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APOTRES (SYMBOLE DES]

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proposer celle attriltution, c’est la découverte trun texte apparenté au Credo de Marcel d’Ancyre, texte tiré du Psautier du roi Ethelstan et sûrement conforme au symbole romain primitif.

En remontant du iv' au m* siècle on suit aisément la trace de ce Credo. Novatien, qui s'éleva contre le pape Corneille et entreprit de le supplanter, écrivit vers 260 un traité de Trinitute où se reconnaissent très nettement les principaux articles du Symbole (Hahn, p. 15, 16). Dans les lettres 69 et 70 de saint Cyprien, cjui sont des environs de 255, nous lisons les formules suivantes : « Credis in remissionem peccatorum et vitam aeternam per sanctam ecclesiam ? » et encore : « Credis in vitam aeternam et remissionem peccatorum per sanctam ecclesiam ? » L’emprunt au questionnaire baptismal est incontestable. A noter les mots « vitam aeternam « .qu’on ne lit pas dans le symbole ronuiin.

TcrtuUien est plus explicite. Nous avons de lui quatre professions de foi qui reproduisent d’une façon très reconnaissable les articles du Credo romain. Et ce n’est pas là une simple co’incidencc due au hasard. Tertullien invoque l’unité de foi qui existe entre l’Afrique et Rome ; il invoque même expressément l’autorité dogmatique de l’Eglise romaine : « Vous êtes près de l’Italie, dit-il à son interlocuteur dans le traité des Prescriptions, cap. 36 ; vous avez Rome qui fait autorité chez nous… Voyez ce qu’elle a appris (des Apôtres), ce qu’elle professe de concert avec les églises africaines : quid citm africains quoque ecclesiis contesserarit. » Remarquez ce contesserarit qui indicjue une règle de foi secrète, un mot d’ordre, un « mot de passe » des premiers chrétiens. Tertullien continue et cite quelques articles du symbole : « Unum Dcum novit, creatorem universitatis et Christum Jesum ex Virgine Maria Filium Dei ereatoris et carnis resurrectionem. » Ailleurs il est Ijeaucoup plus complet. Il faut croire, dit-il, « en un seul Dieu tout-puissant, créateur du monde, et en son Fils Jésus-Christ, né de la Vierge Marie, crucifié sous Ponce-Pilate ; le troisième jour, il est ressuscité des morts, a été reçu au ciel, est assis maintenant à la droite du Père, et viendra juger les Aivants et les morts après la résurrection de la chair. » De virginihits velandis, c. 1 ; cf. de Baptismo, 13 ; de Præscrip., 13.

Pour Tertullien cette règle de foi remonte très haut dans l’Eglise. Il accuse Marcion de l’avoir altérée dès le milieu du n^ siècle, et, d’une façon plus générale, il déclare que « la vérité sur la règle de foi a subi une altération après les temps aposlolicpies » . Dans sa pensée, le Credo romain, i-esté inviolé, se rapproche sûrement des origines. Croit-il qu’il ait été proprement rédigé par les Apôtres ? A cet égard son langage, sinon son sentiment, est extrêmement vague. « L’Eglise, dit-il, a reçu cette règle de foi des Apôtres, les Apôtres du Christ, le Christ de Dieu. » Visil)Iement il s’agit ici de a doctrine, et non proprement de la formule qui la contient.

Avec Tertullien nous touchons à la (in du ii^ siècle. Saint Irénée, saint Justin, Marcion nous font remonter plus haut encore.

La carrière de saint Irénée est parliculièrement intéressante. Ce docteiu-relie en quehqu> sorle l’Orient à l’Occident et marque la transition entic Vàgesiihapostoliqiie et le ni e siècle. Il natpiit en Asie minciu-e et fut le disciple de saint Polycarpe. Jeune encore, il vint en Gaule et reçut la prèliise à Lyon. Une importante mission qu’il reiiq)lit à Rome lui permit de connaître le Credo de celle Eglise. Il était naturel cpie ses écrits contre les hérésies du temps, notanunent contre le gnoslicisme, renfermassent sa

