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CABALE DES DEVOTS

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tam se trouve au complet dans le Corpus Juris, Extrav. comm. 1. I, titre 8 ; De major, et obed., c. I, Lipsiae, 1881 ; t. II ; col. I2115. Aussi dans Dupuy, Preuves, pr. 54- Les parties essentielles dans Denzinger ^<', 468-469. Pour le commentaire, voir Alf. Baudrillart, Des idées qu’on se faisait au XIV siècle siir le droit d’intervention du souverain Pontife dans les affaires politiques (Revue d’histoire et de littérature religieuses, 1898) ; F. Berclitold, Die Bulle Unani Sanctam (1887) ; F. Ehrmann, Die Bulle Unam Sanctam (1896) ; H. Hemmer, article Boniface VIII du Dictionnaire de Théologie catholique : Gard. Hergenrôlher, Katholische Kirche und christlicher Staat, Fribourg, 18'j6 ; Jungmann, Dissertationes, t. VI, p. 48 sq.

J. DE LA SeUVIÈRE.

BRUNO (GIORDANO).— Né en1548àNola, prcs de Naples, entra, à Tàge de quinze ans, au noviciat des Frères Prêcheurs. Accusé d’hérésie devant l’inquisition romaine, il jeta, dit-on, son accusateur dans le Tibre, quitta l’habit de l’ordre et s’enfuit (lô^ô). Après avoir erré en Italie, en France, en Angleterre, en Allemagne, successivement excommunié par les calvinistes de Genève, par les luthériens de Ilelmstadt, chassé de Londres, de Paris, de Strasboiu’g, il revint à Venise, où ses doctrines religieuses le compromirent de nouveau. L’Inquisition romaine le réclama, et, après quelcpies années de détention, il fut condamné à la dégradation et brîilé vif, à titre d’hérétique obstiné (17 février 1600).

Bruno excita peu de sympathies parmi ses contemporains, et, dans le courant du xvii' et du xviiic siècles, l’opinion des érudits qui s’occupèrent de sa personne ou de ses ouvrages lui fut franchement défavorable. De nos jours, au contraire, on exalte ses connaissances en mathématiques et en astronomie ; en philosophie, il a, dit-on, ouvert des voies nouvelles. Quant à sa mort, elle fut celle d’un martyr s’immolant au triomphe de la liberté de penser.

Il n’est pas besoin d’une grande perspicacité pour deviner les motifs de cet enthousiasme subit chez les ennemis de l’Eglise. Seulement leur choix a été malheureux. Les éloges sans mesure décernés au moine apostat ont provoqué l’examen critique de ses doctrines, et Bruno n’a rien à y gagner.

Quelle science a-t-il fondée, renouvelée, agrandie ? En philosophie, il adopte l’hypothèse panthéiste ; mais elle était connue et même réfutée longtemps avant lui. Il n’a même pas le mérite d’avoir exposé ses erreurs avec méthode et clarté. Spaventa (Saggi di critica filosofîca, 1867, t. I, p. 142) le traite, il est vrai, de grand philosophe ; mais il a la bonne foi d’avouer que ses œuvres exhalent un insupportable ennui ; Brucker (iï/s/or/a critica philosophiae, 1744>

t. V, p. 12) déclare qu’elles sont écrites d’une manière si obscure, que l’auteur lui-même n’en comprenait probablement pas le sens. Bayle le regarde comme

« un homme de beaucoup d’esprit, qui employa mal

ses lumières » (Dictionnaire historique, art. Brunus). Un autre historien de la philosophie reconnaît que, n’eût été sa mort violente, on ne se souviendrait plus de lui. « Les flammes qui consumèrent son corps embaumèrent son nom » (Lewes, History ofphilosophy, 1880, t. II, p. 101).

