accouplement. Les habitudes d’hygiène, le port du vêtement, raffinement progressif de la mentalité ont peu à peu rendu l’homme inapte à percevoir ces mobiles et par suite à leur obéir. Il y a cependant en lui, quand la virilité s’atBrme, des aspirations à satisfaire, en lui parlent des enthousiasmes nouveaux : la femme est née. Mais cette révélation ne s’opère point avec la hâtive et spontanée précision que certains moralistes complaisants ou superficiels lui reconnaissent. Supposons un adolescent élevé de façon telle qu’il ait grandi dans l’ignorance complète des choses de l’amour ; va-t-il le jour où son être devient possesseur des attributs de la puberté se sentir invinciblement poussé vers l’autre sexe ? Non. Et comme sa physiologie native n’est pas capable de lui dicter en cela de suggestions précises, ce sont les influences morales du milieu : causeries, lectiu’es. spectacles divers, qui seules vont lui donner la signification de ces aspirations nouvelles dont il ne devine ni la cause ni l’objet : La vie sexuelle est soumise chez l’homme à une éducation préalable. Or les influences morales à la lumière desquelles la jeunesse acoutume d’apprendre l’amour, ne s’inspirent pas plus de la Logique que de l’Ethique ou de l’Esthétique : C’est d’abord le silence regrettable des éducateurs qui de bonne heure (et pour peu qu’elles soient vagabondes de nature) exalte les petites imaginations en leur laissant croire par ce silence même que le coiumerce sexuel est une obligation virile, source de sensations inouïes. Ce sont ensuite les suggestions dégoûtantes des camarades plus âgés, celles non moins pernicieuses de la pornographie sous toutes ses formes : littérature, imagerie, théâtre, tout autant de facteurs qui font peu à peu se constituer dans les jeunes cervelles l’obsession du fruit défendu et la conviction du vice nécessaire. L’opinion publique fait le reste, en aflirmant « qu’il faut que jeunesse se passe », et la jeunesse masculine jet le sa gourme, non point poussée par le vœu de la ualiwe, mais par la curiosité malsaine. Des habitudes mauvaises sont ainsi contractées ; la répétition de l’acte crée le besoin ; il se constitue une nécessité passionnelle, là où ne devrait exister qu’une fonction facultative c’est-à-dire soumise tout entière aux décisions de la volonté ; car pas plus chez l’animal rpie chez l’homme on ne saurait parler de besoin sexuel au sens de nécessité inéluctable (nécessité comme peuvent l’être la soif ou la faim et dont la non satisfaction compromettra la santé physique) ; c’est aptitcde sexlelle qu’il faut

dire. Ainsi le veulent les résultats de l’analyse psychologique à laquelle nous venons de nous livrer, corroborée par de récentes expériences de physiologie, d’une extrême précision, expériences de Miliax et Mamelok sur la spermatorrhée physiologique dans Presse médicale, année 1902, p. 63 1. Elle Ivaxokf, Fonctions des vésicules séminales dans Journal de Physiologie et Pathologie générale publié par MM. Bouchard et Chauveau, t. II, n" i, 15 janvier igoo. [Nous avons relaté ces diverses expéiùences et les conclusions qu’on en peut tirer relativement à la chasteté, dans la brochure « Pureté rationnelle » aux pages 22 et 23], expériences desquelles il appert qu’à aucun moment il ne peut y avoir pour l’homme nécessité physiologique d’accouplement ; la nature se charge d’éliminer spontanément ce que certaines sécrétions glandulaires peuvent avoir d’excessif, et cet excès (voir « Pureté rationnelle y> à l’article : Pertes séminales, p. 23) ne se constitue la plupart du temps qu’en raison d’une hygiène ou d’une santé défectueuse. La chasteté corporelle est atiaire de chasteté intellectuelle, mais de chasteté intellectuelle voulue, consciente d’elle-même. L’attirance sexuelle s’éveille en l’homme par le jeu de la pensée et l’anormale excitation du sens génésique provient d’une fausse interprétation de cette attirance : nous lui prêtons la valeur d’un besoin alors qu’elle est la simple manifestation d’une aptitude et susceptible à ce titre d’ouir les voix de la raison. A aucun moment il n’y a de trop-plein dans un organisme auqpiel commande un esprit libéré de préoccupations libidineuses ; c’est dans les imaginations qu’il y a un trop-plein d’excitations malsaines.

II. Bienfaits de la chasteté pour les individus et LES sociétés. — Ces données peuvent ne pas paraître à tous concluantes, et les esprits diiriciles à satisfaire ou désireux de trouver coûte que coûte une excuse à leurs faiblesses, ont le droit de se demander si au lieu et place de la simple « aptitude créatrice » qui chez l’animal rend l’accouplement facultatif, il ne s’est pas constitué chez l’homme un besoin qui, pour tout passionnel et factice qu’il soit, n’en n’est pas moins dangereux à contraindre, et si l’on peut, sans s’exposera voir éclore des états de déséquilibre mental, conseiller à tous les individus de réprimer leurs impulsions. Il importe ici, pour la juste compréhension du problème, d’établir une distinction : certains individus sont porteiu-s de tares physiques ou morales si indélébiles que leur équilibre en est gravement compromis ; au point de vue sexuel, comme à bien d’autres, ils sont inéducables, pauvres dégénérés dont le cas, pathologique à coup sur, relève d’une sévère cure psychiatrique, et pour lesquels la camisole de force serait quelquefois de rigueur. Mais ces monstres, ces satyres dont les excès navrants défrayent la chronique judiciaire, sont l’exception. Il est par contre d’autres hommes sains de corps et d’esprit (nous /entendrons par sains d’esprit des hommes satisfaisant à toutes les exigences de la vie sociale et ne voulant pas plus de mal à leurs semblables que n’en tolère la morale courante) mais que toute leur éducation de famille et de milieu a pervertis au point de vue sexuel. Les relations sexuelles, même modérées, leur étant dès l’abord apparues comme une condition primordiale de santé, elles sont devenues pour eux une habituelle nécessité avec laquelle ils ne voudraient rompre à aucun prix. Mais si un jour, énuis des hypocrisies ou des plaies sociales qu’entretient cette conception de l’amour, ils entreprennent de réaliser la chasteté, en ne possédant sur la nature de leurs impulsions que des notions erronées ; si par exemple ils tentent de réfréner leurs désirs avec cette arrière-