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BABYLONE ET LA BIBLE

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(le côté les additions [les parties deutérocanoniques] » (CoRNELY, Manuel d’Introduction, igo’; , t. I, p. 420). Dans un récent commentaire du livre d’Estlier (1908), M. L. Baylks Patox expose soigneusement les diverses théories sur l’origine de la fête des Pourim (p. 77-94) : origine juive, ou grecque, ou perse ou babylonienne. Cette dernière opinion est celle d’un grand nombre de critiques modernes. Mardochée, remarquent-ils, répond évidemment au nom du grand dieu de Babylone, Mardoui- ; Esther est la forme araméenne ordinaire du nom de la déesse Istar. Le nom juif d’Estber, Hadassa (Estb., 11, 7) signitie en hébreu myrte ; en babylonien hadasatu est un nom poétique ^ovLT jeune épouse. Esther est cousine de Mardochée (d’après hébr. el LXX) ; même relation de parenté entre Istar et Mardouk. Ilaman serait Hunian (ffumman), le principal dieu des Elamites ; et Vasti représenterait la déesse élamite Masti (= ; Vasti). Donc, au fond, c’est l’antagonisme entre divinités babyloniennes et elamites. « Ces similitudes de noms, ajoute le )nème auteur, sont certainement frappantes et peuvent dilTicilement être fortuites. »

Quant au fond même du récit, on a donné de son origine les explications les plus diverses. Jensen en découvre la clef dans l’épopée de Gilgameè. Zimmerx trouve dans le poème mythique de la création le prototype de la légende d’Esther. Pour Wixckler il faut un mythe astral : Mardochée-Mardouk est le soleil du printemps, Tammouz, qui revient des régions souterraines, etc. Même divergence d’opinions pom* l’origine de la fête des Pourim. Selon les uns, c’est la fête babylonienne de Zagniuk, fête du « commencement de l’année », en l’iionneur de Mardouk. Suivant les autres, c’est plutôt la fête perse des Sacées, ou bien, c’est une combinaison des deux. Malheureusement la date de ces fêtes ne coïncide pas avec celle des Pourim.

Enfin pour le nom de Pourim on a jiroposé des étymologies variées (cf. P. Haupt, Purim, p. 16-22, BA, VI, 2) ; mais jusqu’à présent on n’a pas rencontré dans la littérature babylonienne un pareil nom pour la fête prétendue prototype de celle des Hébreux.

Après cette revue, la conclusion de M. Paton est, avec raison, assez hésitante : la fête des Pourim est probablement empruntée à Babylone, ou directement, ou indirectement par l’intermédiaire de la Perse, sans que l’on sache avec précision de cjuelle fête babylonienne elle dérive (p. 94). A la suite de ces considérations et autres semblables, M. Paton est devenu complètement scepticpie sur l’historicité du livre ; il n’admet pas même une base historique du récit : c’est aller beaucoup trop vite et trop loin. Disons plutôt avec M. Lucien Gautier : n La théorie assyriologique susmentionnée pourrait être admise comme fondée : il n’en résulterait pas l’impossibilité de croire que, sous le règne d’un roi de Perse, les Juifs habitant ses Etats aient été l’objet d’une éclatante délivrance » (Introduction à l’Ancien Testament, t. II, 1906, p. 248). « Les éléments babyloniens et elamites (lu livre d’Esther ne sauraient être méconnus… » ; et cependant « avec plus de raison encore que pour Judith, on peut admettre ici un fond historique… » {ItB, 1908, p. 807).

Prêtres et sacrifices. — A Babylone comme à Jérusalem certaines qualités sont requises pour celui qui doit accomplir les fonctions du sacerdoce. On a comjiaré Lév., xxi, 17-28 avec un texte de la bibliothèque d’Assourbanipal public et traduit par Zimmern, ^l’abord en 1896, puis de nouveau, avec diverses corrections dans KAi^, p. 533-534. M. Fr. Martix et le P. Dhorme ont également traduit ce texte, obscur sur plusieurs points (TR, 1908, p. 282-240 ; Choix de