En astronomie, il a exprimé quelques idées neuves et justes ; mais il n’a point approfondi cette science dont il savait, selon Barbieri (Notizie dei matematici e filosofi napolitani, p. 119), ce qiii est nécessaire pour enseigner la sphère ; Bailly (Histoire de l’astronomie moderne, t. V, p. 53 1) le regarde comme un novateur téiuéraire, égaré par son imagination. Voilà, certes, des juges peu suspects, protestants ou sceptiques, qui s’accordent à refuser à Bruno la haute valeur intellectuelle qu’on lui attribue gratuitement de nos jours. On lui a su gré surtout d’avoir épousé avec fougue les idées de Copernic sur le mouvement de la terre, idées que Galilée allait reprendre avec l'éclat que l’on sait.

Il est vrai qu’il a été exécuté au Champ de Flore. Cette exécution avait été révoquée en doute ; mais la publication, en 1869, d’un passage d’Avvisi di Borna (manuscrits de la bibliothèque vaticane, fonds Urbino, n » 1068), et, en 1875, d’un autre passage, tiré aussi d’un recueil d’Avvisi, a dissipé toutes les incertitudes. Giordano Bruno a donc été exécuté ; mais, avant de l’honorer comme un mai’tyr, il convient d’examiner la cause pour laquelle il est mort. C’est la cause de l’athéisme, auquel le panthéisme conduit logiquement en supprimant la personnalité divine ; c’est la négation du libre arbitre et de l’immortalité de l'àme ; c’est la rupture des vœux par lesquels il s'était librement consacré à Dieu. Il appartenait à la classe de ces malfaiteurs intellectuels, pour qui notre époque est si indulgente, mais que nos pères avaient le bon sens de châtier plus sévèrement que les criminels vulgaires.

Cf. Berti, Vita di Giordano Bruno, Turin, 1868 (précieux à cause des documents inédits, mais beaucoup trop favorable" aux idées de Bruno) ; Balan, Giordano Bruno, Bologne, 1886 ; Previti, Giordano Brunoe i suai tempi, Prato, 1887 (ouvrage estimable ; l’auteur a réimprimé les documents publiés par Berti) ; H. de l’Epinois, Jordano Bruno, d’après les nouveaux documents et les récentes publications, dans la Revue des questions historiques, t. XLIl, 1887, p. 180-191 ; John Gérard, dans le Month, juin 1908, p. 578-582 ; P. Duhem, Essai sur la théorie physique, de Platon à Galilée, p. 119, Paris, 1908.

[P. GUILLEUX.]

C


CABALE DES DÉVOTS. — L’objection contre le catholicisme, au sujet de la cabale des dévots, peut se formuler ainsi : L’Eglise de France, quand elle était en faveur, au xvii<= siècle, a pratiqué, envers les protestants et autres hétérodoxes, toutes les manœuvres de persécution, d’intolérance et même de délation occulte, qu’elle réprouve à présent dans la Franc-Maçonnerie (Félix Babbe, dans la Revue historique, tome LXXI, pp. 243-302, 1899 ; N. WEiss, dansle Bulletin de la Société de l’histoire du protestantisme français, toTue XLIX, pp.gi à 107, 1900 ; Baoul Allier, La cabale des dévots, 1627-1666, Paris, 1902, in-8°.

Cf. Alfred Rebelliau, dans la Revue des Deux Mondes, tome XVII, p. 135, 1908 ; Arvède Barixe, ibidem, tome XVIII, p. 621, 1908 ; Jules Croulbois, dans la Revue d’histoire et de littérature religieuses, tome IX. 1904 ; Jean Mariéjol, Henri IV et Louis A^I II [Histoire de France de M. Lavisse, tome VI, 2^ partie], Paris, 1905, in-80, p. 874.

Pour juger équitablement ce problème, il faut répondre à trois questions : i ») Qu’est-ce que la

« cabale des dévots » ? a") Qu’a-t-elle fait contre les

protestants : > 3^) A quelles œuvres s’est-elle consacrée ?