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L’AVIATION MILITAIRE

Plus tard, — nous ne nous tromperions peut-être pas en disant bientôt, — la stratégie aérienne et sa filiale la tactique se développeront considérablement. Il adviendra que ces sciences prendront une grande place dans l’érudition militaire et demanderont de grands efforts d’intelligence à leurs adeptes ; elles laisseront bien loin leurs devancières continentales et maritimes qui ont eu des siècles pour se former, tandis que celles-ci, toutes nouvelles, n’auront que quelques années pour naître et les dépasser.

Nous ferons remarquer que l’ancienne stratégie ne changea qu’avec regret ses moyens d’action ; chaque fois qu’apparut une arme nouvelle, elle ne l’adopta que difficilement. Nous ne savons guère ce qui se passa pendant le Moyen Age ; la stratégie devait être bien simple. L’armement ancien se composait de piques, javelots, lances, épées, flèches, frondes, etc. La poudre les fit disparaître, — pas toutes, puisque nous avons gardé la cuirasse, le sabre et la lance. — Nous savons mieux ce qui arriva plus récemment et ce qui se passe de nos jours. Sous le premier Empire, le fusil à balle ronde et le canon à boulet rond étaient les maîtres. À Magenta et à Solférino, les Autrichiens, qui se défendaient avec des canons à boulets ronds, furent battus par les Français, qui les attaquaient avec des canons rayés et des obus. À Sadowa, les Autrichiens, qui avaient conservé l’ancien fusil, furent écrasés par les Prussiens, qui étaient armés du fusil à aiguille. À Sedan, les Français mettaient en batterie leurs canons de bronze rayés et furent vaincus par les Prussiens qui, de très loin, les mitraillaient avec leurs canons d’acier se chargeant par la culasse.

Eh bien ! malgré ces dures leçons, on vit, après les désastres de 1870, des personnalités militaires s’obstiner à conserver le canon en bronze, c’est à peine si on le modifia en lui mettant une culasse mobile. Il est vrai qu’au bout de quelques années on entra résolument dans la réforme de l’artillerie et qu’on la munit de canons en acier. Trop tard, le bien et le mal étaient accomplis ; le mal pour nous