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APOLOGÉTIQUE. APOLOGIE

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non pas indirectement et de loin, mais directement tt de près, rentre dans le champ normal de l’apolojiétique : d’une façon positive, les preuves qui forment la partie constitutive de la démonstration, avec Irurs supports et leurs annexes ; d’une façon néjrative, la défense de ces preuves contre les attacjues qui les saperaient par la base ou les inflrmeraient directement.

L’application est, en beaucoup de cas, facile. Dans la partie philosophique du traité, tout ce qui concerne la notion de révélation, sa possibilité, sa convenance, sa nécessité morale ou hypothétique, sa discernibililé, s impose, non seulement à titre défensif contre les adversaires de toute religion révélée, mais encore à titre de préparation positive des esprits à la démonstration proprement dite. Et parce que la notion de révélation, considérée pratiquement et dans le cas nièine dont il s’agit, est intimement dépendante de la notion de religion, il semble très utile, sinon indispensable, de partir de cette dernière notion, non pour introduire un traité de la religion naturelle, qui ne serait pas à sa place, mais pour signaler les rapports <[ui existent entre la religion purement naturelle et la religion surnaturelle basée sur la révélation divine, cl aussi pour proliter de l’appoint appréciable que peut fournir, sous le rapport de la préparation intellectuelle et morale des esprits, l'étude du fait religieux. A la philosophie appartiennent les autres vérités nécessairement supposées par l’idée de révélation, mais qui. n’ayant pas avec l’ordre de preuves propre à l’apologétique un rapport direct et en quelque sorte inhérent, rentrent dans la catégorie de préaud)ules éloignés ; telles, l’existence de Dieu, sa personnalité, sa toute-puissance, sa science absolue, sa véracité, sa Providence. Ce qui n’empêche pas qu'à une époque donnée, un besoin général des esprits ne puisse conseiller à l’apologiste de toucher ces vérités comme une préface utile, en les ordonnant à la linalité propre de l’apologétique.

Dans la partie historique du traité, on va droit au but par la vérilîcation et l’application des critères qui montrent en Jésus-Christ l’envoyé divin. De C/irisio Ic^ato du’ino, et en l’Eglise son porte-voix. Mais la constitution spécifique et hiérarchique de l’Eglise, la ]irimauté pontificale dans toute sa plénitude, l’autorité des congrégations romaines, et beaucoup d’autres questions de nos traités actuels de l’Eglise, relèvent tlu développement théologiqiu Qiu* dire de la divinité de Jésus-(^hrist ? Nombre d’auteurs l'établissent dans le De vera religiune, réserve faite de l’union hypostaticjue ; il seud>le cependant que la question appailienne proprcment à la tliéologie, bien qu’elle soit amorcée en apologétiqiude plusieurs manières, par la transcendance du Christ, par les titres extraordinaires qu’il s’attribue, par le caractère normatif de la religion parfaite et définitive, qu’il attache à son enseignement, par son rôle de rédenqiteiir ; car tout cela est sunisamment contenu dans ce que l’apol()giste utibse des Ecritures. I/autoi’ité liistorir|ue des Exangihs rentre rigoureusement dans l’inlroduclion aux saints livres ; mais, dans les circonstances acliu-Ih’s, comment l’apohigète avancerait-il et répondrait-il aux objecti()iis graves fpie, de ce côté, il rencontrera cf)ntinuellement sur son chemin, si la question est totalement présupposée ? Par exemple, sur quel terrain se placent la plupart du tenqis les achersaires, jjour attaipier la prétention du christianisme au caractère de religion surnaturelle dans son objet et divine dans son origine ? Une méthode trop ex(lusie, en ce point (romme en d’autres, mènerait infailliblement à une conception du cliristianisuu' trop sjjéculative, trop abstraite, et exposerait à rencontrer ailleurs les dillicultés <iu’on

penserait éviter au début. Supposons, par exemple, des esprits préoccupés de dillicultés critiques, exégétiques, historiques, en face de la démonstration simple du catholicisme, telle qu’elle est proposée par le cardinal Dechamps. Quelle que soit rexcellence intrinsèque et le côté avantageux de cette méthode, le fait dis' in de l’Eglise, présentée ainsi sans point d’attache aux documents qui la relient au Christ son fondateur, s’imposera-t-il sullisaniment aux esprits de cette trempe ?

Le traité De locis theologicis, comprenant l’Ecriture sainte et la Tradition, est proprement théologique, car il a pour objet la révélation divine, en tant que contenue dans ces deux sources ; l’apologétique est donc supposée déjà, et sa tâche accomplie, puisque le fait de la révélation divine est accjuis. On trouve assez couraniment, il est vrai, ce traité avec le De sera religione, sous le titre général de Theologia fundamentalis ou Institutiones propædeuticae ad sacram theolugiain ; mais cet usage peut s’expliquer sans qu’il y ait nécessairement confusion tl’objet formel entre l’apologétique entendue au sens spécifique et le traité des lieux théologiques. Des deux côtés, il y a fondement par rapport à la théologie ; seulement l’Ecriture sainte et la Tradition sont fondement intrinsèque, appartenant à la théologie par leur objet propre ; l’apologétlipie n’est qu fondement extrinsèque, comme serait un support qui remplirait ce rôle sans apjiartenir proprement à l'édifice soutenu. De même encore, rapologétique et le traité des lieux théologicques peuvent se donner comme des introductions à la théologie, dans un sens analogique : l’apologétique, comme introduction préalable qui mène à la porte de la théologie, qu’elle nous montre en cquelque sorte en prouvant la réalité de son objet ; l’Ecriture sainte et la Tradition, comme introduction méthodologiqiie, à l’intérieur même de la science sacrée, en tant qu’on peut les assimiler à un traité de logique théologique.

Remarquons enfin qu’une distinction s’impose entre nn cours De religione qui s’insère organiquement dans un corps complet d’enseignement philosophico-théologique, où les parties qui conqiosent le tout ont une dépendance nmtuelle, et un traité d’apologétique séparé et comme autonome, où l’auteur doit se proposer de répondre de son mieux aux besoins et aux préoccupations des esprits auxquels il s’adresse. Dans le premier cas, ce qui n’est pas dans la section, apologétique, peut se retrouver ailleurs, avant ou après ; il en va tout autrement dans le second cas.

2. L’apologétique est-elle proprement science ? — Problème secondaire et qui n’a d’application que dans l’hypothèse où l’on admet l’apologétique au sens restreint, comme doctrine spécifiquement distincte de la I)ure philosophie et de la théologie proprement dite, ayant son objet propre et bien délimité.

Ainsi conqirise, la question ne se pose même pas pour toute la période antérieure au xviii" siècle, où l’apologétique nous est apparue comme englobée dans d’autres traités. Cette iliseipline ne jouit évidemuient alors d’aucune autonomie ; elle est plutôt un art ou un instrument de défense au service d’une science dont elle dépend. une fonction de la théologie enquuntant çà et là les éléments qui lui sont nécessaires pour défendre ses propres fondements, les jtrineipes de la foi. C’est la conception d’une théologie apologélique, non pasausensgénéral oùcctte épithète s’appli(pu- à la théologie quand elle venge dans le détail les doguu’s révélés, mais au sens plus restreint d’une défense orientée au même but que celui de l’apologétique spéciliquement telle. Conception légitime, et dont l’innuence se fait plus ou moins sentir en