profession de foi. On y remarque, Ad-ers. Hæreses, 1, 10, une règle de foi qui rappelle en certains endroits les termes du synd)ole romain primitif. Par exemple les formules, « un Dieu le Père tout-puissant >s a le Christ Jésus » , sont caractéristiquesVle ce Credo. Par contre, » créateur du ciel et de la terre et de la mer » et quelques autres traits montrent à l'évidence qu’Irénée a recueilli ailleurs certains éléments de la règle de foi cju’il préconise. A l’entendre, les diverses communautés chrétiennes, la Germanie, l’Ibérie, les Celtes, l’Egypte, la Libye, avaient reçu la même foi. Mais il faut évidemment prendre cette assertion dans le sens d’une réelle unité de doctrine et non dans celui d’une rigoureuse unité de formule. Le fait qu’il ne mentionne pas le Saint-Esprit, ajirès avoir longuement détaillé la doctrine de l’Incarnation, a même fait conjecturer, non sans vraisemblance, que son Credo personnel consistait uniquement dans la formule ancienne : « Je crois que Jésus est le Fils de Dieu. 1 Le reste ne serait cpie le développement théologique de ce dogme capital. Quoi qu’il en soit, sa règle de foi n’en révélerait pas moins laconnaissance du Credo romain.

Marcion rompit avec l’Eglise romaine vers 140. Or M. Zaun appelle l’attention sur un passage de l’Epître aux Galates {Gal., iv, 2^) remanié par cet hérétique à propos des deux Testaments. « L’un, dit-il, est notre mère à tous, qui nous a engendrés dans la sainte Eglise, à qui nous avons fait serment d’allégeance. » Le mot « repromittere » iT.v.-f/ùjtiBu.i., est significatif ; saint Ignace s’en était déjà servi pour indiquer sa profession de foi. Les termes « sainte Eglise » ne sont pas moins dignes de remarque. M. Zahn en conclut, et d’autres critiques après lui, que l’article « sainte Eglise » était contenu dans le Credo baptismal de Marcion et par conséquent dans le Œc^o romain de l’an ! b. Cf. Birn, Introduction, p. 5 ;.

Saint Justin, originaire de la Palestine et issu de parents païens, devint un ardent propagateur de la doctrine chrétienne dèsque « les portes de la lumière s’ouvrirent à lui >-. Il enseigna à Ephèse, où probablement il reçut le baptême, et à Rome, où il souffrit le martjre (vers 165). A propos du baptême, il nous apprend que, de son temps, on donnait une instruction aux candidats et qu’on exigeait d’eux une promesse. La formule baptismale qu’il nous apporte est un peu plus développée que dans saint Matthieu : « Au nom de Dieu le Père et Seigneur de toutes choses et de notre Sauveur Jésus-Christ et du Saint-Esprit. » Sa christologie marque cpie « Jésus, le fils de Dieu, est né d’une Vierge, tju’il a été crucifié sous Ponce-Pilate, cpi’il est mort, est ressuscité, est monté au ciel, et viendra juger tous les hommes jusques et y compris Adam » . Mais toute cette doctrine est disséminée dans son Apologie et son Dialogue avec Tryphon et ne forme pas un tout qui indique un Credo. Dans iiOzDialogue(35 et ^7) il semble même réduire sa règle de foi à la croyance en « Jésus, Seigneur et CHirist » . Mais en même temps on a remarqué dans sa christologie cei’taines expressions qui sentent le Credo baptismal romain. Dans une citation de Matthieu, xvi, 2 1, = Marc, viii, 3 1, = : Luc. ix, 22, il emploie (Dialog. 51, 76. 100) le mot « crucifié » au lieu de « tué » qui est caractéristique du texte reçu. Il parle aussi ailleurs (Ihid., 80) de « la résurrection de la chair » , comme faisant partie de l’orthodoxie chrétienne. Bref, il y a lieu de croire que le Credo romain primitif ne lui était jias inconnu, ( ; f. Rurn, T/ie Apostles Creed, j). 18-20.

Irénée, Justin, Marcion sont donc des témoins de l’existence de ce Credo. Avec Marcion nous atteignons lapremière moitié du n’siècle. Aconsidérer les