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APOTRES (SYMBOLE DES)


caractères internes et le style du symijole des Apôtres, il semble qu’on doive en placer l’origine aux environs de l’an loo. Le style en est d’une simplicité et d’une sobriété qui fait penser à l'âge subapostolique, dit M. Burn. Il n’j' est pas question de l'œuvre de la création, qui préoccupa particulièrement les esprits après l’apparition du gnoslicisme. Si donc on ne peut, d’une part, l’attribuer aux grands Apôtres Pierre et Paul qui évangélisèrent la capitale de l’empire, on ne peut guère non plus en retarder la composition jusqu’en plein ii « siècle.

M. Zahn voudrait remonter plus haut que l’an loo, persuadé qu'à cette date il y avait à Rome et à Antioclie deux symboles assez dissemblaljles dans l’expression (témoin la cliristologie de saint Ignace), mais très apparentésdansladoctrine.Ces deux C/ef/o auraient été des formules sœurs, issues d’une formule primitive due aux Apôtres eux-mêmes. Cette hypothèse ne nous paraît pas soutenable. Comme le fait remarquer M. Burn, fnirodiiciioii, p. 66, elle tombe devant l’objection formidable que voici : Si le Credo avait été dicté littéralement par les Apôtres, comment la première génération chrétienne eùtelle eu la présomption d’en moditier le texte ? « Il convient cependant de l’appeler un Credo des Apôtres, d’abord parce qu’il renferme la substance de l’enseignement ^apostolique, puis parce qu’il est l'œuvre d’un esprit qui ne fut séparé des Apôtres que par une seule généi’ation. w Burn, The Apostles Creed, p. 30.

L’aire d’influence de ce formulaire n’est pas nettement déterminée au regard dos critiques. Quelquesuns estiment que le vieux Credo romain est à la base de tous les sj’mboles, tant orientaux qu’occidentaux, de contexture et de cadre semblables. Cette thèse est diflicilement acceptable. Cf. Burn, The Apostles Creed, p. 32-36. Sans nous attarder à la discuter, notons simplement que, du moins, tous les symboles occidentaux dépendent du symbole romain primitif. Sur ce point tout le monde est d’accord.

Le Textus receptus. — Mais le texte reçu de notre Credo diffère considéi-ablement de celui du iv siècle. Il s’en distingue par les appositions suivantes :

« Créateur du ciel et de la terre » , « a souffert » , « est

mort » , « a été conçu » , « est descendu aux enfers » ,

« Dieu (le Père) tout-puissant » , « catholique » , « la

communion des saints » , « la vie éternelle » . Dans le second article, l’ordre des mots « Christ Jésus » se trouve interverti. Reste à savoir d’où vient ce symbole, comment et quand et où il lit sa première apparition.

Il est à remarquer que, dès le i' siècle, nombre des appositions que nous venons de citer iîguraient dans certains Credo ; Nicetas de Remesiana donnait

« Créateur du ciel et de la terre » , « a souffert » ,

« est mort » , « catholique » , k la communion des saints » , « la Aie éternelle » ; le symbole d’Aquilée contenait : u est descendu aux enfers » , cf. Hahn, ouv. cit., p. 47-49 ; le Credo espagnol qui nous est connu par les écrits de Priscillien, offrait au septième article la forme définitive : « est assis à la droite de Dieu le Père tout-puissant » . PhéJjadius d’Agen, qui composa le formulaire de Rimini en Sôq, écrivait : .. a été conçu du Saint-Esprit, est né de la Vierge Marie » , au lieu de « est né du Saint-Esprit et de la Vierge Marie » . Ailleurs il introduit le mot « a souffert » , qu’on retrouve aussi dans le Credo de saint Victrice. Cf. Hahn, p. 69-70. Il suffit donc qu’une Eglise ramasse toutes ces A-arianles et les fonde dans son Credo pour avoir, ou peu s’en faut, le formulaire qui constitue le Textus receptus.

Quelle sera cette Eglise ? L’Eglise romaine ? l’Eglise

des Gaules ? ou même un monastère influent tel que Bobbio ? M. Burn n’ose se prononcer.

