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APOLOGETIQUE. APOLOGIE


V. ac N. Testomenti, maxime couda theistas et varii nominis iiuredulos, Mayence, 17O5 ; B. Stattlcr, Demonstratio evaiigelica ^ Auf^sbourg, 1770 (Béin. év., t. X) ; Demonstratio cat/iolica, 177^ ; Neubauer, S. J., Vera religio vindicata adversus omnis genevis incredulos, Wurtzbourg-, 1771 ; Jordan Simon, W//losophie wider die starkeu Geister, ^Yu^tzboury, 1771 ; Théologie wider die starken Geister, das ist Beweisendes katliolischen Glaubens wider Rousseau, Voltaire und ihre Anhanger, Augsbourg, 1772 ; L. Yfith, S. J., Scriptura ad^'ersus incredulos propugnata, AugslKHirg, 1780-1797 ; B. Mayr, O. S. B., Vertheidigung der naiùrlichen, cliristlichen und katliolischen lieligion, Angsbourg, 1787 ss. ; Weist, Demonstratio religiouis christianæ Eichstett, 1786 ; P. Zimmer, Veritas christianae religionis [elj catholicae religionis, Angsl)ourg, 1 789-1 790. — Voir, en outre, Werner, ouv. cité, t. Y, p. io4 ss., passini.

Y. L’apologétique au XIX siècle. — La nécessité s’impose désormais de séparer plus nettement la double acception du mot apologétique, énoncée au début de cet article : l’acception générale qui englobe toute sorte d’apologie ou défense de la foi, et l’acception spéciale, qui se restreint à la démonstration ou justification positive des fondements du christianisme. Sous le premier aspect, le xix° siècle n’est que le xviii' continiié et amplifié, avec des tendances encore plus divcrgentes entre protestants et catholiques.

I. L’apologétique chez les protestants du XIX' siècle. — Là siu’tout, le mouvenjent se développe avec une variété et une complexité qui défient toute énumération de détail et toute classification générale tant soit peu rigoureuse. Conséquence naturelle de causes déjà signalées, de deux surtout : d’un côté, la fascination exercée sur beaucoup d’esprits par la conception socinienne du christianisme, qui place l’essence de la religion en dehors des conflits dogmatiques et scientifiques ; de l’autre, l’orientation que la philosophie, considérée dans ce qu’elle a d’opposé à l’intellectualisme péripatéticien, donne à l’apologétique, (^ellc-ci cessant d'être historique ou positive, pour devenir spécifiquement philosophique, quel est le résultat inévitable ? L’apologète philosophe bâtit sa construction apologétique sur le fondement de sa philosophie. De ce chef, tous les systèmes à base subjective reposant, en somme, sur l'étude ou l’analyse psychologique du moi vivant, emportent chez leurs adeptes une notion de la foi où prime l’idée d’affection, d’expérience intime ou de sentiment religieux, avec tendance commune à utiliser de préférence, ou même uniquement, les faits d’ordre interne.

« ) Allemagne protestante. — L’apologétique se présente dans des conditions différentes, suivant qu’elle

subit l’influence de l’un ou de l’autre des deux grands courants théologiques, dits conservateur et libéral. Les principales applications se rapportent à la notion de la religion et de la révélation, à la question du surnaturel, à la valeur des Evangiles considérés comme base historique du christianisme traditionnel. Voir R. KuBEL, Veher den Unterschied z-wischen der positiven und der liheralen Richtung in der modernen Théologie, ' ! ordUngen, 1881. Ce n’est pas que dans les théologiens donnés communément pour les principaux représentants du parti conservateur, Sack, TuoLUCK, G. VON Zkzschwitz, Delitzscii, Baumstark, Ebraud, etc., il faille chercher une justification du christianisme intégral, ni surtout la métJiode classique de nos apologistes ; en particulier, appel est fait habituellement, et en première ligne, à la