textes…, p, 140-147). Paul Haupt s’en est servi, en 1900, dans un article intitulé « Les éléments babyloniens dans le Rituel Lévitique » (Journal of biblical Literature, 1900, p. 67, 64). D’après ce document, le prêtre-devin doit avoir une origine sacerdotale, une naissance légitime (Haupt, Zimmern :’( une origine pure », KAT^, p. 584, cf. 889 ; — Martin : « un père « pur », « beau)i, doué des qualités corporelles exigées du candidat » /. c, p. 289 (sens improbable )) ; de plus, une taille et des proportions normales, point de défaut aux yeux, aux dents, aux doigts, etc. (cf. Lév., xxi, 20 hébr.).

Les animaux offerts en sacrifice étaient les moutons brebis, agneaux, chèvres, taureaux, gazelles, colombes, etc. (cf. Deut., xiv, 4, 5). Les victimes doivent être pures, sans défaut. Certaines parties déterminées doivent être olTertes à la divinité ; d’autres sont réservées aux prêtres (cf. KAT^, p. 697, 8 ; Fr. Martin, TR, 1908, p. XVII, et dans Dhorme, Choix de textes…, la tablette cultuelle de Sippar, p. 890-398). « Avec les victimes, les prêtres assyriens offraient des gâteaux, des pains, des dattes, du miel, du beurre, du lait, de l’hydromel, du vin ordinaire, dvi vin de dattes, du vin de sésame, surtout de l’huile…, diverses sortes de farine, de la fleur de fai’ine « , du cèdre, et, « en guise d’encens, du cyprès et diverses espèces de plantes… Nous retrouvons une partie de ces objets dans les offrandes ou les cérémonies lévitiques >/. fai’ine, huile, vin. « Le cèdre est employé dans la jîurification de la lèpre sur les individus et sur les maisons et dans le sacrifice de la vache rousse (Fr. Martin, TR, 1908, p. xviii). Xon seulement l : i nature des offrandes est souvent la même de part el d’autre, mais parfois aussi le nombre des victimes ou des choses offertes. Cest frappant surtout dans le rite des douze pains de proposition ; les textes babyloniens nous présentent un usage analogue aux prescriptions du Lévitique (xxiv, 6-9) : 12 pains, ou gâteaux étaient offerts à Istar, etc., 3 X 12, à telle autre divinité (KAT’-^, p. 600).

A côté du nombre 12, les nombres 8, 7 et 9 jouent aussi un rôle important. Au XVe congrès des Orientalistes, août 1908, F. X. KuGLER a lu un mémoire sur le sens symbolique du nombre 9 dans les documents religieux et historiques.

Croyances sur la vie après la mort. — Siu’la question du sort des âmes après cette ie il est intéressant de comparer les croyances Israélites avec les idées babyloniennes. Dans les nomlireux travaux publiés sur ce sujet, depuis trente ou quarante ans, l’opinion des critiques a subi un revirement singulier. D’abord « on était unanime à soutenir qu’au début les Israélites croyaient la mort suivie d’un néant à peu près comi^Iet. Semblables en cela, pensait-on, aux Phéniciens, aux Babyloniens, aux Grecs, ils prêtaient aux morts, dans le scheol où ils vont tous, à peine une vague ombre d’existence… Ils ne louent plus Yahvéh. C’est le non-être… » (Ad. Lods. La croyance à la vie future et le culte des morts dans l’antiquité israélite, 1906, p. 2)- Renan s’est joué, comme d’ordinaire, dans des négations paradoxales sur ce thème ; il décrit la psychologie du Sémite pour qui « la vie, c’est le soufllc de Dieu répandu partout… Quand le souflle remonte vers Dieu, il ne reste plus qu’un peu de terre » (Hist. du peuple d’Israël, t. 1, p. 42). Plus loin, il est vrai, il parle dune « vie triste et morne » dans le scheol, mais fqui équivaut à peu près au néant (p. 129-131). En 1872, puis en 1882, J. Halévy a combattu ces idées en posant les thèses suivantes : « i » Les Sémites, comme on le voit jiar l’exemple des Assyro-Babyloniens, ont eu une croyance développée à la vie d’outre-tombe ; le poème