Page:Adam Mickiewicz - Zywila.djvu/25

Cette page a été validée par deux contributeurs.
15
ZYWILA.

c’est-à-dire Diane ; car, par sa grâce merveilleuse, elle égalait presque cette déesse et l’on pensait communément qu’elle éprouvait pour le mariage une vive répugnance ; vainement, en effet, des princes et de puissants seigneurs avaient-ils envoyé de contrées lointaines leurs ambassadeurs demander sa main : à chacun elle avait opposé le même constant refus. Cela donna lieu au bruit qu’elle voulait demeurer jusqu’à la fin de ses jours dans l’état de virginité. Mais son obstination tenait à de tous autres motifs. Depuis un certain temps, la princesse Zywila s’était secrètement énamourée du lithuanien Poray, homme au cœur héroïque, que ses éclatants succès à la guerre avaient placé très-avant dans la faveur de Koryat, si bien qu’en son absence c’est lui qui gouvernait l’empire. Aussi ne lui était-il pas difficile de se ménager avec sa bien-aimée de fréquents et mystérieux rendez-vous où ils s’exprimaient leur amour et se consolaient mutuellement.

Il advint que le prince Koryat, au retour d’une rapide expédition, s’attrista grandement en remarquant un profond changement dans sa fille chérie. Ces larmes, ces soupirs, ces pâleurs, ce trouble, ces frissons continuels devant son père, lui révélèrent tout : « Fille dénaturée, s’écria-t-il, voilà donc que l’inconduite et le dé-