11 ne nous paraît pas vraisemblable que ce soit ' l’Eglise romaine. Le pape Pelage (555-559) employait encore le symbole primitif, et si saint Grégoire le Grand, aux euvirons de l’an 600, introduit le mot « a été conçu » , dans une profession de foi priA'ée, (Hahn, p. 28), il conserve sûrement pour l’usage public la fornuile ancienne. Comme nous l’avons dit ailleurs (Etudes de critique, p. Sg) le symbole importé de Rome en Grande-Bretagne, soit à la fin du Ai^" siècle, soit à la fin du au', par les missionnaii-es romains, était le texte du Credo primitif, sans Avariante appréciable, témoin le Symbole contenu dans le /^6rtH//erd’Ethelstan. Le Credo romain n’avait donc pas été modifié officiellement à Rome avant le au" siècle. Chose remarquable, le Codex Sessorianus 52, qui est un manuscrit daté du pontificat de Nicolas h'^ (ixe siècle) contient tout à la fois et le aIcux Credo romain et le Textus receptus et le Symbole de Nicée. Les trois textes y sont religieusement conserA'és, mais les deux derniers seuls sont en usage. Si le Aieux Credo romain s'était peu à peu transformé, à Rome même, en Textus receptus, il n’y aurait pas eu de raison, ce semble, de conservcr la forme primitiA’e à côté du texte définitif, l’une ayant été insensiblement absorbée par l’autre. Et M. Burn paraît entrer dans cette pensée quand il écrit (The Apostles Creed, p. 53) : « Nous pouA’ons dire avec quelque confiance que le A’ieux Credo romain n’a pas cessé d'être en usage jusqu’au jour où il fut remplacé par le texte rcvisé, qui ne fut pas regardé comme une forme nouvclle mais simplement comme une forme plus complète du sjnibole. »

Le fondateur de Bobbio, saint Colomban (-|- 61 3), ou l’un de ses disciples serait-il l’auteur du Textus receptus ? M. Burn incline Aisiblement A’ers cette hypothèse, et Aoici comment il fut amené à la proposer. Nous aA’ons déjà au que le Credo de Nicétas de Remesiana conqjrenait la plupart des additions qui furent faites au Symbole romain primitif. Nicétas propagea son Credo dans son pays, c’est-à-dire dans une partie des Balkans, la Dacie. Un autre symbole du même temps, conservé parmi des fragments ariens et appartenant aux terres Aoisines du Danube, à la Pannonie et à la Mésie, renferme également les appositions : « Créateur du ciel et de la terre » ,

« a souffert » . Il est probable que ces symboles,

reçus dans la presqu'île des Balkans, tiraient leur origine des églises orientales. Tous les Credo orientaux font allusion à l’a^uvre créatrice de Dieu le Père. Le fameux sjuibole publié à Sirmium en 35 1, et qui est l'œuvre de l'évêque Marc d’Aréthuse, signale, en outre, la descente du Sauveur aux enfers. Hahn, p. 196.

Or, d’autre part, Dom MoRix a découvcrt un Credo qui n’est Aiaisemblablement que la profession de foi de saint Jérôme et qui se rapproche plus encore que les précédents du Textus receptus. On y lit : « Je crois en un seul Dieu le Père Tout-Puissant, créateur des choses AÙsibles et invisibles. Je crois en un seul Seigneur Jésus-Christ, le Fils de Dieu… qui pour notre salut est descendu du ciel, a été conçu du Saint-Esprit, est né de la Vierge Marie, a souffert sous Ponce-Pilate, sous le roi Hérode, a été crucifié, est mort, est descendu dans l’enfer…, est ressuscité le troisième joiu', est apparu aux Apôtres. Après cela, il est monté au ciel, est assis à la droite de ©ieu le Père, d’où il Aicndra juger les A’ivants et les morts. Et je crois au Saint-Esprit… Je crois la rémission des péchés dans la sainte Eglise catholique, la communion des saints, la résurrection de la chair pour la Aie éternelle. Amen. » Code.r 28 de Saint-Mihiel, ix" siècle.