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BABYLONE ET LA BIBLE


<’unéiformes cananéennes, de provenance soit babylonienne (vers 2000) soit palestinienne (Ta’annek vers ij150), est très incertaine ^^ (Die alttestamentliche Relii ; ion im Rahmen der arideni altorientalischen, p. 61).

Messianisme. — Dans les Inscriptions cunéiformes et l’Ancien Testament. 3° édition de l’ouvrage primitif de ScHRADER, totalement refondue et différente par le fond, la forme et l’esprit, M. Zimmern se livre aux rapprochements les plus risqués entre les conceptions polymorphes du panthéon babylonien et les croyances religieuses de l’Ancien et du Nouveau Testament. A propos de Mardouk on voit apparaître le Christ, Rédempteur du monde, la plénitude des temps, le Christ envoyé par son Père, la Passion, la mort du Sauveiu’des hommes, sa résurrection et son ascension. A côté de la déesse Istar on place la Vierge Mai’ie, Mère de Dieu. Ces rapprochements se fondent sur des ressemblances superticielles, purement extérieures, matérielles ou verbales. Quel rapport véritable y a-t-il, par exemple, entre Anou. le dieu babylonien du ciel, voisin de tant d’autres dieux qui peuplent le ciel et la terre, et l’idée des Hébreux qui se représentent le ciel comme l’habitation de Dieu, son royaume, le royaume des cieux ? (KAT^, p. 352, 353). Parfois la doctrine juive ou chrétienne est mal comprise, déflgxirée, dans ces parallèles forcés ; parfois aussi le texte cunéiforme est mal interprété, comme quand M. Zimmern donne pour prototype du Serviteur de lahvé souffrant un personnage qui se dit juste, mais qui souffre sans résignation, et qui n’a pas la moindre idée d’expier les crimes des autres, c’est-à-dire qui manque des notes caractéristiques du Serviteur de lahvé dépeint par Isaïe. Tout au plus peut-on comparer ce personnage, comme on l’a fait, à Job. Il <’st d’ailleurs légitime de louer la haute poésie de ce poème du Juste souffrant. Plutôt que d’en citer quelpie fragment, mieux vaut renvoyer à la traduction iTiiplète que j’en ai donnée dans les Etudes (mars, . y03, t. XCIV, p. 803-806) et à celle du P. Dhorme {Choix de textes…, p. 872-379).

On peut dire avec assurance que rien, jusqu’ici, n’a clé retrouvé dans les textes cunéiformes qui puisse passer pour le prototype ou la source, pour le pendant ou l’analogue de l’espérance messianique d’Israël. La méthode de comparaison, ainsi conçue et ainsi appliquée, n’a rien de scientifique : souvent elle procède a priori ; elle trouve ce qu’on ce » / trouver ; pres<iue toujours elle table sur des données insuffisantes : connaissance objective insuffisante, pour ce qui conerne la religion babylonienne, où il reste tant à déouvrir et à interpréter ; connaissance subjective iicomplète, du côté de la religion Israélite, pour plu’ieurs assyriologues peu compétents danscette partie. Vussi est-ce un conseil très sage que des savants, ses ais, ont donné à M. Hugo Radau, en le priant de intinuerle déchiffrement des tablettes de Nippour, ’l de remettre à plus tard la publication de son article sur h la Trinité babylonienne, prototype de la lirétienne w (Bel, the Christ…, 1908, préface). D’autres ^syriologues, Delitzsch, Zimmern, Jensen, devraient iissi rester sur leur terrain où ils rendent des sériées éminents, et résister à la démangeaison des "mparaisons.

Prophétisme : divination, sorcellerie. — « Les asipi -ic] ou « prophètes » formaient une classe à part. A luelques points de vue ils ressemlilaient aux prophètes d’Israël. » Ainsi parlait M. A. H. Sayce dans ^es Gifford Lectures, publiées en 1902, sous le titre ^he religions ofvncient Egypt and Babyloniu. Et plus "in : « Jusqu’à quel degré le prophète babylonien

sseniblait-il au prophète hébreu, il est pour le mo ment impossible de le dire. Mais ils différaient certainement en deux points « : d’abord, le prophète babylonien était membre d’un corps sacerdotal, tandis que les fonctions de prêtre et de prophète étaient indépendantes en Israël ; de plus, à Babylone, « le prophète était intimement uni au magicien et au nécromancien » ; il en était, au contraire, essentiellement distinct chez les Hébreux (p. 463-466).