conformité ou à l’identité du christianisme, i^ris dans son essence, avec le témoignage de la conscience ; néanmoins la notion de religion positive et surnaturelle, et celle de la révélation, entendue d’une manifestation spéciale, positive et directe de la part de Dieu, sont maintenues. L’authenticité et l’autorité humaine des écrits primitifs qui nous rapportent l’histoire évangélique, est défendue contre les attaques de Paulus, Strauss, Baur et autres fabricateurs de systèmes aux noms variés et aux principes souvent contradictoires, mais tendant tous à dépouiller du caractère historique ce qui, dans les Ecritures, et plus spécialement les Evangiles, suggérerait l’idée d’une religion positive, spécifiquement siu-naturelle et divine dans son origine.

Il en fut tout autrement dans le camp libéral. L'évolution, commencée au siècle précédent, s’accentua surtout après l’apparition de la philosophie kantiste, qui donna une théorie à la nouvelle conception de la foi. En même temps qu’il proclamait l’hégémonie de la raison pratique, Kant confinait l’essence et la justification de la religion dans le domaine de la conscience ; il substituait à la foi d autorité la croyance entendue d’un assentiment objectivement insuffisant, mais tenu subjectivement pour suffisant, en Aertu des postulats ou des exigences de la raison pratiqiie. Critique de la raison pure, 11. Méthodologie transcendantale, c. 11, sect. 3 : De l’opinion, de la science et de la foi. La crédibilité objective et rationnelle, qui se trouvait à la base de l’ancienne apologétique, n’avait plus de sens, puisqu’il ne s’agissait plus de motifs extrinsèques d’adhésion intellectuelle à une vérité spéculative, comme celle du fait historique de la révélation. Mêmes conséquences dans la conception religieuse de Jacobi, où rien n’importe du christianisme que son mysticisme, et où la foi a toute sa justification dans la satisfaction du besoin ou sentiment religieux des individus. David Hume liber den Glauben, oder Idealismus und Realismus ; Von der gôttlichen Dinge und ihrer Offenbarung (Jacobi’s Sammtlirhe JVerke, t. II, p. 3 ss. ; t. III, p. 247 ss., Leipzig, 1815-1816). De même pour SchleiermacuER ; comme il fait consister l’essence de la religion (h s le sentiment de notre absolue dépendance à l'égard de Dieu, il fonde aussi l’apologétique sur le sens religieux ou les besoins de l'àme religieuse que le christianisme satisfait, et n’admet l’argument des miracles qu'à titre subsidiaire et pour ceux qui ont déjà la foi. Der christliche Glaube nach den Grundzûgen der evangelischen Kirche in Zusammenhange dargestellt. t. I, c. i, § 414, Berlin, ]835. Cf. Acta Vaticani, note 16 du schéma préparatoire, p. 628. A plus forte raison, la nécessité et la Aaleur des critères externes disparaissent-elles, avec l’antique notion de la crédibilité, là où l'évolution libérale atteint son terme, en arrivant à l’idée du christianisme « moderne » dans sa plénitude, c’est-à-dire à un christianisme dégagé, dans son essence, des éléments surnaturels que contenait le christianisme traditionnel, et réduit en dernière analyse à quelque résidu d'élément moral et affectif, très diversement interprété, mais dont la plus haute expression paraît être celle d’une attitiule filiale à l'égard de Dieu, analogue à celle qu’eut le Christ, conçu non plus comme l’Homme-Dieu, mais à la manière socinienne, comme l’homme-type dans l’ordre religieux et moral. Voir, pour l'évolution de ce mouvement, A. Réville, Histoire du dogme de la di’inité de Jésus-Christ, c. xi, 3" éd., Paris, 1904. Entre l’apologétique catholique ou même simplement chrétienne, et une apologétique partant de tels principes pour arriver à de telles conséquences, l’incompatibilité est évidemment absolue et le divorce irrémédiable.