Quelques remarques sur ces assertions. D’abord le personnage babylonien qui semblerait se rapprocher le plus du prophète n’est pasl’rtii/) », lequel est plutôt exorciste, chargé des conjurations et des expiations, mais le hdrii. « Le devin par excellence, l’interprète de la volonté des dieux, le prêtre chai’gé de rendre les oracles, c’est le bàrù », dit le P. Lagrange dans une excellente étude sur les textes publiés par Zimmern (Beitrage zur Kenntnis der bab. Religion, 18961goi).

« La traduction littérale de bàrù serait voyant,

mais ce mot identique, d’après l’usage, une vision intérieure, le don de la prophétie ; le bàrù regardait surtout l’avenir dans le foie des victimes » (liB, 1901, p. 404. 405). Voir aussi les pages substantielles de M. Fr. M.rtix, Textes religieux assyriens et babyloniens, 1908, introduction.

Déjà sous Hammourabi il existait un collège de ces prêtres-devins. On les retrouve au temps des derniers rois assyriens et babyloniens : Sennachérib les consulte pour savoir la cause de la mort violente de son père Sargon. Asarhaddon est encouragé, par les bons oracles qu’ils lui communiquent, à rebâtir Babylone ; ils exercent encore leurs fonctions sous Nabonide. Des prières et des consultations adressées à Samas, le dieu-soleil, par l’intermédiaii’e du irtr « , pour obtenir la révélation de l’avenir ou de quelque dessein secret, ont été publiées par J. A. Knudtzon (Assyrische Gebete an den Sonnengott… 1898). Elles sont datées des règnes d’Asarhaddon et d’Assourbanipal.

En voici un spécimen :

« O Samas, grand seigneur, à ma demande dans ta

faveur lidèle daigne répondre ! Depuis ce jour, le troisième jour de ce mois, du mois de Arou jusqu’au onzième jour du mois de Abou de cette année, dans ces cent jours et ces cent nuits, espace de temps lixé (pour limite) à l’oracle du prêtre-devin (bàrù) ; dans cet espace de temps fixé est-ce que Kastariti avec ses troupes, ou les troupes desCimniériens, ou les troupes des Mèdes, ou les troupes des Mannéens, ou tout autre ennemi, réussiront dans leurs projets ? Soit d’assaut, soit par force, soit par les armes et la bataille, soit par une brèche, une mine, ou à l’aide des machines de siège…, soit par la famine, soit en Aertu des noms du dieu et de la déesse, soit par des pourparlers et des transactions amicales, soit par tout autre moyen et stratagème usité pour la prise des villes, prendront-ils la ville de Kisassou, entreront-ils dans les murs de cette ville de KiSassou ? S’enipareront-ils de cette ville de Kisassou, tombera-t-clle entre leurs mains ? Ta grande divinité le sait. La prise de cette ville de Kisassou, par quelques ennemis que ce soit, depuis ce jour jusqu’au (dernier) jour du temps fixé, est-elle ordonnée, résolue, par l’ordre et les arrêts de ta grande divinité, ô Samas, grand seigneur ? Est-ce qu’on le verra ? Est-cequ’on l’entendra dire ? " (Knudtzon, I. c, n" I ; cf. Jastrow, Die Religion Bab. und Assyr., Il, p. 177).

Là, comme en général dans Ihabitude d’interroger les oracles, se manifeste laferine croyancedes anciens que la divinité dirige tout ici-bas et connaît d’avance le résultat des actions humaines. Mais devant cette consultation compliquée, où les formules synonymes sont multipliées, de peur, semble-t-il, que le dieu ne comprennede travers ou n’élude la question, on songe